Dis-moi ce que tu offres, je te dirai qui tu es: ce que vos cadeaux révèlent de vous

“Pour Noël, alors que nous étions ensemble depuis deux ans, mon copain m’a offert un panier garni d’huiles, de vinaigres et autres condiments en tout genre, soit un cadeau complètement impersonnel. Lorsque je l’ai reçu, j’ai fait au mieux pour cacher ma déception, mais l’expression de mon visage au moment du déballage m’avait trahie”, se souvient Sarah. “Ma cousine, qui me connait quand même, m’a offert un tee-shirt, mais je ne suis pas du tout vêtement... Dessus, il était écrit ‘attachiante’. Un cadeau qui ne me correspondait pas du tout”, raconte Olivia.

Combien de fois n’a-t-on pas été déçus par le cadeau d’un de nos proches? Combien de fois ne sommes-nous pas restés perplexes face à un présent? Les cadeaux se dessinent en réalité comme des messages inconscients que nous offrons à nos amis, notre famille, des connaissances. Cadeau empoisonné, cadeau symbolique, cadeau bateau, cadeau porteur d’un message... Le cadeau occupe une place importante de notre société. “Quelle que soit notre culture, le cadeau est un élément essentiel pour nourrir les liens des personnes entre elles. Qu’il s’agisse de fêtes religieuses, de naissances, de ce qui a trait à l’hospitalité et aux mariages, les us et coutumes ont de tout temps et partout instauré des règles très précises au sujet des cadeaux”, explique Sylvie Tenenbaum, psychothérapeute, dans son livre “Ce que disent nos cadeaux”.

Le piège du cadeau miroir

“En principe, nos cadeaux sont des témoignages d’amour. Le cadeau réussi est celui qui satisfait le besoin le plus intime de la personne qui le reçoit. Donner, c’est un don de soi mais sous des dehors généreux, nos cadeaux seraient, avant tout, des demandes d’amour”, confie Marylène Govin, psychologue clinicienne, à France 3. En effet, le cadeau n’est pas toujours désintéressé. “Offrir est avant tout un acte onaniste” explique Bénédicte Régimont, auteure spécialisée dans la psychologie de l’habitat, au Huffington Post. “On offre pour se faire un plaisir personnel. Inutile de vous emporter dans les commentaires, même si vous pensez à l’autre, il y a de vous dans les cadeaux que vous offrez. Le cadeau parle avant tout de soi. On offre ce que l’on aurait aimé recevoir, on offre ce que l’on n’a pas reçu dans notre enfance, on offre ce que l’on pense que l’autre aimera, on offre ce que l’autre aimera pour qu’il nous aime en retour”, détaille-t-elle. “Pour célébrer les 20 ans de mon chéri, je lui ai offert 20 cadeaux différents, tous en rapport avec des détails de son quotidien: un marque-page pour ses livres favoris, une boule de bain pour ses moments de relaxation ou encore un carnet personnalisé pour ses écrits”, explique Sarah. “Il s’agit d’un cadeau que j’aurais adoré recevoir, et j’étais si heureuse de pouvoir lui offrir. Je n’avais qu’une hâte: connaître sa réaction”, ajoute-t-elle. Le présent peut alors parfois prendre les traits du “cadeau miroir”. Pour Ondine Peyron, psychologue et thérapeute en analyse transactionnelle, ces personnes “ont généralement du mal à voir le monde différemment que de par leur prisme et à se mettre à la place de l’autre”.

Ces propos sont malgré tout à nuancer. En effet, par ce que l’on offre, on souhaite se rassurer et montrer ce que nous sommes prêts à faire pour l’autre. “Quand on prend du temps pour choisir le cadeau, que l’on tente de repérer ce qui va vraiment plaire à l’autre plutôt que de se contenter d’acheter à la va-vite un photophore, on entretient vraiment la relation et l’autre le reçoit avec plaisir. Le cadeau est alors une réussite” explique Sylvie Tenenbaum au Parisien. Selon Ondine Peyron, les personnes qui mettent du temps à trouver le cadeau parfait et qui parviennent à viser dans le mille sont d’ailleurs assez méticuleuses et vont sans cesse être à la recherche de la perfection. “Si le résultat n’est pas au rendez-vous et que vous ne jubilez pas face à ce ‘cadeau parfait’, elles peuvent mal le prendre et culpabiliser”, explique-t-elle à Femme Actuelle. Ondine Peyron met malgré tout en garde contre ces cadeaux où la personne qui offre cherche à prouver sa valeur. “Cela traduit une forme d’instabilité, de difficultés à créer un lien avec les autres ou un manque de confiance en soi. La personne essaye alors de prouver son intérêt par son cadeau”, précise-t-elle, tout en ajoutant qu’il reste malgré tout difficile d’établir les “profils types” des offreurs. C’est le cas, par exemple, de ces personnes qui ressentent le besoin de préciser combien le cadeau qu’ils offrent a coûté cher. “Ma mère était vraiment ce genre de personne”, se souvient Serge. “Dès qu’elle offrait quelque chose, elle ne pouvait s’empêcher de préciser son prix”.

