Du désir d’enfant à la maternité, mettre un petit être au monde peut parfois s’apparenter à des montagnes russes. Alizée a fait le choix conscient d’accoucher de manière physiologique chez elle et de pratiquer le Planceta Lotus. Rencontre avec cette maman pour parler naissance et décortiquer les croyances liées à l’accouchement.
Alizée a 33 ans. Elle est en couple avec Benjamin depuis 12 ans et est l’heureuse maman au foyer de trois filles (Maya 9,5 ans, Zaylee 2 ans et Phénix 8 semaines). Elle est infirmière de formation et Quantik Doula. Après avoir accouché de façon médicalisée pour sa première fille, elle a décidé de le faire de manière physiologique à domicile pour ses deux accouchements suivants.
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Un premier accouchement à l’hôpital
“Depuis toujours, c’était une évidence que je serais un jour maman,. C’était viscéral, dans les tripes. Je suis tombée enceinte à l’âge de 23 ans. Ce n’était pas du tout réfléchi, on était encore des ados, on n’avait pas d’argent, ça a été un coup de folie. On s’est dit ‘on s’aime, on fait un bébé’. Je suis tombée enceinte dans le mois. Pour cette première grossesse, je ne connaissais encore rien au sujet des naissances physiologiques. J’ai suivi le mouvement, n’étant pas informée des autres possibilités. À ce moment-là (sans avoir le recul que j’ai aujourd’hui), je dirais que mon accouchement médicalisé s’est bien passé.”
La découverte d’un monde nouveau
“Après la naissance de ma fille, j’ai repris mes études. On a décidé de mettre le deuxième en route 7 ans plus tard. Il a fallu un an et demi pour que je tombe à nouveau enceinte. Entre temps, suite à des discussions et rencontres, le mot ‘doula’ est venu à mes oreilles. J’ai commencé à me renseigner et à m’intéresser aux naissances physiologiques. J’ai assisté à une conférence donnée par Michel Odent.”
Un nouveau monde s’est ouvert à moi, j’ai réalisé que la femme a tout ce dont elle besoin pour enfanter. Ce fut une évidence.
“J’ai ensuite découvert Karine L.Laseva, une sage-femme qui a fondé l’école des Quantik Doulas. Je me suis inscrite aux cours en ligne et le mois d’après, j’apprenais que j’étais enceinte. Durant cette seconde grossesse, j’étais convaincue que je voulais accoucher à domicile et non pas dans une maison de naissance ou dans un plateau technique à l’hôpital. J’ai trouvé une sage-femme qui acceptait de m’accompagner dans ce projet de naissance.”
Accoucher à domicile
“Il faut distinguer un AAD (accouchement à domicile) d’un ANA accouchement non assisté. Un accouchement à domicile signifie qu’on est accompagnée d’une professionnelle de la santé, à savoir une sage-femme, qui est en droit de pratiquer un accouchement. L’accouchement naturel à domicile, il n’y a pas de sage-femme, on est en famille, parfois en présence d’une doula.”
Déconstruire les idées reçues
“Pour mon second accouchement, nous étions à la maison avec mon mari, une sage-femme, une doula et ma fille aînée. Le travail s’est déclenché dans la nuit. Ce fut assez long, il aura fallu 22 heures en tout.”
On va de surprise en surprise, on découvre la puissance des contractions, le corps qui travaille en symbiose avec le bébé.
“J’avais beaucoup d’attentes, on s’imagine un scénario de rêve, car depuis toute petite on a cette idée que la femme a besoin d’être sauvée à l’hôpital. Il y a beaucoup à déconstruire. Ça prend du temps d’avoir confiance en soi, en son corps et en son bébé. J’ai adoré accoucher dans le salon, vivre mon post-partum allongée dans mon lit…”
Appréhender la douleur
“Durant un accouchement, la femme entre dans ce qu’on appelle le ‘vortex de la naissance’. C’est comme une spirale dans laquelle on est embarquée. Il y a des phases avec des moments de répit puis des passages plus intenses. Ces phases sont nécessaires pour aider le bébé à passer les différents détroits du bassin.”
Quand on en a conscience, on voit les choses différemment. Bien sûr, c’est douloureux mais la femme a en elle toutes les hormones pour pouvoir transcender ces douleurs.
“Il faut différencier la douleur de la souffrance. La douleur, on peut apprendre à la gérer grâce à des tas de choses à mettre en place, des techniques et des positions pour la soulager tandis que la souffrance n’est plus gérable, elle s’impose à nous, on la subit, on ne la maîtrise plus.”
Planceta Lotus
“J’en ai entendu parler pour la première fois dans le cadre de ma formation à l’école de Quantik Doula. Le Placenta Lotus est d’origine hindouiste, il consiste à laisser le cordon relié au nombril du bébé et au placenta, le bébé reste ainsi relié à son placenta jusqu’à ce que le cordon tombe au bout de 3 à 10 jours.”
