Gaëlle, éternelle romantique, pensait avoir trouvé le bon mais la vie en a décidé autrement. Alors qu’elle approche des 30 ans, elle questionne sa sexualité et tente de déconstruire les idées reçues. Et pour y parvenir, rien de mieux que la pratique et le partage d’expériences.
L’autre jour, j’ai rencontré Jenny. C’est un ami à moi qui l’a rencontrée en France lors d’un stage. Apparemment, il lui a très vite parlé de moi. Il sentait le match amical parfait entre nous. Il ne s’était pas trompé. Alors qu’elle était en visite en Belgique, nous nous sommes retrouvés au bar tous ensemble pour faire connaissance. Quelle agréable rencontre. Jenny a une vie passionnante, qui ne ressemble à rien de ce que je connais dans mon entourage proche. Elle est maman de deux ados, non-binaire et polyamoureuse. C’est-à-dire qu’elle relationne (je vais utiliser un champ lexical que j’ai découvert avec elle) avec plusieurs personnes en même temps.
On ne parle pas du tout de plan cul ici. Jenny m’expliquait qu’il lui était impossible de coucher avec des personnes pour qui elle n’a pas eu un coup de cœur. Pour arriver à l’étape du sexe, plusieurs critères devaient être remplis : un consentement éclairé, des atomes crochus réciproques et des personnalités qui sont déconstruites des normes sociétales. Un beau programme, je vous le dis !
Pendant des heures, elle m’a confié sa vision de la vie, de l’amour, de la sexualité, du plaisir, du couple. Rien ne résonnait avec ce que j’avais connu. Jenny est libre et elle chérit sa liberté. Un jour, elle se sent femme, l’autre, elle ne se définit pas forcément comme telle. C’est-à-dire que toutes les caractéristiques qu’on définit comme féminines ou masculines n’ont plus lieu d’être.
Si on part du principe qu’elles sont nées d’un discours sociétal, on peut vite en conclure qu’il s’agit de constructions, surtout de constructions patriarcales.
Je vous donne un exemple concret. On associe fréquemment la vulnérabilité, la douceur et l’empathie aux femmes, comme si ces éléments ne pouvaient pas également être propres aux hommes. Mais si les hommes se permettent de les exprimer, la définition de la féminité et de la masculinité s’effondre. Je n’ai que bien trop peu d’espace pour étayer mes propos ici mais j’espère que vous comprenez ce que je veux dire. Ce n’est pas forcément simple de résumer des heures de conversation en quelques lignes.
Toujours est-il que Jenny a remis en cause un million de questions sur les relations et elle a fini par trouver ce qui l’anime elle, soit le polyamour. Dans sa démarche, personne n’appartient à personne. On peut aimer de façon multiple, construire de nouvelles façons de créer des relations, sortir des schémas. Ça fait des années qu’elle explore et tout ce qu’elle raconte me fascine. Surtout que sa conception n’empêche pas l’attachement, les projets, l’exclusivité, la fidélité. C’est juste que ces concepts se discutent entre individus et s’adaptent aux envies de l’un et de l’autre.
Par exemple, quand elle s’engage avec quelqu’un, elle instaure un rituel lors de chaque début de saison, qui consiste à rediscuter le couple. « On se pose, dans un cadre confortable, pour revoir les trois mois passés, refaire le point sur ce que l’on a aimé ou pas, ce que l’on veut pour la suite. Parfois, il m’est arrivé d’exprimer l’envie d’être exclusive pour les trois prochains mois, ou à l’inverse, d’explorer d’autres choses ». Si les deux partenaires sont d’accord, vous imaginez à quel point ça ouvre le champ des possibles ?
Bien entendu, cette démarche demande beaucoup de conversations et une conscience posée de ses limites, de ses blessures personnelles… Moi par exemple, je me demande comment gérer la jalousie quand on a peur d’être abandonné. Ça me semble très compliqué à mettre en place. Mais je sens qu’une part de moi à envie de s’y essayer. Peut-être pourrais-je en parler à Alex ? Comme on n’est pas en couple, pourquoi pas essayer autre chose ?
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