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Intestins
© Getty Images

Pourquoi les intestins sont notre ““deuxième cerveau”” et comment en prendre soin

Justine Rossius
Justine Rossius Journaliste

Ce n’est pas pour rien qu’on surnomme les intestins comme notre « deuxième cerveau ». En effet, cet organe très sous-estimé a un impact considérable sur notre état de santé. Et pas seulement aux toilettes. C’est ce qu’a découvert notre journaliste Elien en plongeant son nez dans les livres.

Elien, journaliste « Journaliste en charge de la rubrique My Body & Me, je rencontre chaque semaine une lectrice pour parler de son corps. Ce qui me frappe souvent, c’est que notre ventre – à l’extérieur comme à l’intérieur – est de loin la partie du corps la moins appréciée. La fameuse ‘sensation de ballonnement’ (et le ventre gonflé qui l’accompagne) est également souvent détestée. Mais le fait qu’il se passe tant de choses dans notre ventre chaque jour, qu’il bouge, grogne, gronde, gonfle, s’affaisse, se plie et ainsi de suite, est précisément ce qui rend notre ventre si spécial. Parce qu’en plus de digérer les aliments, votre digestion fait beaucoup plus pour votre santé physique et mentale. C’est ce que j’ai appris après une discussion avec un gastro-entérologue et une plongée dans les lectures. C’est comme ça que j’ai découvert le charme de nos intestins et que je peux vous expliquer pourquoi il est si important de prendre soin de vos intestins et de suivre davantage votre intuition. »

Lectures

  • Giulia Sanders, Le Charme discret de l’intestin (22,90 €, Éd.Actes Sud).
  • Dr. Stefano Manera, Cerveau – Intestin. Un lien indéfectible  (24,95 €, Éd.Macro).
  • Francisca Joly Gomez, L’intestin, notre deuxième cerveau (9,20 €, Éd.Marabout).
  • Dr. Kahina Oussedik et Dr. Karim Ferhi, La Magie de la digestion (7,75 €, Éd.Le Livre de Poche).
  • Audrey Lienard et Audrey Ho Van Cam, Vivre en paix avec ses intestins! (16,95 €, Éd.Larousse).

Abécédaire digestif

Lorsque vous mangez, vos aliments pénètrent dans votre estomac par l’œsophage. Là, ils sont recouverts d’une sorte de ‘sauce’ acide: l’acide gastrique. Cet acide facilite la digestion des protéines contenues dans les aliments. Les aliments sont ensuite acheminés vers les intestins.

Ces intestins font plusieurs mètres. Pour simplifier, nous nous concentrons généralement sur l’intestin grêle (qui mesure environ 4 à 6 mètres de long!) et le côlon (un peu moins d’un mètre de long). La digestion se fait principalement dans l’intestin grêle. C’est là que les aliments sont décomposés en très petites particules afin d’être absorbés dans le sang. Dans le gros intestin, l’eau est encore extraite de la nourriture digérée et celle-ci est transformée en selles. Lorsque ces selles atteignent le rectum, la dernière partie de l’intestin, elles sont étirées et vous ressentez le besoin d’aller aux toilettes.

Un organe intelligent

En moyenne, le processus de digestion de votre petit-déjeuner, de votre déjeuner ou de votre dîner dure 2 à 3 jours. Par conséquent, si vous ressentez le besoin d’aller aux toilettes immédiatement après avoir mangé, ce n’est pas le repas que vous venez de manger qui veut sortir. Ce sont les aliments qui provoquent la contraction de vos intestins, poussant les selles déjà présentes dans votre côlon plus loin dans votre rectum.

De plus, vos intestins et le reste de votre système digestif font tout cela de manière totalement indépendante. Votre système digestif est un organe autorégulé qui possède son propre système nerveux, riche en cellules nerveuses (environ 500 millions!). C’est exactement la raison pour laquelle vos intestins sont parfois surnommés ‘votre deuxième cerveau’. En d’autres termes, votre intestin n’a pas besoin de votre cerveau pour faire son travail, mais il est tout de même connecté à lui. Et cela a un impact sur le reste de votre corps et même sur votre mental.

