Chaque semaine dans votre magazine, retrouvez la chronique de Gaëlle: Le Point G.
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““LE POINT G”” épisode 103: la chronique sexo de Gaëlle
Gaëlle, 27 ans, en a bavé côté cœur. Après avoir épluché Tinder et vécu mille et une nuits parfois torrides, parfois étranges, il semblerait qu’elle ait trouvé le bon. Avec Ben, elle explore toutes les facettes de la sexualité. Avec amour, mais surtout avec humour.
L’autre jour, Marie m’a demandé pour la voir en urgence. Ses yeux étaient rouges et gonflés. Elle avait pleuré. J’ai tenté un maladroit « ça ne va pas ? » Au bout de quelques minutes, elle a accepté d’enfin m’expliquer ce qu’il se passait. « J’ai vécu une chose horrible ». Je crois qu’au fond de moi je savais déjà ».
Cette chose horrible, innommable, c’était un viol.
Ça s’est passé il y a un an plus ou moins. On sortait toutes les deux pour s’amuser et décanter tout le stress de la semaine. On avait vraiment beaucoup bu. Quand elle est partie, je suis restée encore un peu parce que je m’amusais bien. Je fond en larmes. La suite est un cauchemar. Marie ne se sentait pas très bien. Elle a sans doute été droguée à son insu. Au lever du soleil, elle s’est réveillée dans une ruelle, sa culotte sur les genoux.
Je n’ai pas les mots. Rien de réconfortant ne me vient à l’esprit. Rien. Parce qu’il n’y a pas de mots adéquats, tout simplement parce que ça ne devrait pas arriver des histoires comme celle-ci.
Désemparée par la situation, je ne sais rien faire d’autre que de lui prendre la main. C’était il y a un an et elle commence seulement à pouvoir m’en parler. Vous imaginez? Un an de mutisme, de souffrance, de cauchemars incessants. Je suis tellement en colère sur les hommes de la Terre entière là tout de suite. Mon amie pense qu’elle l’a cherché, qu’elle est une souillon, que tout est de sa faute. Je sens la rage monter en moi. J’ai une autre amie très proche qui a vécu ce calvaire. Elle pense également que tout est de sa faute. Elle est restée dans le silence pendant des mois avant de prononcer le mot « viol ». Et encore aujourd’hui, je l’entends remettre en doute la situation. « Je n’ai pas l’impression d’avoir vraiment dit non, je ne me souviens plus très bien ».
Je n’ai qu’une chose à lui dire : « si tu te poses la question, la réponse est oui ».
À partir du moment où un rapport sexuel donne l’impression d’avoir subi quelque chose de négatif, c’est qu’il y a un problème de consentement. Elle ne devrait même pas réfléchir. Personne ne devrait en douter. Je pourrais facilement retrouver les coupables, ces salauds, ces ordures qui ont laissé leur dernière part d’humanité dans cette respiration précédant la mise à l’acte. Mais Marie refuse catégoriquement. Je me sens impuissante, démunie…
Que faire ? Aller contre la volonté de la victime, de mon amie ? C’est impensable.
Nous manquons cruellement d’outils pour réagir en tant qu’amie. Il y a encore tellement de travail à faire. Le plus important selon moi, c’est d’éduquer dès le plus jeune âge au consentement. Et de punir les coupables. Ces garçons qui font ça, ils continuent de vivre leur vie, de sortir le vendredi soir. Rien ne dit qu’ils ne recommencent pas toutes les semaines, en toute impunité.
Après ça, j’ai fait des recherches sur Google pour trouver des chiffres… Ça fait froid dans le dos. En Belgique, une femme sur cinq est violée. Sans compter toutes celles qui n’ont jamais osé en parler. Ça sera toujours trop.
On finira par se dire qu’on a eu de la chance si ça ne nous est jamais arrivé.
Combien sommes-nous à avoir déjà subi le harcèlement de rue par exemple ? Serait-ce trop s’avancer d’affirmer qu’on a toutes connu ça un jour ? Colère, dégoût, haine, tristesse. Tous les sentiments que nous ressentons sont mélangés. C’est donc ça être une femme en 2020 ? Avoir peur ? Ne pas jouir du droit à son propre corps ? Se dire qu’un acte de violence physique et/ou mentale est peut-être mérité ? Je refuse de l’accepter.
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