On pose le placenta dans un panier sur un mélange de gros sel d’Himalaya et d’herbes séchées spécifiques aux vertus astringentes et antiseptiques pour éviter la macération. Grâce à ce mélange qu’il faut changer tous les jours, ce placenta ne dégage aucune odeur. On le recouvre ensuite de ce mélange et on ferme avec des tétras.
“Les bénéfices sont nombreux: le Planceta Lotus permet à la maman de ralentir et de rester allongée à côté de son bébé, ça invite aussi à moins laisser le bébé être manipulé par l’entourage. Le placenta est considéré comme le premier chakra du bébé, son âme. Pendant que le bébé et le placenta sont liés, l’âme de l’enfant s’incarne sur terre. Le placenta est considéré comme l’arbre de vie de l’enfant, sans placenta il n’y a pas de vie. De plus en plus on pratique ce qu’on appelle le ‘clampage tardif’ qui consiste à attendre quelques heures avant de couper le cordon. Il faut savoir qu’à la naissance il y a encore plus ou moins 40% du sang du bébé et ses cellules souches contenue dans le cordon. Le fait de ne pas couper ni clamper permet au bébé de recevoir ce sang et ces cellules.”
On honore son placenta, ce n’est pas un vieux déchet qu’on jette à la poubelle. C’est un vrai rituel. Une fois que le placenta et le bébé sont séparés, on fait ce qu’on veut du placenta.
“Personnellement, j’ai congelé mon placenta pour en faire une cérémonie pour l’enterrer à l’occasion de son premier anniversaire. On peut aussi l’encapsuler pour le manger. Je suis formée en encapsulation. Cela consiste à déshydrater le placenta, à le broyer et on encapsule en gélule. Le planceta est riche en fer et en minéraux. En post-partum, il est très bénéfique au niveau nutritif pour la maman!”
Un troisième accouchement post-terme
“Quand je suis tombée enceinte de ma troisième fille, j’ai décidé d’accoucher à domicile sans l’intervention d’une sage-femme. Sauf que j’ai accouché à presque 43 SA.”
Je ne voulais pas être déclenchée, c’était hors de question. Je suis convaincue que chaque maman a le bébé qu’elle est capable de sortir. Le corps s’adapte, c’est tout une mécanique. Au moment de la naissance, les os du bassin s’élargissent pour laisser passer le bébé.
“Une doula et nos deux filles étaient à la maison. Le travail a duré longtemps, ça faisait 72 heures qu’il avait commencé et la poche avait percé. J’ai commencé à faire de l’hypertension et un peu de fièvre. Notre but n’était pas de nous mettre en danger, je voulais juste que le travail se déclenche naturellement. Nous nous sommes rendus à l’hôpital. “
Le droit d’imposer
“Nous avons été accueillis par les sage-femmes à qui nous avons expliqué la situation. Elles voient rarement ce genre de cas. Le protocole médical est mis en place et s’impose à moi. Généralement on déclenche à 41 SA et non à 43. Je savais ce qui allait se passer, je voulais continuer à pouvoir travailler mon corps et mon bébé sans péridurale. L’équipe médicale a décidé de me donner de l’ocytocine (l’hormone naturellement présente dans le corps pour accélérer le travail quand il est trop lent). Sauf que l’équipe n’a pas respecté le protocole et m’a donné une forte dose en un coup.”
Je l’ai vécu comme une torture physique insoutenable. Le corps est comme écartelé. Je souffrais tellement que j’ai fini par demander une péridurale.
“On me l’a posée et heureusement je l’ai bien supportée. J’ai annoncé à l’équipe que je voulais accoucher accroupie sur la table et que je voulais marquer une pause quand la tête du bébé sort. Je me souviens avoir vu à leur tête qu’ils n’ont jamais vu ça, c’était assez drôle. Heureusement, même sous péridurale, j’ai pu être dans cette position. “
J’ai également expliqué que je souhaitais pratiquer le Placenta Lotus. L’équipe me répond que ce ne sera pas possible pour des raisons médicales. Je dis à mon conjoint qu’on le ferait quand même (on avait prévu tout le matériel). On demande de déclamper le cordon, ce que l’équipe n’avait jamais vu. On a décidé d’emballer le placenta selon le rituel. Une fois l’équipe revenue, c’était fait. Le placenta s’est détaché au bout de 6 jours de vie. Je l’ai congelé je ne sais pas encore ce que j’en ferai.
“Aujourd’hui, je sais que ce placenta m’appartient et personne ne peut en faire quoique ce soit tant qu’il n’y a pas eu de directives médicales stipulant que mon bébé est en danger s’il reste attaché à ce dernier. Je veux partager mon histoire et dire aux mamans qu’il y a tant de possibilités… Pour faire un choix éclairé, il faut s’informer. Je ne suis là pour convaincre personne. Je me sens souvent jugée sur mes choix. On me regarde un peu comme une sorcière perchée qui sort du cadre. Mais c’est l’inconnu qui fait peur!”
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