Une envie pressante

Le fait que votre intestin et votre cerveau soient connectés et puissent communiquer l’un avec l’autre impacte considérablement la façon dont votre système réagit. Ainsi, il y a longtemps, cette connexion entre les intestins et le cerveau de nos ancêtres a été complètement coupée durant des situations de stress. Car si vous devez fuir d’urgence un mammouth, vous n’avez évidemment pas le temps d’aller à la selle. En outre, cela permet à votre corps de laisser circuler plus de sang vers d’autres organes, comme votre cœur et vos muscles, afin qu’ils puissent temporairement fournir plus d’effort.

Pourtant, de nombreuses personnes ont aujourd’hui besoin d’aller aux toilettes plus rapidement ou plus souvent quand elles sont stressées. Cela s’explique par le fait que, dans notre monde moderne, le stress prend souvent une forme différente.

Aujourd’hui, au lieu d’être menacés par des événements très graves, nous sommes constamment soumis à de petites quantités de stress dans notre corps. Nous sommes soumis à ce stress chronique pendant de longues périodes, ce qui peut également amener le cerveau à perturber notre intestin de manière chronique et prolongée.

Une machine à hormones

Le stress peut avoir un impact sur le fonctionnement de votre intestin, mais cela vaut aussi dans l’autre sens: votre intestin a également un impact sur votre mental, sur votre humeur. En effet, plus de 90 % de la sérotonine présente dans l’organisme est produite dans l’intestin. La sérotonine est une hormone du cerveau qui – entre autres facteurs, bien sûr – influe la façon dont vous vous sentez, si vous êtes heureuse ou déprimée. Dans l’intestin, cette hormone propulse les aliments et fait bouger l’intestin, mais elle a aussi un effet sur le cerveau, car ils sont reliés et s’influencent l’un l’autre. En d’autres termes, plus votre intestin est sain, meilleure est votre humeur.

Par ailleurs, au moins 20 hormones sont produites dans les intestins. Elles sont principalement responsables de la régulation de la consommation de nourriture. C’est le cas par exemple de la leptine, qui régule la sensation de satiété. Si l’obésité est bien sûr liée à de nombreux facteurs, elle peut aussi être innée ou causée en partie par un dérèglement de l’intestin et de sa fonction hormonale.

Merveilleuses bactéries

Le système immunitaire humain peut être comparé à une armée chargée de protéger l’organisme. Dans l’intestin, on trouve beaucoup de corps étrangers, comme la nourriture, mais aussi des milliards de bactéries. De même qu’une armée ne peut pas faire la guerre à tout le monde, notre système immunitaire ne peut pas commencer à attaquer tout ce qu’il ne reconnaît pas immédiatement comme appartenant à notre corps. Après tout, cela causerait beaucoup de dégâts dans l’organisme. Le système immunitaire doit apprendre ce qui est dangereux et ce qui ne l’est pas.

En tant que fœtus, vous avez un système immunitaire qui n’a que très peu de connaissances en la matière. Dès que vous venez au monde, votre système immunitaire entre en contact avec les premières bactéries étrangères (celle de la maman). (En cas de césarienne, ce contact n’a pas lieu, ce qui a probablement un impact sur la flore intestinale ultérieure).

L’allaitement, le choix des aliments, la prise d’antibiotiques pendant l’enfance... ont également un effet. En résumé, plus il y a de bactéries dans l’organisme dès l’enfance, mieux le système immunitaire peut s’armer, car il peut ainsi s’y habituer.

C’est pourquoi les experts recommandent de ne pas élever son enfant avec des mesures d’hygiène trop strictes et de le laisser mettre toutes sortes de choses dans sa bouche. Le fait que nos vies soient trop hygiéniques aujourd’hui a un impact sur notre santé. Par exemple, de nombreuses maladies actuelles sont dues à ce mode de vie trop propre, comme les maladies auto-immunes telles que l’asthme et le rhume des foins, où le système immunitaire réagit à notre propre corps et l’endommage. C’est ainsi que notre corps devient allergique à des substances dont on ne lui a jamais dit qu’elles étaient inoffensives.