Cette seule phrase a le pouvoir de gâcher le plaisir en faisant entrer la notion de sacrifice et de culpabilité.”

explique Bénédicte Régimont. “Si vous n’avez pas les moyens de faire un cadeau, ne le faites pas et si vous le faites, que cela soit avec cœur, même si vous mangez des pâtes jusqu’à la fin du mois”, conseille-t-elle.

Une signification pour chaque cadeau

De là, il est possible d’établir une potentielle signification pour chaque cadeau offert. Par exemple, offrir un gros cadeau peut marquer une grande générosité, mais également souligner une volonté de domination. “Quand on fait des cadeaux très chers ou que l’on noie l’autre sous une avalanche de présents, le message est souvent: “voyez comme je suis généreux! Cela peut mettre l’autre mal à l’aise, surtout si celui qui reçoit ne peut rendre le don à la même hauteur que celui reçu”, explique Sylvie Tenenbaum. Offrir un cadeau utile, en revanche, peut véhiculer un message désapprouvant l’apparence ou le talent de celui que le reçoit. “On est là dans une communication non verbale. Ces cadeaux sont souvent des actes manqués qui peuvent réussir, mais qui peuvent aussi faire très mal. Le lien que le don est censé entretenir peut s’en trouver affecté”, explique la spécialiste.

Certains cadeaux peuvent également être “empoisonnés”. “Cadeau message ou cadeau empoisonné, le présent peut révéler, au moins au plan de notre subconscient, notre envie de vengeance, de formuler des reproches, voire notre méchanceté”, explique Sylvie Tenenbaum. Au contraire, certains cadeaux cachent une grande sensibilité. Prenez l’exemple du bon d’achat. “Ce qui peut passer pour de l’indifférence peut correspondre à la peur de tomber à côté. Il y a dans ce don immatériel de la pudeur (celui qui offre ne dévoile pas ses goûts, son imagination) et du respect”, explique Marylène Govin. Certaines personnes vont jusqu’à offrir des petites choses, voire ne rien offrir du tout. “Cela cache souvent une grande fragilité narcissique. Ne pas être élevé dans l’idée qu’on peut faire plaisir peut engendrer un manque de confiance dans sa propre générosité. Plutôt que de donner de soi-même au risque de décevoir, on préfère offrir du conventionnel à petit prix ou s’abstenir”, ajoute la spécialiste.

La quête du cadeau idéal

“Lorsqu’on me demande ce que je souhaite recevoir, j’ai beaucoup de mal à dire que je voudrais, car en réalité je n’ai jamais réellement besoin de quelque chose à tout prix. Et si je le veux sincèrement, je préfère économiser pour”, avoue Olivia. “Si offrir s’apprend, recevoir aussi. Nous devons avoir la capacité d’accepter le message de l’autre à travers le cadeau”, explique Bénédicte Régimont. “Faire un cadeau est tellement simple quand on sait ce qui fera plaisir à l’autre s’il a eu la bonne idée de l’évoquer”, rajoute-t-elle. En effet, lorsqu’on ose dire ce qui nous ferait réellement plaisir, tout est finalement tellement plus simple. “Pour mes 18 ans, à l’aube de mes études universitaires, j’avais absolument besoin de m’acheter un ordinateur portable... Sauf qu’il coûtait plus de 1000€. J’ai donc demandé à ma famille de se cotiser pour m’en offrir un. Il s’agissait d’un gros cadeau, mais tout le monde savait à quel point il me tenait à coeur”, explique Sarah.



Mais le cadeau idéal existe-t-il vraiment? “Pour moi les meilleurs cadeaux sont les spontanés. Offrir un livre, un objet à la personne à qui il nous a fait penser ou parce qu’il évoque une conversation récente... C’est une jolie manière de prouver à l’autre qu’il est important pour nous, en dehors de toutes les convenances sociales”, confie Bénédicte Régimont. Des propos que confirme le Docteur Mickael Mangot, économiste et conférencier. “L’acte en lui-même doit être spontané, sans rien attendre en retour. Le plaisir d’offrir s’obtient lorsque ce paramètre est respecté. Par ailleurs, le sentiment de satisfaction est beaucoup plus palpable et durable lorsque l’on dépense pour les autres et non pour assouvir ses besoins personnels”.

La spontanéité semble dès lors être le mot d’ordre. À cela, ajoutez la créativité, l’imagination et la touche personnelle et le succès sera (presque?) garanti. “Pour les 25 ans de mon amoureuse, je lui ai organisé un jeu de piste dans notre ville. Je savais qu’elle aimait ce genre de jeu et je me suis donnée pour lui faire plaisir! C’était un cadeau ultra personnalisé et créatif à la fois”, explique Olivia. “Organiser une surprise, fabriquer l’emballage ou le cadeau, c’est honorer le bénéficiaire de sa créativité et de son temps. L’originalité du présent est une manière d’affirmer sa singularité”, conclut Marylène Govin.



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