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Gaëlle, 27 ans, a passé huit ans de sa vie en couple. Mais après plusieurs déceptions, même si elle n’abandonne pas sa quête de l’amour avec un grand A, elle a décidé de se laisser vivre sans pour autant se priver des plaisirs de la chair. Elle compte bien découvrir les joies du sexe sans tabou et mener des expériences sans avoir froid aux yeux.
L’autre jour, en rentrant du dîner chez mes copines, j’avais besoin de discuter avec Ben. Ce qu’il m’avait fait juste avant de partir ne pouvait pas rester sans commentaire.
Quoi donc? Ce cunni incroyable qui m’a fait perdre pied en moins de deux.
Sa grande particularité (et la raison principale de mon envie d’en discuter), c’est que Ben n’avait pas voulu de suite après m’avoir fait plaisir. Pas de fellation, pas de coït passionné. Non, rien de tout ça. Il s’était relevé comme un prince et m’attendait pour partir rejoindre mes amies.
Dans ma tête, toutes les alertes de jackpot sonnent “épouse-le sur-le-champ”. Bien entendu, ça je ne peux pas lui dire. Mais j’avoue mesurer ma chance d’avoir pu vivre cette expérience. Pendant toute la soirée, on s’est jeté des coups d’œil coquins. On avait clairement envie de se jeter l’un sur l’autre.
Dès qu’on a passé la porte, j’ai sauté sur l’occasion. “Ce que tu m’as fait tout à l’heure,… On ne va pas en rester là, tu sais.” Je compte bien le remercier comme il se doit, mais Ben n’est pas du même avis. “C’est certain qu’on ne va pas en rester là. Tu n’as eu droit qu’à un petit avant-goût. Et je dois avouer que ton goût ne m’a pas déplu.”
À ses mots, j’explose de rire. Ton goût? C’est bizarre, non? Voilà un terme qui me perturbe.
Je ne sais pas si c’est seulement drôle ou si c’est excitant. Il y a des mots comme celui-ci qui passent ou qui cassent. Et j’ai l’exemple le plus frappant, celui qui parlera à tout le monde: le mot “chatte”. C’est typiquement le genre de mot qui peut faire mouche ou faire fuir. Dans certains contextes, ça répugne d’entendre quelqu’un le prononcer. Il sonne sale, malpoli, vulgaire. Mais je ne sais pas pourquoi, dans certaines situations, il peut devenir excitant. Comme s’il nous ramenait à notre instinct primaire, animal.
D’ailleurs, une étude publiée l’année dernière affirmait que 92 % des sondés adorent ce qu’on appelle le “dirty talk”. Mais que si les hommes sont très excités à l’idée de dire le mot “chatte”, les femmes ne le trouvent pas forcément à leur goût. Avouez tout de même, Mesdames, que c’est un rien plus bandant que “minou” ou “princesse Sophia”.
Il n’y a rien de plus compliqué que de nommer la chose, finalement.
Impossible de l’appeler “vulve”: plus tue-l’amour, tu meurs. Vagin n’a jamais fait rêver non plus. Autant appeler une chatte, une chatte, vous ne trouvez pas? Toujours est-il que concernant l’odeur (ou le goût) de ladite chatte, je pensais qu’il s’agissait simplement d’un sujet dont on ne parle pas. Un peu comme Voldemort, celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom (et qui ne doit pas sentir très bon non plus). Je m’interroge sur mes inhibitions ou mon conditionnement à penser qu’un sexe féminin n’est pas ragoûtant.
C’est vrai qu’en y repensant, je ne sais plus quel Louis roi de France demandait à ses maîtresses de ne pas se laver pour mieux en goûter la fraîcheur (je vous vois faire la moue à la lecture de ces lignes!) C’est à la quantité d’humidité et à son délicat fumet qu’il jugeait l’excitation d’une femme. Mais faut-il pour autant le verbaliser?
Mentionner que la femme a bon goût? Ça induirait aussi qu’il est possible d’avoir “mauvais goût”.
Je commence à stresser en regardant Ben. Suis-je encore assez fraîche? Si on venait à rentrer tout excités et à se jeter au lit dans la seconde, je n’aurais pas le temps de passer par la salle de bains. Mais peut-être que ça lui plairait, en fait. Je ne sais plus quoi penser.
En fait, la solution est toute trouvée: je dois lui poser la question. “Dis Ben, je veux pas casser l’ambiance mais que veux-tu dire par ‘ton goût ne m’a pas déplu’? Tu trouves que ça a un goût?” D’un seul coup, il redevient tout sérieux. “Beeeeen, euuuh. Oui, ça a un goût. Ce n’est pas insipide quoi. Mais ce n’est pas dérangeant hein! Au contraire.”
Je reste perplexe. “Et ça arrive que j’aie mauvais goût?” Il reste silencieux. Je panique. “Faut toujours que tu poses des questions qui mettent mal à l’aise. T’es chiante quand tu veux. Non, tu ne pues pas, maintenant avance.” Pendant un instant, j’ai vraiment eu peur qu’il me pose la question à son tour. Parce que pour le coup, j’aurais sans doute menti aussi.
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