ON A VU: le docu Netflix tant attendu sur les frères Menendez
Si vous avez binge-watché la deuxième saison de « Monstres » consacrée au crime des frères Menendez, vous attendiez probablement avec impatience le docu Netflix leur donnant la parole. On a visionné ce documentaire inédit qui retrace l’affaire grâce à des images d’archives et des témoignages des principaux acteurs des procès. Un film qui se hisse déjà dans le classement des plus vus de Netflix, 48h après sa sortie.
Dans la saison 2 de « Monstres », réalisée par Ryan Murphy, on découvrait ou redécouvrait l’affaire Menendez, survenue à Beverly Hills, en 1989. L’histoire de deux frères, Erik et Lyle, qui ont tué leurs parents, Kitty et José Menendez, à coups de fusil, au domicile familial. D’abord écartés de la liste des suspects, les deux frères avaient finalement été démasqués après l’aveu d’Erik à son psychiatre de l’époque, le Dr Oziel. Très vite, le mobile de l’argent a été avancé pour justifier cet acte affreux. José Menendez étant un riche homme d’affaires, ses fils auraient décidé de l’éliminer, lui et sa femme, pour empocher l’héritage. Pourtant, les deux frères auraient fini par toucher cet argent un jour ou l’autre, alors pourquoi tuer leurs propres parents ?
Durant les interrogatoires, Lyle et Erik ne cessent de louer les qualités de leurs parents, en particulier de leur père. José Menendez est, à leurs yeux, un modèle, un self-made-man qui a su se faire une place parmi les personnes les plus influentes d’Amérique. Seule ombre au tableau, le caractère extrêmement dur de cette figure paternelle éternellement insatisfaite. Les deux frères assurent que leur père était plus qu’exigeant, colérique et violent. Puis, comme le montre la série, tout à coup, des confessions sur des abus sexuels vont être faites à leurs avocates. Les deux jeunes hommes racontent l’horreur et indiquent avoir été violés par leur père dès l’âge de six ans. Des confessions qui seront considérées comme des mensonges pour justifier leur crime lors des procès. Et une décision de justice qui les amènera à passer le reste de leur vie en prison.
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Pourquoi faut-il regarder « Les Frères Menendez » après « Monstres » ?
Après avoir regardé la série, on ne sait plus vraiment que penser de l’affaire. Ces deux frères ont-ils inventé toutes ces horreurs pour tenter de réduire leur peine ? Ont-ils tenté de manipuler les jurys ? Ont-ils réellement subi ces horribles agressions et ces viols, ou est-ce un argumentaire longuement mis en place et répété entre eux ? Quid des déclarations de Lyle Menendez, qui, dans la série avoue à celle qu’il croit être sa petite amie lorsqu’il est en prison (Norma Novelli), qu’il a menti devant le tribunal et qu’il sait jouer la comédie pour s’en sortir comme il se doit? Se sentaient-ils vraiment en danger avec leurs parents? Quid des déclarations d’Erik, qui apparaissent sans aucune émotion dans la série ?
Qu’en est-il des déclarations de la famille, qui semblent peu claires? Qui sont ces jurés qui n’ont pas réussi à se mettre d’accord lors du premier procès? Pourquoi Lyle a-t-il choisi de ne pas prendre la parole lors du second procès? Voici toutes les interrogations qui flottent dans notre tête après avoir regardé « Monstres ». Le documentaire « Les Frères Menendez » vient justement répondre à nombre d’entre elles. On y écoute plusieurs experts psychiatres sollicités pendant le procès, mais aussi plusieurs membres de la famille, et surtout, les deux principaux concernés. Le documentaire nous décortique de façon chronologique toute l’affaire jusqu’à aujourd’hui.
On comprend finalement que Lyle et Erik ne se sont pas décidés subitement à parler des abus sexuels qu’ils ont subis et qu’ils avaient choisi de taire pendant plusieurs mois. Ces deux jeunes hommes, qui ont vécu une vie remplie de secrets tenus sous la menace de leur père, ont fini par parler suite à une lettre. Une lettre écrite par Lyle à Erik en prison, dans laquelle il enjoint son frère de ne surtout pas aborder ce sujet, que leur père serait fier d’eux s’ils continuaient de le garder pour eux. Une missive que Lyle concluait par « S’il te plaît, détruis cette lettre » afin de préserver encore et toujours la réputation de la famille.
