Gaëlle, éternelle romantique, pensait avoir trouvé le bon, mais la vie en a décidé autrement. À près de 30 ans, elle questionne sa sexualité et tente de déconstruire les idées reçues. Pour y parvenir, rien de mieux que la pratique et le partage d’expériences.
L’autre jour, j’ai appris que Ben n’était plus célibataire. C’était un soir très étrange. Je rejoignais Alex pour une soirée et quelques secondes après lui avoir dit bonjour, ça s’affichait là, devant mes yeux. « ‘Grougniasse’ a rejoint le groupe famille ». La notification laissait peu de place à l’imagination. Évidemment, elle ne s’appelle pas vraiment ‘Grougniasse’. Mais pour le bien de ma santé mentale, c’est comme cela que j’avais décidé de la nommer. Le groupe famille, c’est un système proposé par iCloud pour stocker les données des téléphones en ligne. Comme mon téléphone était presque plein, Ben m’avait donné un accès à ce fameux groupe pour que je stocke mes photos sur le Cloud et libère de l’espace sur mon smartphone. Je me souviens qu’à l’époque, j’avais vu ce geste comme une officialisation sacrée que je faisais partie de cette « famille », la sienne. J’y avais pris une place importante, du moins c’est ce que je pensais. Et voilà que quelques mois après notre rupture, Grougniasse en faisait aussi partie, me remplaçant petit à petit et m’effaçant tout aussi vite de sa vie à lui. Je n’avais plus de nouvelles de Ben, aucune. Il m’arrivait encore d’échanger de temps en temps avec sa mère, ce qui maintenait une forme de lien. Mais il ne m’est plus nécessaire du tout. J’aime ma nouvelle vie. J’aime les portes que cette rupture m’a ouvertes. Je me sens épanouie, moi à 200 %. J’explore, je tente, je me trompe, je recommence, je m’écoute. Bref, tout va bien et pourtant, cette notification me fait ressentir des sentiments négatifs: elle pique. Pourquoi diable? En plus, je ne vois pas pourquoi j’aurais le droit de fricoter de mon côté et pas lui. C’est normal après tout, d’avoir des relations avec les autres, de passer à autre chose et de faire une nouvelle place à quelqu’un dans sa vie quand cette même place n’est plus occupée. Mais ce qui me pique un peu, l’ego surtout – restons lucides – c’est que ça me donne l’impression de n’avoir été qu’une place momentanément occupée. J’ai débarqué, j’ai fait mon truc et puis j’ai été mise dehors. Un peu comme une fleur qu’on offre pour toute sa beauté, mais qu’on jette dès qu’elle est un peu flétrie parce qu’elle ne décore plus la pièce. Finalement, que sont tous ces ex pour nous? Des morceaux de vie qu’on range dans des tiroirs mentaux? Et qu’on peut rouvrir de temps en temps pour voir s’il y a encore quelque chose à en tirer? À part certaines situations exceptionnelles, j’ai maintenu des contacts cordiaux, voire amicaux, avec mes anciens copains. Certains auront toujours une place particulière dans mon coeur. Ils ne sont pas des tiroirs. Plutôt des commodes, remplies de beaux souvenirs que je ne souhaite pas oublier ou laisser moisir sous la poussière. Dans le cas de Ben, je ne sais même pas s’il me considère comme une vieille chaussette qu’on laisse traîner sous un meuble sans y prêter attention. C’était une rupture assez brutale, sans communication bienveillante, sans explication fondamentale sur le pourquoi du comment. Tout ça me fait dire aujourd’hui, avec le recul, que notre rupture a été à la hauteur de notre relation: sans considération pour les émotions de l’autre. Enfin, surtout les miennes. Quelque part, je plains un peu « la nouvelle ». Je préfère d’ailleurs arrêter de l’appeler Grougniasse. Parce que je ne lui souhaite pas de s’embarquer dans une relation aussi toxique que celle que nous avions, Ben et moi. Je lui souhaite d’être heureuse et épanouie, et de trouver en lui ce qu’elle cherche chez un partenaire. Même si, qu’on se le dise, je ne lui offrirai jamais de fleurs, pas même des chaussettes trouées.
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