““L’homophobie bienveillante””, la discrimination dont vous êtes probablement coupable
L’homophobie bienveillante? Ce sont ces propos qu’on dit sans penser à mal mais qui ne sont pas moins discriminants pour autant.
Comme vous, quand vous piaillez d’un ton aigu que vous adorez votre BFF homo parce qu’il n’y a rien à faire “eux, ils ont vraiment le sens de la fête”, ou que votre Tati Michèle dit que son collègue de bureau, lui, est vraiment charmant, “d’ailleurs, ce n’est pas une folle, si on ne le sait pas c’est impossible de dire qu’il est gay”. Autrement dit, si l’intention n’est, a priori, pas méchante, mais le résultat, lui, l’est, entre discrimination déguisée et perpétuation de clichés éculés.
Un phénomène expliqué à merveille par GreyA en commentaire d’un article de Madmoizelle dédié à la Journée mondiale de lutte contre l’homophobie : “C’est le genre de commentaires qu’on accepte sans broncher parce qu’on considère que notre entourage pense juste à nous, mais c’est clairement homophobe au final”.
Dans son cas, ces remarques ont fait écho à son coming out à l’adolescence: “on m’a dit de faire attention à ne pas ressembler à une lesbienne, de ne pas trop laisser mes copines me tenir la main ou m’enlacer pour ne pas passer pour une lesbienne,... Bref, ça partait de l’idée que ‘faut pas faire fuir les garçons'”. Alex Batel, étudiante en droit et fille d’un papa qui “aime les hommes” a quant à elle confié à “Libération” que “de la maternelle à l’université, ces petites phrases m’ont heurtée, parfois même alors qu’elles se voulaient bienveillantes”.
Ainsi, aux camarades «gay friendly» nous rassurant par un «ça ne se voit pas du tout chez ton père» ou s’exclamant «ça doit être trop coooool !» on est tenté de répondre : «Non, papa ne sort pas les frous-frous et les bas résille en rentrant du travail».
Pas plus que toutes les femmes blanches de plus de 45 ans ne sont des Karen, ou que sommeille forcément en chaque homme hétéro et cisgenre un fan de foot. Dingue, on sait, mais les personnes homosexuelles ne se limitent pas non plus à des clichés, aussi bienveillants se veulent-ils, en mode “moi j’adore les gays”.
Malheureusement, il n’y a pas que dans les remarques que cette homophobie peut prendre forme, l’homophobie bienveillante étant aussi marquée par une attitude de prudence outrancière, notamment dans les médias. Ainsi que l’expliquait le spécialiste du FN Octave Nitkowski à “Slate” en 2014 déjà, “Lorsqu’il est question d’hétérosexualité, chacun fait la différence entre l’orientation sexuelle et la vie intime. Mais dès lors qu’il s’agit d’homosexualité, tout le monde s’indigne excessivement, ne parvenant pas à faire la différence entre orientation sexuelle, qui peut être publique, et vie intime, qui relève alors de la vie privée”.
Autrement dit : on traite l’homosexualité comme une information hypersensible, alors même qu’en Belgique, par exemple, l’homosexualité n’encourt plus de sanctions depuis la révolution française et le Code Napoléon, soit 1795, et qu’elle n’est plus pénalisée depuis 1972. Et pourtant, l’homophobie, elle, refuse de disparaître.
Changer de regard – et de propos
La solution pour vous assurer de ne pas empirer le problème en vous rendant coupable d’homophobie bienveillante? Transposer l’homosexualité par l’hétérosexualité dans vos propos, et vous demander si vous le diriez quand même. Sachant qu’il y a peu de chances que vous décriviez un ami d’ami en disant “mais si, tu sais bien, l’hétéro là, d’ailleurs je me demande s’il préfère être au-dessus ou en dessous quand lui et sa meuf font l’amour”, ou bien que vous affirmiez adorer votre BFF parce que “même si elle est hétéro, c’est génial, elle n’adore pas le rose et les films à la guimauve”.
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