Une lettre clé dans l’affaire
Bouleversé par la douleur de son frère retranscrite dans cette lettre, Erik s’est refusé à la détruire et lors d’une fouille de sa cellule, la police a trouvé cette lettre. À ce moment-là, les avocates des deux frères comprennent qu’un sombre secret se cache derrière cette famille parfaite. Une lettre complètement modifiée dans la série, puisque dans « Monstres », c’est un plan d’évasion que Lyle fait passer à Erik. Or, comme le précise le documentaire, les deux frères n’ont jamais tenté de s’évader de prison.
On entend aussi les témoignages saisissants de plusieurs membres de la famille qui décrivent la violence extrême de José Menendez, qui donne des coups de poings à son fils de cinq ans lors de repas de famille. Tandis que leur cousine Diane assure que Lyle lui a parlé des attouchements de José lorsqu’il avait huit ans. Elle a tenté ce jour-là d’en parler à Kitty, qui a ignoré les propos de Diane sur les abus que subissaient Lyle. Des abus qui vont cesser pour Lyle et continuer pendant douze ans pour Erik, jusqu’à cette terrible nuit. On comprend aussi que les propos de Lyle enregistrés par Norma Novelli sont bien plus nuancés, qu’aucune cassette n’a été retenue comme pièce à conviction dans le second procès et que Lyle a gardé le silence pour une tout autre raison.
La fin du tabou sur les hommes victimes de violences sexuelles
Dans ce documentaire, on entend aussi plusieurs anciens jurés du premier procès. Ceux qui n’ont pas réussi à trancher après des mois de délibération. On découvre que toutes les femmes ont voté pour « l’excès de légitime défense », qui désigne un acte que la personne commet par peur sincère pour sa vie, alors que celle-ci n’était pas en danger selon des preuves tangibles. Un verdict qui aurait mené les frères Menendez a une sentence de cinq à dix ans de prison. Tandis que les hommes jurés ont tous voté pour la thèse du meurtre.
Une des jurées affirme : « On assistait à une bataille des sexes, parce que ces hommes ne pouvaient pas imaginer que ces garçons avaient été victimes d’abus sexuels par leurs parents. » Le documentaire pose alors une question: le tort des Menendez était-il d’avoir existé avant MeToo ? Ces deux frères ont-ils eu la malchance de vivre dans une époque où les violences sexuelles étaient encore extrêmement peu abordées et exclusivement par des femmes? Lyle Menendez témoigne de son émotion lorsque, au début des années 2000, une émission d’Oprah Winfrey brise le tabou des abus sexuels des petits garçons en invitant des dizaines d’hommes à brandir une photo d’eux à l’âge où ils ont été abusés. Ému à la fin du documentaire, il affirme depuis sa prison à San Diego:
D’un côté, je comprends ce qu’il s’est passé, ce qu’on a dû endurer, et qu’il n’y avait pas forcément d’autre issue possible à ce week-end. J’ai l’impression d’avoir sauvé Erik. Mais est-ce le cas? Regardez sa vie maintenant. Certains jours, je me dis que c’est impossible. Je ne comprendrai jamais pourquoi je n’ai pas trouvé d’autre solution, ni pourquoi je n’ai pas pu tous nous sauver.
Le tabou a-t-il joué un rôle déterminant dans cette affaire? Bien sûr, un tel acte se devait d’être puni, comme le dit lui-même Erik Menendez. Mais la justice a-t-elle été biaisée par les mentalités de l’époque? Le documentaire nous fait réfléchir sur l’évolution de notre société et son impact sur le système judiciaire. De son côté, l’avocate d’Erik, Leslie Abramson, très présente dans la série « Monstres », n’a pas souhaité apparaître dans le documentaire. Elle a déclaré par mail à l’équipe de production :
Je préfère laisser le passé au passé. Seule la justice a le pouvoir de sauver nos clients. Et elle en a décidé autrement.
Actuellement, les frères Menendez attendent la décision du procureur suite à leur requête en Habeas corpus déposée en mai 2023. Celle-ci contient de nouvelles preuves comme une lettre écrite par Erik sur les abus subis de la part de son père à son cousin Andy, des mois avant la mort de Kitty et de José Menendez. Mais aussi des accusations de viol portées par Roy Rosselló, qui accuse José Menendez de l’avoir violé dans les années 1980.
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