En 26 ans de vie, c’est la première fois que je reste, ou plutôt devrais-je dire que je suis partie en vacances, en Belgique. Une différence de termes non sans importance. Il n’a, en effet, pas été question de rester à Bruxelles mais bien de poser 5 jours de congé, de faire mes valises et de prendre la route direction les Hautes Fagnes.
Pour encore mieux coller à la réalité, je devrais dire « en 26 ans de vie, c’est la première fois que j’étais en staycation en Belgique ». Ce néologisme est né en 2008 aux Etats-Unis au moment de la crise financière – une époque où de nombreux Américains n’avaient plus suffisamment de budget à allouer aux vacances et n’ont eu d’autres choix que de visiter leur propre pays (un pays que nous, Européens, rêvons de visiter chaque année lors de nos vacances…).
Contraction de stay (rester) et vacation (vacances), le terme désigne l’art de s’évader sans faire des kilomètres. En d’autres termes, il désigne le fait d’être un touriste dans son propre pays. Depuis l’apparition de ce mot, le staycation est devenu une véritable tendance voyage adoptée délibérément ou par nécessité. Valeur écologique, choix économique, simple envie de rester chez soi… les raisons du staycation sont nombreuses. Cette année, c’est évidemment la crise sanitaire que nous vivons qui remet la tendance sous les projecteurs. Ce mois de juillet 2020, j’ai donc pour la première fois en 26 ans de vie expérimenté le staycation.
Staycation = vacances = voyages ?
Quelques jours avant mon départ, je tique sur un des messages que j’envoie. À quelqu’un qui me demande où je pars en vacances, je réponds « en fait, je ne pars pas vraiment en vacances. Je pars quelques jours en Belgique dans les Hautes Fagnes ». Quelques minutes plus tard, me voilà à me justifier à nouveau « je ne considère pas vraiment ça comme mes vacances en fait ».
Pourtant à réfléchir, c’était bien le cas ! Si je reprends les dires de la psychologue Catherine De Geynst, les vacances, c’est d’abord ne pas travailler et ensuite pouvoir se changer les idées, se défaire de sa routine métro-boulot-dodo et se sentir dépaysé. C’est donc exactement ce que je m’apprêtais à faire en partant une semaine dans les Hautes Fagnes. Enfin, c’est ce que je m’apprêtais à essayer de faire du moins…
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Les vacances, les voyages et moi
C’est une grande histoire ! J’ai été, ce que l’on pourrait dire, biberonnée aux voyages. Dès ma naissance, mes parents – baroudeurs dans l’âme – nous ont (mon frère et moi) emmené découvrir le monde. D’abord, la France (du Nord au Sud, d’Est en Ouest), ensuite, une fois l’âge de l’autonomie atteint, des contrées plus lointaines accessibles pour beaucoup en avion. Très peu de voyages organisés, très peu de all-inclusive, très peu de séjours 100% farniente au bord de la piscine. Les vacances dans ma famille, c’était plutôt mon père au volant de sa voiture de location peu importe que l’on soit en Thaïlande ou en Islande et ma mère à côté le guide du Routard en main. De fil en aiguille, je suis devenue une accro aux voyages. Tout le monde met ses économies quelque part, moi, c’est dans les voyages.
Dans ma conception des choses, vacances veut donc surtout dire voyages. Dans le sens où lorsque je prends congé, j’abandonne quelques semaines mon train-train quotidien non pas pour me reposer mais plutôt pour vivre une aventure. Notez le paradoxe: vacances vient de vacant, du latin vacans et signifie “être libre inoccupé, vacant/ être inoccupé, oisif”.
Passer mes vacances et donc entamer un voyage en Belgique était pour le moins nouveau et insolite. À ceci s’ajoute le fait que j’ai une forte attirance pour les pays montagneux, dotés d’immensités et de vues très très très larges. Pour faire simple, en avril 2020, je devais m’envoler découvrir l’ouest canadien. Juillet 2020, me voilà prendre la route d’Ovifat dans les Hautes Fagnes.
Un staycation en Belgique : verdict ?
Entre le Canada et Ovifat, il y a une nette différence : distance kilométrique me séparant de ma destination (plus de 6000 km pour le premier et 128 km pour le deuxième), langue parlée dans le pays, paysages, superficie à découvrir mais aussi représentations que ma destination évoquent pour moi et pour les autres. Les Hautes Fagnes, ça en jette moins, c’est moins exotique, c’est moins dépaysant que le Canada…
Après coup, envisageant ce séjour comme mes véritables vacances, j’ai organisé mon voyage comme je l’aurais fait pour n’importe quel autre. Pour moi, les vacances, ce n’est pas (ou pas souvent) rester les pieds en éventail autour de la piscine surtout qu’avec la météo belge, ce n’est pas comme-ci ça allait être une option. Instagram et Google m’ont permis de repérer plusieurs spots que je voulais absolument voir. Je me suis retrouvée avec un petit programme flexible pour ma semaine dans les Hautes Fagnes. Ce dernier comportait des randonnées à pied, des balades à vélo, la visite de plusieurs hotspots… Un planning bien chargé!
