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© Sad woman or teenager girl looking through a steamy car window

Pensées suicidaires, anxiété et troubles, les jeunes sont au bord du gouffre

Manon de Meersman

Visionnée plus de deux millions de fois en moins de 24h, la vidéo “Jeunes en danger” de HugoDécrypte interpelle. Le jeune homme y compile une série de témoignages qu’il a recueilli auprès de la jeune génération. Résultat? Un véritable appel à l’aide qui glace le sang.


“J’ai décidé de donner un écho à vos témoignages qui illustrent la détresse que vit une part grandissante de notre génération”, écrit HugoDécrypte en légende de sa vidéo. En 3 minutes et 28 secondes, le jeune homme parvient à nous faire prendre conscience de ce que vit une partie de la jeune population. De quoi véritablement interpeller...

Une jeunesse diabolisée


Les témoignages font froid dans le dos et traduisent le mal-être d’une partie de la population effacée en grande partie des médias et des discours politiques. Alexis, 18 ans, explique dans la vidéo d’HugoDécrypte qu’il a une impression de solitude et aucune vie sociale. “J’ai l’impression que ça sert rien, que tout ça, ça va jamais se terminer.” Audrey, 19 ans, décrit quant à elle ses journées: “À 8h j’ouvre mon ordi, à 22h je le ferme, et à 22h30 je suis couchée”. Grâce nous parle d’idées noires apparues pour la première fois de sa vie.

J’ai eu pour la première fois des pensées suicidaires. Je me sens seule et en fait, je me rends compte qu’à part ma volonté, plus rien ne me retient de passer à l’acte.”


La vidéo a déjà suscité des milliers de commentaires et à la lecture de ces derniers, on se rend réellement compte de l’importance de mettre en lumière le sujet des jeunes en détresse à l’ère du Covid-19. “On a souvent été stigmatisés dans cette crise, commence Marine, 23 ans, étudiante en psychologie. On a été pointés du doigt comme des inconscients parce qu’on avait un besoin de nourrir une vie sociale pour se sentir heureux. Mais ce besoin, il est naturel, instinctif, indéniable. Et pourtant, nous sommes nombreux à nous être pliés – et à toujours le faire d’ailleurs – aux règles. Il y a eu une réelle diabolisation des jeunes, mais il faut bien se rendre compte que nous aussi, on vit mal cette crise.”

 

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De nombreux décrochages et une démotivation totale


“Je donne cours en 4ème, 5ème et 6ème secondaire, nous explique Elisabeth, 47 ans, professeure de français. Malgré le fait que la plupart des cours ne se fassent désormais plus en présentiel, je tente de stimuler au maximum mes élèves. Mais au fil des mois, j’ai pu constater une réelle évolution: beaucoup d’entre eux décrochent et perdent la motivation. La semaine dernière, pour l’un des rares cours que je donne directement en classe, je me suis frittée avec une partie des jeunes. La raison? ‘Mais Madame, vous ne vous rendez pas compte de la charge de boulot que vous nous donnez, on coule’. Que voulez-vous répondre à ça?

D’habitude, je suis à leurs côtés pour les aider et les aiguiller. Mais en raison des normes sanitaires en vigueur dans les écoles, je suis obligée de mettre les bouchées double en leur donnant du travail à domicile, c’est le seul moyen en ma possession pour les aider...”,


poursuit la professeure; Mais plus le temps passe, plus je sens qu’ils décrochent, et il n’y a rien de plus difficile pour un professeur, aussi passionné soit-il, que de voir ses élèves se démotiver et perdre leurs couleurs...”

Julie, 16 ans, nous explique qu’en effet, elle a perdu le courage de se mettre devant ses cahiers depuis plusieurs semaines maintenant. “Certains profs ne nous donnent quasi rien comme travail. Parfois, ils nous expliquent même pas leur cour et on doit se mettre de nous-même devant nos feuilles. D’autres, en revanche, font de leur mieux et adaptent leurs cours comme ils peuvent. Mais se lever tous les matins et se trouver un rythme quand l’école, ça nous passionne pas déjà des masses, c’est vraiment difficile. Mes amis me manquent et je me sens seule. Ça prend le dessus sur toutes les dimensions de ma vie et j’ai l’impression de ne pas voir la fin de tout ça”, conclut la jeune fille. Pour Marine, c’est la même chose concernant les études supérieures. “On nous demande de nous responsabiliser, mais on se rend compte qu’on nous livre davantage à nous-même. Allez vous discipliner tous les jours à vous mettre à votre bureau pour suivre des cours en visio. Je vous assure qu’il n’y a rien de plus déprimant. Je m’accroche du mieux que je peux, mais je pleure plusieurs fois par semaine et je peux vous dire que je ne suis pas la seule. Dans mes amis, on est nombreux à être au bord du craquage mental et à avoir l’impression de perdre une partie de notre jeunesse.”

