Marraine (n.f): femme qui tient (ou a tenu) un enfant (son filleul, sa filleule) à son baptême. Il faut avouer que cette définition du dictionnaire Le Robert est un peu poussiéreuse et qu’elle ne reflète en rien ce que signifie ce rôle aujourd’hui. Une nouvelle définition s’impose, non?
Il y a un peu plus d’un an, on m’a demandé si je voulais devenir marraine. Mon filleul, ce petit être si mignon et trop beau (je suis très objective) aura quatre mois dans deux semaines. Ma meilleure amie et son mari m’ont posé la question alors qu’ils avaient décidé d’avoir un enfant. Ce soir-là, nous avons partagé notre dernière bouteille de vin avant qu’ils ne deviennent parents. Nous avons parlé de nos incertitudes et des questions qui accompagnent l’arrivée d’un bébé. “Je ne sais pas à quoi ressemblera la maternité, m’a-t-elle dit, mais je suis sûre d’une chose: que tu seras la marraine de mon enfant.” Je ne me suis jamais sentie aussi honorée de ma vie.
Dans les semaines qui ont suivi l’annonce, j’ai ressenti une énorme fierté. Dès que j’ai pu l’annoncer, j’ai crié sous tous les toits que j’allais être marraine. Mais dès le début, je me suis mis la pression. Vais-je être une bonne marraine? Et puis, c’est quoi être une marraine? Qu’est-ce qu’on attend de moi? Toutes ces interrogations m’ont semblé être le bon point de départ pour un livre (ou du moins un article), car parmi les centaines de manuels sur la maternité, je n’en n’ai trouvé aucun sur le rôle si précieux des marraines et des parrains.
Une marraine: un rôle multifacette
“Demandez à une centaine de personnes ce que représente pour elles le rôle d’une marraine et vous obtiendrez une centaine de réponses différentes”, voilà ce que me répond la thérapeute relationnelle Vanessa Muyldermans quand je lui pose la question. J’ai donc décidé d’interroger 700 marraines et parrains. Parmi les réponses obtenues, voici les cinq rôles principaux que j’ai pu relever.
Celle·celui qui gâte
Les parents qui gâtent leurs enfants avec des bonbons, des jouets et tout autre petit plaisir coupable sont parfois vus d’un mauvais œil. Les marraines et parrains, eux, sont épargné·e·s. On s’accorde souvent à dire que “Gâter, c’est le boulot de la marraine ou du parrain“. Avertissement: il est préférable de chouchouter dans les limites fixées par les parents. S’ils disent non à une glace, ce serait malvenu de ne pas respecter leurs envies. Au risque d’être la marraine cool de parents en colère. Ne pas oublier que la relation avec les parents est aussi importante.
Celle·celui qui partage de chouettes moments
Ce ne sont pas que des cadeaux, mais surtout des moments à partager.” Voilà la réponse la plus populaire de ce sondage. Être marraine ou parrain est le prétexte idéal pour faire ressortir l’enfant qui sommeille en vous. Bien que mon filleul soit très mignon, j’attends avec impatience les voyages que nous pourrons faire quand il sera un peu plus grand. L’Efteling, le zoo, les spectacles de Papt’Patrouille, j’ai tellement hâte de l’y emmener! Le temps est la seule chose que vous pouvez offrir à votre filleul·le afin de créer du lien. Ce qui est impossible en offrant des cadeaux matériels.
Celle·celui qui aide
Serai-je capable de le nourrir, changer et bercer? Voilà des questions que je me suis posées quand j’ai rencontré mon filleul. Car oui, le babysitting est une des tâches accordées aux marraines et aux parrains, et beaucoup sont d’accord avec moi. Ce n’est pas encore arrivé, mais j’ai déjà une pince à linge de prête pour me boucher le nez quand je devrai changer ses couches!
Celle·celui à qui on se confie
Une marraine, c’est une conseillère et une gardienne de secrets. Si un enfant fait face à un problème gênant qu’il·elle ne peut pas partager à ses parents, vous êtes là pour l’écouter. En revanche, il faut s’assurer que notre filleul·le ne découvre jamais qu’on raconte tous ses secrets à notre meilleure amie, c’est-à-dire sa maman.
Celle·celui qui soutient les parents
Vous n’êtes pas seulement une marraine pour votre filleul·le, mais aussi pour les parents. Après tout, vous resterez l’amie/la famille que vous étiez avant l’arrivée du bébé. Il est important de ne pas perdre de vue cette belle relation.
Vanessa Muyldermans souligne que vous n’êtes pas obligée de remplir tous les rôles de marraine. Pour quelqu’un qui est déjà maman, la garde d’enfants et les soirées pyjama peuvent venir plus naturellement que chez quelqu’un qui n’a pas beaucoup d’expérience avec les enfants. Cette dernière se retrouvera plutôt dans le rôle de l’amie ou de la tante un peu fofolle. Mais il arrive aussi d’avoir des marraines qui sont des mamans très maternantes envers leurs propres enfants et qui ne sont que très présentes pour leur filleul·le. Certains parents n’attendent pas plus qu’un cadeau pour les anniversaires.”
