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© Woman feminist holding nameplete; Shutterstock ID 628668485

C’est lourd: ces féministes qui jugent tout le temps les autres femmes

Kathleen Wuyard

Le féminisme, en théorie, c’est bien. C’est nécessaire, même, parce qu’on a beau être en 2017, on est encore loin d’atteindre l’égalité entre les sexes. Ce qui n’est pas nécessaire par contre? Rabaisser d’autres femmes au nom du féminisme. 

La pratique est pourtant de plus en plus répandue, dérives des réseaux sociaux oblige. Et la mannequin Emily Ratajkoswki en sait quelque chose. Bouche pulpeuse, regard de chat, courbes affolantes et jambes interminables, on la découvre en sex-symbol dans le clip de Blurred Lines, hymne misogyne qui a agité l’été 2013. Potiche, Emily? Que nenni. Féminine et féministe, la belle ne voit aucun problème à prendre des poses affriolantes sur son compte Instagram et à défendre en parallèle la cause des femmes. Un parti pris tout bonnement inconcevable pour certaines féministes, qui n’ont pas été tendres avec elle.

Twitter @ Emily Ratajkowski

Liberté de choisir


Extrait choisi, tiré d’un article paru sur The Independent, “Emily Ratajkowski se décrit comme une icône féministe, mais elle a choisi une carrière qui objectifie et déshumanise les femmes”. Voilà pour le politiquement correct, les autres qualificatifs ayant plutôt tendance à rimer avec “volute” ou “misanthrope”. Réponse de la top? “Notre société dit aux femmes qu’elles ne peuvent pas être à la fois sexy, sûres d’elles et engagées politiquement. Cela leur donnerait trop de pouvoir”. Et Emily d’ajouter, “peu importe à quel point nos corps sont sexy, en tant que femme, on a la liberté de choisir quand et comment nous exprimons notre sexualité”.

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Retour en arrière


Car c’est bien de liberté qu’il s’agit, et du pouvoir qui va avec. Dans les années 50, quand les premières femmes se sont montrées en bikini, elles ont eu des contraventions: pas question de montrer leur corps. En 2017, (mauvaise) surprise: plus d’amende pour exposition indécente, par contre, certaines féministes n’hésitent pas à mettre celles qui se montrent à l’amende. Parce qu’il faut cacher son corps pour défendre les droits des femmes? Alors que de tous temps, il a fallu se battre pour raccourcir les robes, les manches, et oublier les corsets, et que dans certains endroits du monde, la liberté de s’habiller à sa guise est toujours corsetée, certaines ont encore visiblement du mal à concilier féminisme et féminité.

Hors de contrôle


L’explication, selon Juliette Fretté, une blogueuse américaine engagée: depuis la nuit des temps, les hommes accordent une importance disproportionnée à la beauté des femmes, et cela contribue à les diviser. “Malgré toutes les avancées qui ont eu lieu dans la condition des femmes, notre apparence reste un indicateur de notre succès aux yeux de la société. De manière cynique, la beauté est une ressource, un moyen d’avancer dans la vie, d’avoir des opportunités. Il y a celles qui peuvent jouer de cette ressource, et les autres, et cela contribue à de la rancoeur et de la jalousie”. Pour la psychologue Pat Franklin, le phénomène est amplifié par les réseaux sociaux. “Les femmes ont toujours eu tendance à ragoter en privé, mais l’arrivée des réseaux sociaux a mis le feu aux poudres. Avant, on se serait contentées de faire une remarque à une amie, mais aujourd’hui, c’est hors de contrôle, et les réseaux donnent la possibilité d’agir sur des pulsions et de diffuser des critiques immédiatement”.

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Autant de féminismes que de femmes


Jane Austen aurait-elle donc eu raison quand elle écrivait que les féministes peuvent-être odieuses envers les autres femmes? Pas de généralisation, tout serait plutôt une histoire de personnalités. Comme le souligne la journaliste féministe Jill Filipovic, “le féminisme n’est pas simplement une idéologie générale visant à rendre le monde meilleur, c’est une idéologie spécifique de libération des acteurs du mouvement. C’est très personnel, par définition. Ce qui veut donc dire que quand certaines ont l’impression que d’autres pratiquent le féminisme de la mauvaise manière, c’est directement perçu comme des attaques personnelles”. La solution selon elle: “dans un monde idéal, il pourrait y avoir autant de féminismes qu’il y a de femmes, avec des mouvements adaptés aux besoins de chacune. Le “féminisme” devrait être un label extrêmement inclusif: tant qu’une personne oeuvre à promouvoir l’égalité des sexes, elle en fait partie”. Même si la personne en question aime poser en bikini.

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