La génération des jeunes travailleurs touchée également


Marie, 26 ans, est en télétravail depuis le premier confinement et commence à réellement avoir des difficultés à survivre à ses longues journées. “Je passe mes journées devant un ordinateur, de 9h à 18h, tous les jours depuis presqu’un an. Ma coloc’ travaille sur le terrain et n’est jamais à l’appart la journée, ce qui fait que je suis toute seule. Au début, j’avais un rythme: je me levais, je déjeunais, je me lavais et je m’habillais, bref, j’étais d’attaque pour travailler. Mais aujourd’hui, après des mois où les journées s’enchaînent et se ressemblent, je déprime totalement. Je suis en jogging et les cheveux gras, je me néglige, et j’ai même plus spécialement faim le midi. Le peu de motivation que j’ai, je le puise dans des petits bonheurs quotidiens: voir mon copain le soir, organiser un repas avec une poignée d’amis, mais même là, en sachant qu’à 22h, faut être rentrée, ça te permet pas de profiter à fond... Ce qui me fait tenir, c’est vraiment l’espoir de voir tout ça se finir bientôt.”

Kelly est dans la même situation que Marie. Âgée de 26 ans également, elle nous explique qu’elle vit de plus en plus difficilement la situation.

Cette routine qui s’installe est pesante et de plus en plus compliquée à accepter au quotidien, notamment à cause du télétravail qui devient pénible mentalement, mais physiquement aussi car le corps ne suit pas”,


poursuit la jeune femme. “Ne plus faire de sport alors que j’en faisais 2 à 4 fois par semaine, ça relâche les muscles et le mental n’est plus aussi alerte et vif qu’avant. L’immunité est plus faible et les capacités mentales ralentissent car on est toujours dans le même système, à faire la même chose tous les jours comme des moutons. Notre liberté est rognée, bloquée et emprisonnée par l’État. Nos seuls projets en fait actuellement, c’est simple: c’est le boulot. Se maintenir dans un état de santé sans se dégrader est devenu terriblement compliqué. La seule chose qui fait tenir, c’est se raccrocher à l’idée qu’un jour on pourra de nouveau voyager, voir des potes dans des bars, aller au resto... Mais là, c’est difficile car cet espoir est étouffé et on a du mal à voir le bout.”

De son côté, Manon nous explique la difficulté de souffler dans cette situation. “Ma chambre est littéralement mon espace de travail, mais aussi celui dans lequel je fais du sport, dans lequel je dors, dans lequel je me détends. Il n’y a plus de frontière entre ma vie privée et ma vie professionnelle. Comme on n’a pas forcément le droit de voir des potes chaque soir, on s’enferme dans une bulle chez soi et les journées sont super longues. La notion de temps n’existe plus. Et comme on n’a jamais vécu une telle situation auparavant, on a aucun repère et on ne sait pas vraiment à quoi se raccrocher au final... On n’est pas armé·e·s pour faire face à une restriction si forte de notre liberté et gérer cet isolement sur un aussi long-terme.”

Un appel à l’aide à ne pas négliger


Cette situation a mis en exergue des maux dont certains jeunes ne connaissaient pas l’existence auparavant: troubles anxieux, crises d’angoisse, pensées suicidaires... Chez d’autres, elle n’a fait qu’accentuer ces douleurs, déjà bien présentes. Ces témoignages, ils traduisent un réel besoin: celui d’écouter les jeunes et de leur accorder la parole. Les jeunes sont jusqu’à maintenant passés après les aînés, mais n’oublions pas une chose: cela ne signifie pas pour autant qu’ils soient moins vulnérables.

La jeune génération a besoin d’aide. Ces nombreux témoignages en sont la preuve formelle. Les jeunes ont besoin d’élever leur voix et la société doit les écouter. Le Covid est venu casser le rêve de certains, comme celui de Pascal, qui explique dans la vidéo d’HugoDécrypte qu’il aurait tellement aimé devenir médecin. Le Covid est venu en démotiver d’autres, comme c’est le cas pour Julie. Le Covid est venu affecter mentalement certains d’entre eux, comme c’est le cas de Kelly et Marie. Mais au final, plus que le Covid en lui-même, ce sont les mesures et la situation qui en ont découlé qui sont venues chambouler la vie de ces jeunes, dont l’appel à l’aide marque une véritable alerte à côté de laquelle il ne faut pas passer car après, il sera trop tard.

Si vous avez des pensées suicidaires, n’hésitez pas à appeler la ligne d’écoute 0800 32 123 de Prévention Suicide. Si vous éprouvez des difficultés en cette période, n’oubliez pas que vous n’êtes pas seul·e·s et que des profesionnel·le·s peuvent vous accompagner. 

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