Charlotte Cardin a passé 99 nights à peaufiner son album et nous au moins tout autant à l’écouter. Entre 2 concerts et la sortie d’un nouvel EP, A week in Nashville, la chanteuse canadienne nous a accordé un moment pour parler musique.
Quelle est l’histoire de cet album?
« C’est un album collaboratif, que j’ai réalisé avec mes amis, un été. J’avais le cœur lourd à cette époque et la création de ce disque a été mon échappatoire, ma façon de canaliser ce surplus d’émotions pour vivre des moments de joie pure. En l’écrivant, je me suis demandée ce que je pouvais faire pour me sentir vivante, davantage connectée aux choses, pour être plus ancrée à un moment où je m’éparpillais. 99 nights a eu sur moi un effet thérapeutique. »
C’est ce que disent souvent les artistes à propos de leur musique, non?
« C’est vrai, la musique est un exutoire. Au départ, quand j’ai commencé à chanter, je n’étais qu’une interprète qui reprenait les morceaux des autres. Ce qui me plaisait, c’était d’avoir trouvé ma passion, ce truc juste à moi, qui me nourrissait, qui me donnait envie de m’investir, qui me permettait de me sentir valorisée. »
Vous avez aussi été top-modèle. Le mannequinat a-t-il eu le même effet sur vous?
« Le mannequinat me permettait de me sentir valorisée, mais pour de mauvaises raisons. J’ai détesté mon expérience dans la mode. J’y ai vécu des humiliations à répétitions. C’était un milieu toxique pour moi. Je ne me sentais jamais à la hauteur. Et, je n’aimais même pas ce que je faisais. À la base, j’avais accepté de faire du mannequinat pour gagner un peu de sous, parce que ça allait me permettre de voyager aussi, mais, je ne me sentais pas à ma place. Je me demandais souvent ce que je faisais là. »
Ça vous est déjà aussi arrivé sur scène, de ne pas vous sentir à votre place?
« Non! La musique me permet de mettre des mots sur des émotions que je n’ai jamais réussi à exprimer autrement, les possibilités sont infinies. Je continue à m’améliorer en tant que musicienne, en tant que performeuse chaque jour. »
Je pense qu’il faut choisir le bonheur même quand tout va mal.
Comment allez-vous aujourd’hui?
« Je vais bien. Je pense qu’il faut choisir le bonheur, choisir de se sentir bien même quand tout va mal. C’est tellement libérateur. »
L’une de vos chansons s’appelle Jim Carrey, qui vous a d’ailleurs appelée pour vous dire qu’il avait adoré le morceau. Qu’est-ce qu’il vous inspire?
« En plus d’être un excellent comédien, Jim Carrey a aussi donné beaucoup d’interviews et fait des speechs dans lesquels il parle de notre ego, qu’il compare à cette petite voix négative dans notre tête qui nous répète qu’on n’est pas assez bons, assez-ci, assez-cela et nous empêche donc de grandir, de relever de nouveaux défis. Son discours a vraiment résonné en moi. Et donc, j’ai écrit une chanson dans laquelle je demande à Jim Carrey de m’épouser pour me libérer de mon ego. »
Et la petite voix dans votre tête s’est éteinte?
« Non, malheureusement. Je suis quelqu’un d’assez angoissé. Ce qui m’aide, c’est la musique, la méditation, le bricolage,… Toutes ces choses qui demandent à mon cerveau de s’investir à 100 % et qui me permettent de m’évader. »
Vous êtes quelqu’un d’introverti?
« Très! C’est ce que raconte la chanson Confetti. C’est une chanson de fête pour ceux qui n’aiment pas la faire. Je l’ai écrite avec un ami qui est encore plus introverti que moi en à peine quelques heures. C’était magique! Comme si tout ce qu’on avait accumulé pendant des années à aller se cacher dans les toilettes en soirée pour reprendre nos esprits jaillissait sous la forme de paroles. Au final, il y a énormément de gens qui s’identifient à cette chanson, qui souffrent d’angoisse en contexte social. »
Votre métier implique que vous soyez souvent entourée. Comment vous gérez?
« Être entourée de beaucoup de monde, être dans le bruit, dans l’action, ça draine toute mon énergie. Je n’inclus pas les concerts là-dedans, évidemment! Mais, les fêtes, les dîners où il y a beaucoup de monde, c’est un cauchemar pour moi. »
Vous êtes très heureuse avec le chanteur et acteur Aliocha Schneider mais vos chansons d’amour sont plutôt tristes. Pourquoi?
« Je m’inspire de mes relations passées, mais aussi des histoires que me rapportent mon entourage. La chanson Daddy’s a Pscyho, par exemple, raconte les relations complexes qu’on peut avoir avec son père. J’ai une relation très fusionnelle avec mon papa mais compliquée à certains niveaux. C’est le cas des 2 amis avec lesquels j’ai écrit ce titre. On a mélangé nos histoires pour en faire un morceau qui n’est donc pas que personnel. »
Qu’est-ce que votre papa a pensé du titre?
« J’ai hésité à le mettre sur l’album parce que j’avais peur que ça puisse le blesser. C’était délicat. On en a beaucoup parlé, je lui ai parlé du contexte dans lequel je l’avais écrite. Il a aimé la chanson, même si ça l’a un peu déstabilisé. Mais, je crois que l’art, c’est fait aussi pour déranger. »
En concert le 10/6 à l’OM de Liège, le 21/7 aux Francofolies de Spa et le 2/12 au Cirque Royal de Bruxelles. Infos: charlottecardin.com/tour
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