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© Pexels

ON A VU : le docu Arte ““Célibat des prêtres”” qui lève le voile sur le plus gros tabou de l’Église

Ana Michelot
Ana Michelot Journaliste

Dans la religion catholique, devenir prêtre signifie consacrer sa vie à Dieu et donc rester chaste. Une vie de célibat imposée par l’Eglise, mais en réalité pas toujours respectée. Dans le documentaire, des prêtres brisent le tabou et témoignent avoir quitté leur ministère par amour.

Rémi Bénichou et Éric Colomer ont enquêté afin de trouver des personnes dans toute l’Europe qui seraient d’accord pour raconter leurs histoires et avec elles, celle de toute une Institution dans le documentaire « Célibat des prêtres, le calvaire de l’Église ». Dans l’Église catholique romaine, contrairement à plusieurs Églises chrétiennes d’autres branches présentes à travers le monde, les prêtres doivent faire vœu de chasteté lorsqu’ils entrent dans les ordres. Un rituel obligatoire qui signifie que durant toute leur existence, ils devront rester célibataires et chastes. Un serment que tous ont prêté, mais que très peu réussissent à respecter comme le dévoile ce documentaire diffusé sur Arte. Pendant le visionnage, on apprend qu’un prêtre sur deux ne respecterait pas son engagement au célibat, selon la présidente d’une association de femmes de prêtres. Un constat choquant qui serait pourtant su par la hiérarchie ecclésiastique, qui fermerait les yeux afin de ne pas perdre les prêtres qui sont de moins en moins nombreux. En effet, tout au long du documentaire, plusieurs prêtres se succèdent et expliquent avoir vécu de nombreuses années avec une femme ou un homme tout en continuant d’exercer leurs fonctions ecclésiastiques. Lorsque la rumeur se propage ou qu’une dénonciation est faite au clergé, les prêtres sont bien souvent mutés loin de leur paroisse d’origine afin qu’ils se détachent de la personne avec qui ils entretenaient une relation. Beaucoup choisissent alors de quitter eux-mêmes leurs fonctions afin de pouvoir vivre leur histoire au grand jour. Tous font part d’une solitude trop extrême et d’un besoin d’affection et d’attention trop grand pour être refoulé.

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Le résumé

« Pour pouvoir vivre librement son histoire d’amour avec sa compagne, Marc a quitté la prêtrise en 2021, comme avant lui Bernard, déjà père de deux enfants. Wolfgang, de son côté, vit avec Peter depuis plus de trente ans. Son évêque, au courant, a fermé les yeux pendant vingt-cinq ans, car il avait besoin de lui à la tête de sa paroisse. Pierre s’est longtemps refusé aux relations avec des femmes, mais le mal-être a eu raison de ses efforts. Il est aujourd’hui marié avec une paroissienne… Des histoires qui se répètent, tant un nombre considérable de prêtres se disent prêts à dénoncer le vide affectif et charnel qu’engendre l’obligation du célibat. Pourtant, l’Église catholique romaine, la seule à imposer cette règle aujourd’hui, reste impuissante à appréhender cette réalité. Le comble de l’hypocrisie est atteint quand, à la question des compagnes et compagnons des prêtres, s’ajoute celle de leurs enfants. Les réponses de l’institution, au cas par cas, sont au mieux inadaptées et souvent néfastes. Conséquences : les démissions et les initiatives dissidentes se multiplient, témoignant d’une rupture entre les clercs et une institution pourtant en perte de vocations…

Dans le sillage de la libération de la parole sur la pédocriminalité au sein de l’Église et des révélations concernant les abus sexuels sur les religieuses (Religieuses abusées : l’autre scandale de l’Église), ce documentaire met au jour un phénomène mondial, qui, s’il n’est pas directement synonyme de violence, n’en génère pas moins d’importantes souffrances. Les signaux d’alarme se multiplient. Deux ans après son élection, le pape François a déclaré que de nombreux clercs étaient victimes de la “maladie de ceux qui ont une double vie”, qualifiée dans le même élan de “schizophrénie existentielle”. Mais si le diagnostic est posé sur la maladie, le remède semble impossible à administrer. Pourquoi ? Théologiens, sociologues et psychologues religieux proposent leurs analyses, accompagnant les passionnants témoignages intimes, qui nourrissent ce film. Plus largement, l’enjeu concerne la réforme de l’Église, institution en crise que certains comparent à une monarchie absolue, entre déficit d’influence et crispation. »

Compagnes, compagnons et enfants de prêtres prennent la parole

Si le documentaire contribue à briser le tabou sur le célibat des prêtres que beaucoup jugent impossible à respecter pendant toute une vie, ils donnent aussi la parole à ceux qui sont trop longtemps rester dans l’ombre et dans le silence : les compagnes et compagnons de prêtre, forcé·es à cacher leur amour et à mentir afin de protéger celui qu’iels aiment. Marie-Laurence Brunet présente dans le documentaire, est présidente de l’association « Plein Jour », qui réunit des compagnes de prêtres, comme elle. Elle confie : « Les compagnes de prêtre, on aime quelqu’un, on a envie de le chanter sur tous les toits, mais non il faut se taire. Il faut tout garder pour soi, il faut que rien ne se voit, rien ne se sache et on vit comme suspendue à ce prêtre. On vit dans une solitude abyssale. » De ces unions, naissent des enfants qui eux aussi sont souvent contraints de vivre cachés ou dans le mensonge, comme Isabelle dont le père prêtre a continué d’exercer sa fonction toute sa vie, malgré sa paternité et ne l’a reconnu que dans son testament. D’autres apprennent des années après, comme Tomek, que leur père n’est pas celui qui les a élevé, mais bien le prêtre et ami de la famille qui passait souvent à la maison lorsqu’il était enfant. Tous.tes ont vu leur vie bouleversée par ce lourd secret et souhaitent aujourd’hui en parler publiquement afin de briser l’omerta qui règne encore sur le célibat des prêtres.

« Célibat des prêtres, calvaire de l’Eglise », à voir gratuitement sur Arte.tv jusqu’au 11 novembre.

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