La Maison Blanche dénonce une mesure anti-avortement (mais ne le protège pas pour autant)
Depuis l’annulation de l’arrêt Roe vs Wade, qui accordait depuis près de 50 ans le droit d’avorter aux Américaines, de plus en plus d’Etats ont interdit la pratique sur leur territoire. Dernier en date, l’Indiana, qui a été épinglé par la Maison Blanche. Laquelle critique, mais se fait aussi pointer du doigt pour sa réponse “timorée”.
Lorsque, le 24 juin dernier, la Cour Suprême américaine a annoncé l’annulation de l’arrêt Roe vs Wade, le locataire de la Maison Blanche, Joe Biden, a parlé d’une “erreur tragique” mettant “la santé et la vie des femmes en danger”. Car, l’Histoire l’a montré, interdire l’avortement ne met pas fin à sa pratique mais bien simplement à sa pratique sécurisée, avec tous les dangers que ça entraîne pour celles qui doivent avorter de manière clandestine, le plus souvent au péril de leur vie.
Et elles sont extrêmement nombreuses à être désormais menacées aux Etats-Unis: selon le Guttmacher Institute, jusqu’à 58 % des Américaines en âge de procréer – ce qui représente environ 40 millions (!) de femmes – vivraient dans un Etat qui pourrait leur limiter ou leur interdire l’accès à l’avortement. L’Indiana, par exemple.
“Des mesures radicales”
Ce vendredi 5 août, cet Etat conservateur du nord du pays est en effet devenu le premier depuis l’annulation de Roe vs Wade à promulguer une loi interdisant l’avortement, sauf en cas de viol, d’inceste ou si la vie de la mère est en danger. Une loi qui entrera en vigueur le 15 septembre prochain, et que la Maison Blanche a fustigée par le biais de sa porte-parole, Karine Jean Pierre.
Il s’agit d’une nouvelle mesure radicale prise par des élus républicains pour priver les femmes de leurs droits et de leur liberté en matière de procréation” – Karine Jean Pierre pour la Maison Blanche.
Et d’exhorter “tous les Américains à faire entendre leur voix sur le sujet”, un message qui, contre toute attente, a visiblement été entendu jusque dans l’extrêmement conservateur Etat du Kansas, où les électeurs ont créé la surprise en se prononçant en faveur du maintien du droit à l’avortement lors d’un référendum organisé sur la question.
Contrer l’extrémisme
Une excellente nouvelle pour les femmes en âge de procréer qui habitent cet état du Midwest bordé par le Nebraska et le Missouri. Mais aussi, malheureusement, un tout petit pas pour les Américaines, qui voient leurs droits faire un grand pas en arrière depuis quelques semaines.
Et si la Maison Blanche a critiqué la décision du gouverneur de l’Indiana de virtuellement supprimer l’accès à l’IVG, outre-Atlantique, de plus en plus de voix s’élèvent pour dénoncer ce qui est perçu comme un manque de courage de la part du gouvernement Biden. Durant la campagne présidentielle, l’élu démocrate avait en effet promis de faire passer une loi protégeant l’avortement, assurant que bien qu’il s’agisse d’un élément de jurisprudence, Roe v. Wade « fait office de loi en vigueur pour le pays » et s’engageant à « combattre la moindre tentative d’aller à son encontre ». Paroles, paroles, paroles? Si le système politique américain limite quelque peu le pouvoir du locataire de la Maison Blanche, ce dernier ne manque toutefois pas de ressorts pour agir, et semblerait décidé à le faire, après avoir été vertement critiqué par son propre camp pour sa réponse “timorée” à l’annulation de Roe vs Wade.
Le 8 juillet dernier, Joe Biden a ainsi annoncé en compagnie de Kamala Harris avoir pris une série de mesures protégeant les cliniques mobiles pratiquant l’IVG aux frontières des Etats qui l’interdisent, mais aussi garantissant l’accès à la contraception, aux pilules abortives ainsi qu’à un réseau d’avocats bénévoles. Des mesures nécessaires, qui peinent toutefois à convaincre, une partie de l’opinion publique lui reprochant de ne pas avoir anticipé la décision de la Cour Suprême, pourtant annoncée près de huit semaines avant le vote de ses membres quand un mémo au sujet du droit à l’IVG a été leaké.
La réponse de Joe Biden? Appeler ses concitoyens à voter en masse aux législatives de novembre prochain, rappelant qu’il s’agit-là de la “voie la plus rapide” pour restaurer légalement le droit à l’avortement dans le pays, mais aussi pour contrer les projets “extrêmes” des Républicains quant à la vie privée des Américaines, ainsi que la Cour Suprême “hors de contrôle” qui les fait entrer en vigueur. Et le démocrate de 79 ans de promettre dans la foulée que si les Républicains devaient l’emporter aux législatives et passer une loi interdisant l’IVG dans tout le pays (ce qui n’est pas le cas actuellement, son application est juste laissée à l’appréciation de chaque Etat), il y mettrait son veto présidentiel.
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