La fondation L’Oréal dévoile l’ampleur du harcèlement dans le milieu de la recherche
Si le mouvement MeToo a dénoncé le sexisme et le harcèlement sexuel dans de nombreux domaines, la recherche n’échappe pas au phénomène. Une enquête vient de révéler qu’une chercheuse sur deux a déjà été harcelée au travail.
Une sur deux, un chiffre alarmant et pourtant basé sur des statistiques récentes. L’étude internationale réalisée par Ipsos auprès de 5200 scientifiques dans 117 pays différents, a été révélée ce jeudi 16 mars par la Fondation L’Oréal. Elle constate que 49 % des femmes exerçant un métier scientifique ont déjà été confrontées à du harcèlement sexuel dans leur carrière, soit une femme sur deux. Parmi ces femmes, pour 47 % d’entre elles les faits ont eu lieu pendant ces cinq dernières années, pour 24% d’entre elles, ils remontent aux deux dernières années seulement. Alexandra Palt, directrice générale de la Fondation L’Oréal, explique auprès de « Challenges » : « En 2019, nous avions publié une première étude qualitative sur le harcèlement. Cette fois, nous avons commandé à Ipsos une étude plus conséquente, qui a été menée pendant trois mois. Les résultats sont très édifiants. » Elle affirme :
Cette situation a un impact négatif sur les carrières des femmes scientifiques.
En effet, parmi les femmes concernées par ce harcèlement dans le milieu de la recherche, 65 % considèrent que cela a eu un impact sur leur carrière et également sur leur engagement dans la science. Seule la moitié de ces femmes, 53 % précisément ont osé en parler autour d’elles, seule une sur cinq en a parlé au sein même de l’institution par laquelle elle est employée. Un nombre qui s’explique par plusieurs raisons évoquées par Adèle Combe, autrice du livre « Comment l’université broie les jeunes chercheurs » à « FranceInfo » ce 16 mars dernier :
Pour les personnes qui sont victimes, c’est clairement, comme on peut le voir dans les enquêtes, la peur pour sa carrière. Parce que le monde de la recherche, c’est un petit monde avec un microcosme et donc rapidement les choses se savent et les personnes n’osent pas forcément parler, parce qu’elles ont peur de paraître faibles. Elles ont peur que ce qu’elles disent ne soit pas prouvé. Donc, en fin de compte, qu’on les accuse de diffamation. Elles ont aussi peur que les personnes qui ont un peu plus de pouvoir, finalement, les mettent au placard.
Un fléau qui touche la santé mentale de ces femmes puisque la moitié d’entre elles se disent mal à l’aise sur leur lieu de travail, 30 % se qualifient comme vulnérables et 21 % confient avoir perdu leur confiance en soi.
Lire aussi : HONDURAS: la pilule du lendemain légalisée après 14 ans d’interdiction
Un appel aux laboratoires pour changer les choses
« Mettre des chiffres, c’est important et pour nous c’est la première étape. Pour aller au-delà, nous lançons un appel à l’action avec les laboratoires partenaires qui se disent prêts à s’engager à la suite de cette étude », lance Alexandra Palt. Un appel lancé par la Fondation L’Oréal qui s’articule en plusieurs lignes d’action : « Tout d’abord, une politique zéro tolérance, avec signalements internes et prises de sanctions. Ensuite, la sensibilisation massive et obligatoire qui est très importante, car tout le monde a besoin de comprendre ce que c’est, en particulier les étudiants et étudiantes travaillant avec un maître de thèse. Enfin, un engagement budgétaire, car 60 % des institutions scientifiques ne consacrent aucun budget à l’égalité femmes-hommes. Il faut en particulier pouvoir nommer un référent ou une référente sur ces sujets », décrit la directrice générale de la fondation. Une dizaine d’établissements et d’universités se sont engagés à suivre ces directives, en espérant que d’autres les rejoindront pour parvenir à mettre fin à ce schéma. Alexandra Palt conclut : “Le monde scientifique n’a pas encore fait sa révolution.”
Lire aussi:
- Les femmes peuvent désormais nager seins nus dans les piscines de Berlin
- 3 femmes témoignent de ce que la boxe leur apporte
- PAYS-BAS: un homme condamné pour la première fois pour avoir retiré son préservatif pendant l’acte
- En Caroline du Sud, la peine de mort est envisagée pour les femmes qui avortent
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici