FLAIR BOOK CLUB: 5 auteurs ukrainiens à découvrir
Alors que les nouvelles du front semblent devenir plus insoutenables au fur et à mesure que la guerre se poursuit, chacun·e soutient l’Ukraine à sa manière. En faisant don de son temps et/ou de son argent, en accueillant des réfugié·e·s et pourquoi pas aussi, en soutenant le travail de ces cinq auteurs ukrainiens.
Illusoire, de penser à la lecture en des temps pareils? Si la culture peut sembler bien accessoire, elle reste pourtant un des ciments qui permettent aux Ukrainiens de tenir dans un pays mis à sac par l’envahisseur russe, entre théâtres qui continuent de répéter leurs pièces alors même que la majorité de leur troupe a fui l’Ukraine ou musiciens qui jouent chaque jour sans relâche dans l’espace public.
Si, depuis la sécurité de l’Occident, à des milliers de kilomètres du front, il est difficile d’apporter une contribution culturelle à la situation, on soutient les artistes ukrainiens à notre manière, en découvrant ces cinq livres et romans passionnants.
Lyubko Deresh – “Culte”
“Bienvenue à Midni Bourky, une petite ville étrange perdue dans les Carpates. Yurko Banzaï, un professeur de biologie inexpérimenté, y est envoyé pour faire ses premières armes ; amateur de culture underground, il est jeune et consomme des drogues en tout genre.
Il remarque très vite Dartsia Borges, jeune femme timide et rejetée par tous, en particulier par les pestes telles que Irynka, dite « Piggy la Cochonne ». Les cours passent, les journées se ressemblent, Yurko ne pense qu’à Dartsia. La belle et énigmatique Dartsia. Mais très vite, le vent tourne. Des phénomènes étranges se produisent. Des hiboux envahissent la ville, des gens disparaissent, une épidémie de grippe gagne le collège. Les rues se vident, tout comme les salles de classe. Des rêves déconcertants s’enchaînent et se poursuivent nuit après nuit jusqu’à effacer la réalité elle-même…”
Andreï Kourkov – “Vilnius-Paris-Londres”
“C’est la fin des gardes-frontière et des contrôles de passeports, un immense espoir pour un pays minuscule: le 21 décembre 2007, à minuit, la Lituanie intègre enfin l’espace Schengen. Comme beaucoup de leurs compatriotes, trois couples se lancent dans la grande aventure européenne. Ingrida et Klaudijus tenteront leur chance à Londres. Barbora et Andrius à Paris. Et si Renata et Vitas restent dans leur petite ferme à Anykšciai, eux aussi espèrent voir souffler jusqu’à l’Est le vent du changement. Mais l’Europe peut-elle tenir ses promesses de liberté et d’union? Estampillés étrangers, bousculés par des habitudes et des langues nouvelles, ces jeunes Lituaniens verront l’eldorado s’éloigner de jour en jour. Kukutis, un vieux sage qui traverse l’Europe à pied, le sait bien, lui: “Peu importe la ville où l’on veut atterrir, c’est le voyage lui-même qui est la vie””.
Yuri Andrukhovych – “Douze cercles”
“Karl-Joseph Zumbrunnen, photographe autrichien, multiplie les voyages en Ukraine dans les années 1990. Fasciné par la construction de ce nouvel Etat, il décrit dans des lettres à ses amis le chaos de la période postsoviétique et l’arrivée brutale de l’économie de marché. Les rencontres improbables et les événements inattendus lui paraissent bien plus excitants que sa vie rangée d’Européen de l’Ouest. Il tombe amoureux de son interprète, Roma Voronytch, surnommée Madame Godiche pour sa maladresse notoire ; il la suit, elle et son mari écrivain, dans un voyage à travers les Carpates. Le triangle amoureux se retrouve dans un ancien observatoire transformé en hôtel, qui porte le nom étrange de « L’auberge Sur la Lune », en compagnie des autres invités d’un mystérieux milliardaire : vidéastes, stripteaseuses, gardes du corps et intellectuels postmodernes. Dans cette « patrie du masochisme », titre d’un ouvrage de Zumbrunnen sur l’Ukraine, les situations absurdes et les malentendus s’enchaînent ; le récit aligne dans une cadence infernale affaires mafieuses, orgies alcooliques, récupération du folklore local, manouvres douteuses d’écrivains sur le déclin et relations amoureuses débridées. Le roman est aussi prétexte à une étonnante galerie de portraits, brossés avec tendresse ou grincements de dents, qui font apparaître dans une ambiance carnavalesque un tableau contrasté de l’Ukraine d’aujourd’hui”.
Maria Matios – “Daroussia la douce”
“À Tcheremochné, dans cette région bousculée par l’histoire que l’on appelle Bucovine, vit Daroussia. Tout le monde se moque d’elle dans le village, de son mutisme, de son prétendu handicap mental. On la dit folle mais Daroussia sait qu’elle n’est pas simple d’esprit. Si elle ne parle jamais aux autres ses pensées fusent sans retenue, et il n’y a qu’au cimetière, seule près de la tombe de son père, que Daroussia la Douce parvient à converser à voix haute. De plus, la simple mention d’une sucrerie provoque d’affreuses migraines chez Daroussia, elle est comme frappée d’une hache mal aiguisée. Pour apaiser la douleur, elle s’immerge dans la rivière ou s’enterre jusqu’à la taille. Un jour, arrive Ivan Tsvytchok, un excentrique fabricant de guimbardes. Tous deux s’entendent à merveille et décident d’habiter sous le même toit. Ivan fait son possible pour aider Daroussia, il parvient même à la faire parler, mais lorsqu’il rentre un jour habillé en soldat soviétique, la souffrance et le mutisme se réveillent...”
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Lina Kostenko – “Journal d’un fou ukrainien”
“Ce roman se présente comme le journal d’un programmeur kyïvien trentenaire qui commente douloureusement la mondialisation de la désinformation et la virtualisation des sentiments au tournant du millénaire. Né en 1968, année de l’invasion de Prague par les Soviétiques, ce héros souvent impuissant décrit le crescendo de catastrophes qui a marqué les années 1999 à 2004. Plus encore qu’une chronique, ce roman est un avertissement : les tragiques événements des dernières années en Ukraine y sont annoncés en creux. Et surtout, c’est un livre de combat, car le héros tente de combler le fossé qui chaque jour se creuse entre l’homme et la femme, entre les hommes d’hier et d’aujourd’hui, entre l’Europe et une Ukraine devenue un terrain d’affrontement entre des mondes antagonistes. Aussi ces annales de la folie ordinaire et du courage extraordinaire des citoyens ukrainiens s’achèvent-elles sur l’évocation de la fameuse Révolution orange, véritable Jour de colère dont est née la société civile ukrainienne”.
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