Je voulais aussi ponctuer ces vacances « d’expériences », c’est-à-dire faire des choses que je ne fais pas d’habitude. Je pense que ce besoin était lié au fait qu’en temps normal, je pars très régulièrement le week-end en excursion en Belgique. J’avais donc besoin de ces petites choses qui me feraient dire « ah, ça, c’est les vacances ! ». Cela ne tient parfois pas à grand-chose. Pour moi, c’était, par exemple, aller prendre l’apéro dans un chouette lieu, me lever aux aurores pour débuter une randonnée, programmer une excursion en fin de journée, ressortir après le repas pour aller admirer le coucher du soleil…
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Ce que j’en retire
Je suis partagée entre deux états. J’ai adoré mon staycation en Belgique et je pense que d’un point de vue santé mentale, il a été plus que bénéfique. Mais en même temps, je me réjouis de reprendre l’avion pour en prendre plein la vue lors d’une prochaine aventure. Quand on dit qu’il ne faut pas partir loin pour être dépaysé, c’est vrai. Durant ces 5 jours dans les Hautes Fagnes, j’ai découvert des paysages superbes, je me suis dit plusieurs fois « waouh, c’est magnifique » et j’en ai pris plein la vue. Mais, encore un mais, j’ai ressenti un petit manque de « sensationnel ». En voyage, j’aime me sentir toute petite face à la grandeur de la nature. Et aussi beaux soient les paysages belges, il leur manque ce côté “immensité” (à mes yeux).
Psychologiquement, le fait de ne pas passer de frontière m’a perturbée. Inconsciemment, c’est comme-ci passer une frontière me faisait dire « voilà, je suis en vacances ». En restant dans mon propre pays, j’ai aussi eu plus de mal à me déconnecter de mon boulot et de mes relations. D’habitude, quand je voyage, je n’ai pas le temps de réagir sans arrêt dans mes conversations Whatsapp, de regarder avec attention mes notifications Facebook ou encore de checker mes mails. Choses que j’ai faites ici. Je me donne l’excuse que je pouvais être en 4G constamment mais ce n’est qu’une excuse… Au final, je le voulais bien. Il ne tenait qu’à moi de me déconnecter et d’arrêter de scroller.
Instaurer un climat de vacances est par contre quelque chose que l’on peut mettre en place peu importe où l’on se trouve. Cela dépend évidemment de l’histoire de chacun mais on peut tous retrouver ces petites choses qui nous font dire « ah, ça c’est les vacances ». Que l’on soit en Belgique ou à l’autre bout du monde, il ne revient qu’à nous de les mettre en place. Selon mon expérience, c’est véritablement le point le plus essentiel ! Il ne suffit parfois que d’un détail pour transformer un moment banal en un moment « vacances ».
Pour certains, la météo belge pourrait être difficile à vivre. Sachant que je suis partie en Norvège l’année passée, c’est un élément qui ne joue pas forcément sur mon moral. Mais soyons honnêtes, si j’avais eu 5 jours de pluie, mon avis aurait certainement été différent.
Ces vacances en Belgique m’ont également permis d’être pour la première fois dans l’introspection « comment ai-je vécu ce séjour ? », d’expérimenter quelque chose que je n’avais jamais fait, de sortir de ma zone de confort, « j’ai réinventé ce qui pour moi voulait dire vacances », de prendre conscience qu’il y a du bon à ne pas avoir un planning over-chargé, que vivre et profiter du moment présent est un apprentissage, que d’accepter de ne rien faire, c’est cool aussi !
Nos vacances et voyages dépendent aussi du moment où l’on se situe dans notre vie. À ce moment-là de ma vie, et vu la situation liée au Covid-19, des vacances en Belgique me semblaient être idéales. Serais-je dans le même état d’esprit dans 6 mois, dans un an ? Il est difficile de le prédire. Ma soif d’aventures et de découvertes va-t-elle se décupler ? Ma conscience écologique va-t-elle me faire réévaluer ma façon de voyager ? La crise du Coronavirus va-t-elle pour toujours changer notre vision des vacances ? Une chose est certaine, je ne compte pas m’arrêter de m’émerveiller que ce soit en Belgique ou à l’autre bout du monde et pour ma part, c’est finalement ce que je recherche au plus haut point lorsque je boucle mes valises !
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