C’est une bonne idée de discuter à l’avance avec les parents de la façon dont les deux parties voient la relation. Des attentes qui ne correspondent pas peuvent entraîner des conflits. “Cela fonctionne des deux côtés: en tant que marraine, vous pouvez aussi vous attendre à quelque chose. Entretenir une relation, c’est donner et recevoir, pas seulement investir.” Valérie, 33 ans, estime qu’elle reçoit trop peu en retour en tant que marraine. “Je suis la marraine de la fille de mon cousin. Elle a maintenant cinq ans et nous nous sommes vus deux fois au cours des trois dernières années. Au final, on ne me propose de la voir que les jours de l’année où je dois lui offrir un cadeau. Mais je refuse ce rôle qui consiste à ne faire que dépenser de l’argent. Et j’ai récemment osé en parler avec les parents.”
Une marraine, la maman de remplacement en cas de décès des parents?
Question étrange, mais toujours bonne à se poser! Malgré ce qui est encore communément admis, être marraine est une tradition purement sociale – et anciennement religieuse – sans aucune base juridique contraignante. Votre filleul·le ne vous sera pas légué·e si un événement tragique arrivait à ses parents. Un juge, en concertation avec les proches, désigne un·e tuteur·rice, généralement un membre de la famille proche (sœur, frère, grand-parent, etc.). Les parents peuvent indiquer une préférence ou une désapprobation pour un·e tuteur·rice dans leur testament, cela sera alors pris en compte. Mais non, vous n’êtes pas automatiquement la·le tuteur·rice de votre filleul·le.
Une marraine, une deuxième maman?
“Une seconde maman, une maman de remplacement, une sorte de maman”: voilà des termes qui reviennent souvent dans les témoignages de marraines. Beaucoup parlent d’un amour intense, semblable à l’amour maternel. La question de devenir marraine m’a également fait réfléchir fortement à mon souhait d’avoir des enfants. Ces dernières années, j’ai de plus en plus douté de vouloir des enfants. Savoir que je devenais marraine a été un soulagement. Si je ne deviens jamais maman, je donnerai juste mon amour maternel à ma filleule, me suis-je dit. “La maternité et le fait d’être marraine puisent dans les mêmes ressources, mais en elles-mêmes, ce sont deux choses complètement différentes”, déclare Muyldermans. “C’est la manière la plus saine de concevoir les choses. Le désir d’avoir des enfants est un désir fondamental qui ne peut être satisfait qu’en ayant son propre enfant. Je compare cela à la faim: vous pourrez boire de l’eau pour satisfaire la faim, mais la seule chose qui aidera, au final, c’est la nourriture.”
Pour les personnes ayant un désir insatisfait d’avoir des enfants, un·e filleul·le peut apporter de la joie dans leur vie, mais ce ne sera jamais un remède à la douleur. “Les personnes qui ont un désir insatisfait d’avoir des enfants doivent chercher d’autres ressources qui leur apportent du bonheur dans la vie. Passer du temps avec un·e filleul·le peut être l’une de ces choses, mais cela ne remplace pas le fait d’avoir un enfant à vous. Il est important que les personnes qui souhaitent avoir un enfant continuent à reconnaître qu’il y a du vide et de la tristesse associés à ce souhait non réalisé. C’est la vie.”
Parce qu’être marraine fait appel à votre côté bienveillant, pédagogique, il est logique que ce rôle vous fasse réfléchir à votre propre envie d’avoir des enfants. “Si vous, en tant que marraine, exploitez ces aspects bienveillants de votre personne et remarquez que vous en tirez du plaisir, vous réaliserez peut-être que vous voulez vous aussi avoir des enfants, déclare Muyldermans. Cependant, être marraine n’a rien à voir avec la maternité. Comme je l’ai dit: il y a cent interprétations différentes.”
Être marraine prépare à la maternité?
“Tu sais que c’est la marraine qui offre les dragées du baptême?“ m’a un jour dit en riant une amie quand je lui ai annoncé que je devenais marraine. Mauvaise nouvelle, j’allais devoir casser ma tirelire. Heureusement, ce n’est plus la tradition. De nos jours, ce sont les parents qui en assument l’entière responsabilité. À la marraine, on demande désormais de se charger d’organiser la baby shower de la future maman, si cette dernière en veut une évidement. Mais comme ma copine enceinte n’avait pas envie de lécher du chocolat étalé sur des couches, j’ai pu passer mon tour. Comme je voulais tout de même lui organiser un petit quelque chose, j’ai demandé à ses ami·e·s de remplir un questionnaire en ligne avec des prédictions (nom du bébé, sexe, date de naissance, ...). Juste avant la naissance, je lui ai envoyé toutes les réponses et elle et son mari ont pu rigoler en découvrant les prénoms que nous avions imaginés. Après l’accouchement, ils ont élu la meilleure joueuse qui recevrait une bouteille de cava de ma part. Trois mois plus tard, la gagnante attend toujours ses bulles. Je n’ai jamais prétendu être la marraine parfaite...”
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