Cher microbiome

Si vous pouviez mettre toutes les bactéries de votre corps sur une balance, elles pèseraient environ un kilo et demi. En effet, chaque gramme de selles contient des centaines de millions de bactéries. L’ensemble de ces différentes bactéries constitue le microbiome. Ce microbiome est aussi spécifique à votre personne que vos empreintes digitales et est déterminé par toutes sortes de choses. Mais il ne se limite pas à ce que vous avez reçu dans l’enfance. Aujourd’hui encore, vous pouvez influencer la présence de bactéries dans votre corps. Vous pouvez le faire en faisant plus attention à ce que vous mangez ou ne mangez pas et en prenant soin de votre santé générale, mais aussi en consommant des probiotiques ou même en effectuant des transplantations fécales, entre autres. Pour certains problèmes en particulier, les spécialistes transplantent les selles d’autres personnes, car les bons probiotiques contenus dans ces selles peuvent alors chasser les mauvaises bactéries d’un système intestinal en mauvaise santé. Des études sont actuellement en cours pour déterminer si une telle transplantation peut également avoir des effets positifs sur les intestins spasmodiques ou sensibles, par exemple.

Coup de vent

De nombreuses personnes sont encore gênées par les pets et les flatulences, mais il est tout à fait normal de péter. Vous ne pouvez même pas l’éviter. La production d’air dans les intestins est un phénomène tout à fait naturel. En effet, des gaz sont libérés lorsque les bactéries présentes dans les intestins commencent à transformer les aliments. Le type de gaz et leur odeur peuvent varier en fonction des bactéries présentes dans votre microbiome et de ce que vous mangez, mais des gaz sont tout de même produits. Bien qu’ils soient très importants pour votre santé, les légumes, par exemple, rendent vos pets plus odorants. Le fait que vos pets sentent plus fort ne signifie donc en aucun cas que vos intestins sont moins sains.

Aïe aïe aïe

L’intérieur de l’intestin est dépourvu de nerfs, ce qui a pour conséquence vous ne pouvez pas réellement ressentir de douleur, ni sentir vos selles passer. La douleur abdominale, en revanche, est une sensation que vous ressentez lorsque vos intestins commencent à se contracter. Dans ce cas, la membrane qui entoure les intestins est étirée, ce qui provoque des douleurs et des spasmes. Ces spasmes peuvent être le résultat d’un simple effort de l’intestin pour évacuer les selles, mais ils peuvent aussi être influencés par divers facteurs externes, tels que le stress, les mauvaises bactéries ou le type d’aliments que vous consommez.

Intolérance vs allergie

L’une des intolérances alimentaires les plus courantes est le lactose. Il s’agit d’un sucre du lait qui est divisé en 2 parties dans l’organisme par une enzyme. Tous les mammifères possèdent cette enzyme à la naissance, mais elle disparaît normalement avec l’âge, car ils cessent également d’avoir besoin de lait et d’en boire. Ce n’est que chez les humains occidentaux que l’enzyme subsiste à l’âge adulte, car nous continuons à boire du lait. Néanmoins, environ 5 à 10 % des Occidentaux ne conservent pas cette enzyme et ne peuvent donc pas assimiler correctement le lactose.

Il ne faut cependant pas confondre intolérance au lactose et allergie. Une intolérance peut provoquer des gaz et des crampes d’estomac tandis qu’une allergie (à la protéine du lait de vache) provoque une réaction du système immunitaire qui vous rend vraiment malade.

À l’écoute

Pour faire court: vos intestins sont hyper-importants, au sens propre comme au sens figuré. En écoutant vos intestins, vous pouvez apprendre bien d’autres choses dans votre corps que vos pets et cette sensation de gonflement. Ainsi, le fait de prendre davantage soin de soi et de s’aimer soi-même signifie également que vous devrez prendre davantage soin de votre intestin et tout ce qu’il contient. Votre système digestif est un élément clé du fonctionnement de votre corps et n’est pas surnommé ‘votre deuxième cerveau’ pour rien. Plus ce deuxième cerveau est heureux, mieux votre vrai cerveau se portera et mieux vous serez bien dans votre peau.

