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© Closeup of a ragged Jewish badge in the hands of a man

Un survivant de l’Holocauste met en garde contre la banalisation de l’extrême-droite

Kathleen Wuyard

Ce 26 mai, une déferlante d’extrême-droite a englouti le nord de la Belgique, et une bonne partie de l’Europe. Dans la foulée, ce raz-de-marée a encore un peu plus décomplexé les discours de haine. Une tendance contre laquelle un survivant de l’Holocauste tire la sonnette d’alarme.


Il s’appelle Stephen B. Jacobs, et il a survécu aux horreurs de l’Holocauste et du camp de Buchenwald avant de s’installer en Amérique pour y construire une nouvelle vie. Devenu architecte à New-York, il a regardé, impuissant, le virage pris par son pays d’accueil vers la bigoterie et l’intolérance. Impuissant, peut-être, mais certainement pas résigné: alerté par la tournure que prennent les événements depuis l’élection de Donald Trump, Stephen B. Jacobs tire la sonnette d’alarme.

L’Amérique d’aujourd’hui ressemble au Berlin de 1929. La situation empire chaque jour, et des choses qui n’auraient jamais pu être prononcées en public il y a cinq ans, quatre ans, trois ans, sont aujourd’hui tout à fait acceptées. Sauf que c’est totalement inacceptable.


Holocauste - Instagram @emergen.c.kitchen

Et Stephen B. Jacobs d’ajouter que c’est “la conciliation des discours fascistes qui a mené à la montée des Nazis et à l’Holocauste”. Une mise en garde glaçante, qui résonne également en Belgique. Car si le pays n’a pas (encore) d’équivalent de Donald Trump, le discours y a aussi bien changé ces dernières années.

La liberté d’expression a ses limites


Au fur et à mesure que le cordon sanitaire s’est relâché, les langues se sont déliées, et on assiste désormais à une parole totalement décomplexée, qu’il s’agisse de remarques homophobes, sexistes, racistes, anti-sémites ou encore de quidams faisant l’apologie de l’extrême-droite. Le lendemain des élections belges, les réseaux sociaux étaient plus agités que jamais, avec un courant dénonçant cette vague brune, et un autre, en face, sautant sur ces résultats électoraux pour déverser tout haut ce qu’ils pensaient tout bas. Oui, mais bon, on habite une démocratie, les gens ont bien le droit à leur liberté d’expression, non? Oui, mais celle-ci a ses limites, ainsi que le rappelle le Centre interfédéral pour l’égalité des chances. Les limites en question?

  • L’incitation à la haine, à la discrimination, à la violence ou à la ségrégation à l’égard d’autrui
  • La diffusion d’idées fondées sur la supériorité raciale ou la haine raciale
  • L’appartenance ou la collaboration à un groupement qui, de manière répétée, prône la ségrégation ou la discrimination
  • Le négationnisme
  • Les injures écrites


Autant de transgressions qui ne sont pas seulement inacceptables, mais bien aussi punissables: franchir les limites de la liberté d’expression revient en effet à commettre un délit, dont l’auteur peut être condamné par un juge. Si vous en êtes victime ou témoin, vous pouvez le dénoncer ici. Ainsi que le rappelait le philosophe Ruwen Ogien dans une carte blanche pour Libération, “il faut comprendre la liberté d’expression non pas comme le droit d’affirmer publiquement ses propres opinions, de vanter ses idées, mais comme le devoir de respecter celles des autres”.

La «guerre au politiquement correct» menée par la droite prend désormais le nom apparemment plus glorieux de «libération de la parole» (...) Des mots qui signifient qu’il est malheureusement redevenu possible d’affirmer de façon «décomplexée» des choses aussi fausses ou révoltantes que «les chômeurs sont des paresseux», «les races existent et elles ne sont pas égales du point de vue de leur “degré de civilisation”» ;  «les homosexuels, les transsexuels, les transgenres et autres queers sont des malades mentaux à soigner d’urgence».


Un discours liberticide, et dangereux, qu’il faut combattre sans relâche, afin que les horreurs vécues par Stephen B. Jacobs et les autres victimes du fascisme ne puissent plus jamais se reproduire.

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