FLAIR BOOK CLUB: ““Clémence en colère””, l’incroyable roman graphique de Mirion Malle sur les victimes de violences sexuelles
Avec “Clémence en colère”, Mirion Malle offre un nouveau roman graphique sur la colère et la rage qui peuvent habiter les victimes de violences sexuelles. Magnifique!
Le résumé
Clémence en colère (ed. La Ville Brûle) retrace un morceau de l’histoire de Clémence, une jeune femme, qui, victime de violences sexuelles par le passé, doit composer avec des émotions fortes et difficiles à gérer, et notamment, une colère qui se révèle à la fois sourde, et envahissante dans son quotidien. Débutant une nouvelle relation amoureuse, Clémence décide de s’engager dans un groupe de parole, appelé Calacs (au Canada, Centre d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel), dans lequel elle pourra déposer, chaque jeudi soir, ce qu’elle a sur le cœur et se sentir écoutée et comprise. Petit à petit, elle parviendra à décortiquer cette rage qui l’habite, pour s’en emparer et de ne plus la subir.
Et en 3 mots-clés?
Sororité, féminisme et thérapeutique.
Pourquoi on a aimé cette magnifique BD?
Déjà parce que Mirion Malle en est l’autrice et que ses derniers romans graphiques nous avaient eux aussi bouleversée (on vous avait parlé à l’époque de “C’est comme que je disparais” et “Adieu triste amour”). Cette auteure et dessinatrice de bande dessinée française vivant à Montréal a le chic pour exprimer avec douceur les noirceurs de la vie d’une femme, dans toutes ses nuances, et pour exprimer de son coup de crayon si expressif les émotions que l’on pense être les seules à ressentir.
Elle aborde des sujets difficiles — notamment la dépression et les agressions sexuelles — en les enveloppant dans une bulle réconfortante où il fait bon lire. Car à côté des difficultés que peuvent engendrer des agressions sexuelles, les femmes ont ce pouvoir presque magique de se solidariser. Et c’est cette sororité qui ressort dans chacun des romans de Mirion Malle et sans doute encore plus dans celui-ci.
On a aussi aimé le fait que soit ici abordé un sujet dont on ne traite pas encore assez et qui fait pourtant partie intégrante du parcours des victimes d’agressions sexuelles. La colère, dans tout ce qu’elle peut avoir d’effrayante, d’envahissante et d’handicapante, lorsqu’elle s’invite dans des moments inopportuns, lorsqu’elle occulte les joies du quotidien, mais aussi, lorsqu’au contraire, elle est refoulée, interdite et taboue. Une rage qui peut réchauffer… comme tout cramer. On comprend au fil des pages que la colère a un rôle essentiel à jouer dans le processus de guérison, mais qu’elle doit s’apprivoiser pour devenir, non plus un volcan qui explose, mais un lance-flammes dont on dispose.
De l’autre côté, il y a la colère qui te protège et qui brûle les obstacles. Celle d’où partent les feux de joie.
Mise à part cette thématique principale, Mirion Malle profite aussi de ce roman graphique pour évoquer les ressources qui peuvent aider à se reconstruire après avoir été victime de violences sexuelles: la sororité notamment via les groupes de parole et les cercles amicaux, l’amour, aussi, lorsqu’il est pur et tendre, et enfin, les activités qui permettent de renouer et se réconcilier avec son corps, comme la danse thérapeutique.
À qui “Clémence en colère” va plaire?
Le risque de trigger est réel avec ce livre car il évoque la difficulté de se remettre d’un viol ou autre agression sexuelle. Si vous avez vécu un événement de ce type, sa lecture pourrait réveiller en vous des sensations désagréables. Soyez-en averti·e·s. Cela dit, et comme dit précédemment, Mirion Malle prend soin d’envelopper ce sujet d’une bulle de douceur, qui peut aussi avoir le super-pouvoir de réconforter. Les romans graphiques de Mirion Malle sont une safe place dans lequel on se sent compris.
Clémence en colère (ed. La ville Brûle), de Mirion Malle, 23 €.
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