7 façons de prendre soin de vos intestins

Mangez varié

Cela paraît si simple, et pourtant nous ne le faisons pas toujours. Veillez à une alimentation variée en mettant chaque jour au menu des légumes, des fruits, des protéines (viande, poisson, volaille, légumineuses, noix, graines...) et des glucides (pâtes complètes, pain complet, riz complet...) et en évitant les repas monotones. Vous avez du mal à vous éloigner de vos recettes habituelles? Découpez chaque semaine les pages culinaires de votre Flair et accrochez-les à votre frigo ou rassemblez-les dans un classeur. Vous aurez ainsi une nouvelle inspiration chaque semaine.

Évitez les produits ultra transformés et riches en sucre

Les aliments hautement transformés et riches en sucre, comme les biscuits, les sucreries et la charcuterie, ne sont pas bons pour votre système digestif et votre microbiome. Ils constituent un terrain de jeu pour les mauvaises bactéries, leur permettant de s’installer plus facilement dans votre intestin et de ruiner le travail de vos probiotiques.

Mangez des aliments riches en probiotiques

Les probiotiques se trouvent sous forme de comprimés en pharmacie, mais vous pouvez également ajouter une dose supplémentaire de probiotiques à votre alimentation quotidienne en consommant les bons aliments. Pensez aux yaourts fermentés, au kéfir, à la choucroute, au tempeh, au kimchi, au miso et aux cornichons.

Mangez en conscience

Avec nos vies à 100 à l’heure, nous ne prenons pas toujours le temps de manger calmement. C’est pourtant très important pour les intestins. En mangeant plus lentement et en mâchant correctement, non seulement vos sens sont plus stimulés et vous appréciez davantage le repas frais et varié que vous avez préparé, mais vous aidez également votre digestion à aller plus loin. Plus vous mâchez, moins votre estomac doit digérer vos aliments. Ainsi, vous avez instantanément une bouchée d’avance.

Buvez suffisamment d’eau

Il n’y a pas que vos intestins qui ont besoin d’être suffisamment hydratés, mais tous vos organes. Buvez entre un litre et demi et 2 litres d’eau par jour. Cette eau peut être pure, mais vous pouvez aussi opter pour du thé, du thé glacé maison, du café noir (en quantité limitée) ou de l’eau aromatisée avec des fruits ou des herbes.

Bougez plus

Outre une alimentation saine et variée, l’exercice physique est également essentiel à la bonne santé de votre deuxième cerveau. Le sport favorise l’irrigation sanguine des intestins. Il stimule les mouvements contractiles des intestins qui sont nécessaires au bon fonctionnement de l’ensemble du système digestif. Cela améliore l’absorption des nutriments et l’élimination des déchets. L’OMS indique qu’en tant qu’adulte, vous devriez faire au moins 2,5 heures d’exercice d’intensité modérée par semaine, idéalement réparties sur plusieurs jours. Pensez à la marche, au vélo, au yoga, à une séance d’entraînement légère... Il est bien sûr possible d’en faire plus.

Offrez la paix à vos intestins

Enfin, le repos et la détente constituent le troisième élément essentiel d’une bonne digestion. Il est préférable d’accorder ce repos à votre ventre de plusieurs façons. Tout d’abord, ne restez pas assis·e à grignoter en permanence. Après avoir mangé, donnez à votre système digestif le temps de faire son travail au lieu de continuer sans cesse à manger de nouveaux en-cas.

 

La relaxation est également essentielle. Moins vous êtes stressé·e et plus vous êtes détendu·e, mieux votre système digestif peut fonctionner. Le stress aigu aplatit le système digestif, tandis que le stress chronique peut le perturber durablement. Il est extrêmement important de prendre suffisamment de temps pour s’occuper de soi et se détendre. Faites un exercice de respiration, canalisez votre stress en pratiquant une activité sportive intense, allez vous promener dans la nature ou entourez-vous des personnes que vous aimez et qui vous font vous sentir bien et détendu·e. Pour terminer, votre sommeil est également un moment important pour la réinitialisation de votre système digestif, car dans les moments d’inaction, votre corps prend le temps de récupérer.

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