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FAUT QU’ON (ne) PARLE (plus): de tous les Eric Zemmour de ce monde

Kathleen Wuyard

Coutumier des dérapages réactionnaires et xénophobes, Eric Zemmour fait une fois de plus parler de lui suite à ses propos envers la chroniqueuse Hapsatou Sy. Si le soulèvement populaire déclenché par les insultes d’Eric Zemmour est compréhensible, il sert finalement les intérêts du polémiste, dont il serait bon, même si le souligner dans un article est paradoxal, d’arrêter de parler.


Car c’est là une des règles d’or du marketing et des médias, “en bien ou en mal, pourvu qu’on en parle”. Même si cela peut sembler contre-productif et que la plupart des gens préféreraient rester anonymes plutôt que d’être associé à des propos à tendance raciste, toute attention est (presque) toujours bonne à prendre. Et pour chaque personne qui va conspuer l’ancien chroniqueur de “On n’est pas couché”, il y en aura au moins une qui applaudira et s’attaquera à ses détracteurs, suscitant encore plus de bruit autour de Zemmour. Or c’est bien ça qu’il recherche.


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N’en déplaise à ses critiques les plus vifs, Eric Zemmour est tout sauf stupide. Diplômé de l’Institut d’études politiques de Paris, il a fait ses armes dans l’agence de publicité FCA, avant d’exercer en tant que journaliste au service politique du Figaro, où il est resté jusqu’en 2009. Si ses propos peuvent parfois sembler être un suicide médiatique, Eric Zemmour s’est servi de ses sorties acerbes et de ses opinions on ne peut plus clivantes pour créer un personnage de polémiste qu’on adore détester et dont chaque apparition publique ou nouveau livre agite le public. En bien ou en mal, le fait est qu’on en parle, beaucoup, et que Le suicide français, son livre qui dénonce l’affaiblissement de la France notamment à cause d’un mauvais contrôle de l’immigration, s’est vendu à plus de 300 000 exemplaires.


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Avec sa dernière polémique en date, Eric Zemmour fait du Eric Zemmour. Mis face à Hapsatou Sy, chroniqueuse d’origine franco-sénégalaise, le polémiste s’en prend à son prénom “pas assez français”.

Normalement, en tous cas depuis une loi de Bonaparte qui a malheureusement été abolie en 1993, on doit donner [aux Français] des prénoms du calendrier, c’est à dire les saints chrétiens (...) C’est votre prénom qui est une insulte à la France parce que la France n’est pas une terre vierge, c’est une terre avec une histoire et un passé (...) Votre mère a eu tort.


Et d’ajouter, face à l’incrédulité d’Hapsatou Sy, que “Corinne lui irait très bien”. Depuis, c’est la déferlante, entre les vidéos diffusées par Hapsatou Sy, Thierry Ardisson qui monte au créneau et estime que sa chroniqueuse “s’étale sur Twitter pour faire un bad buzz complètement nul et Eric Zemmour qui refuse de s’excuser et annonce, à tort, qu’Hapsatou Sy a été virée. Le genre de situation qui réveille les armées de trolls qui soutiennent les gens tels qu’Eric Zemmour et n’attendent qu’un bon clash public pour lâcher leur venin, en l’occurence, un torrent de commentaires racistes à l’égard d’Hapsatou Sy sur les réseaux sociaux.

Les remettre à la place qu’ils méritent


Passons sur le fait que le polémiste lui-même porte non pas un “bon prénom français” mais bien un prénom d’origine scandinave, ici n’est pas le sujet et il ne s’agit pas de s’abaisser à son niveau. Ni des autres agitateurs de son acabit, qu’ils s’appellent Vincent, Marcel ou Caroline. Car c’est là ce qu’ils veulent, et ce qui leur permet de vivre, parfois grassement. Un clic est un clic, et quand vous ouvrez un article, même si c’est “pour voir ce qu’il peut bien encore raconter comme conneries” ou pour l’envoyer rageusement à une pote en mode “non mais WTF tu as vu ce qu’il est encore allé chercher”, vous augmentez la visibilité, et donc les revenus publicitaires tirés de ces brûlots. La pire chose qui pourrait arriver à Eric Zemmour & co, c’est qu’on ne parle (enfin) plus d’eux et de toutes les inepties qu’ils débitent. Les remettre à la place qu’ils méritent: celle, marginalisée, des gens qui déversent haine et bêtises et qu’on ne prend même pas la peine d’écouter. D’ailleurs, aussi tôt dit, aussi tôt fait, article fini, on arrête d’en parler.

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