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Pourquoi le changement de nom de Weight Watchers est un peu gros

Kathleen Wuyard

Depuis son lancement en 1963, Weight Watchers a aidé des millions de personnes à perdre du poids, dont plus de 30.000 utilisateurs actifs actuellement en Belgique. Et c’est désormais au tour du géant des régimes de s’alléger, en abandonnant 12 lettres pour devenir “WW”.


Un rebranding tout sauf innocent, et plutôt difficile à avaler. Officiellement, le changement de nom s’inscrit dans une volonté de la compagnie de faire face à la concurrence de la pléthore d’apps et de gadgets promettant d’aider à perdre du poids, et de se concentrer sur le wellness plutôt que sur la diète. En 2018, place au body positive et fini de se soumettre à des régimes punitifs pour tenter de soumettre à notre volonté un corps qui n’en fait au final qu’à sa tête. Plus que jamais, la société prône un esprit sain dans un corps sain, et ce fameux concept de wellness. Plutôt qu’un régime, on adopte une alimentation raisonnée, et on pense sur le long terme plutôt qu’à ce bikini dans lequel on veut absolument rentrer dans deux semaines. En public, du moins, car la réalité, c’est que quelques posts #acceptation et #bourreletsbienvenus sur Instagram ne suffisent pas à changer l’image négative qu’une personne se fera d’elle, et encore moins à faire disparaître le fat-shaming d’une société qui associe encore graisse et échec.

C’est d’ailleurs là le principe même de Weight Watchers: à chaque séance, on se pèse, avec applaudissements à la clef si on a perdu du poids, et remontrances devant l’assemblée si au contraire, on en a repris depuis la dernière pesée. Ainsi que l’a dénoncé une utilisatrice de longue date dans une lettre ouverte,

Weight Watchers qui devient WW, c’est comme si un loup revêtait un costume d’agneau, un soudain changement de refrain après des décennies de pesées publiques, d’humiliations constantes et d’attractions de nombreux membres, principalement des femmes, dans un cycle sans fin de régimes.


Sans faim, sans fin? Dans une interview, l’actrice (tout ce qu’il y a de plus fine) de Once upon a time Ginnifer Goowdin avouait ainsi en 2011 qu’elle suivait les principes de Weight Watchers depuis l’âge de 9 ans. Face au backlash qui avait suivi ses remarques, elle avait précisé que justement, elle n’avait jamais été au régime de sa vie, et certainement pas lorsqu’elle était enfant, et que c’était justement grâce à Weight Watchers. Une explication qui avait peiné à convaincre, et mis de l’huile dans le feu des critiques du mastodonte des régimes. En effet, selon des reportages d’investigation réalisés notamment par le New York Magazine et le magazine suisse Temps Présent, Weight Watchers serait plus efficace dans la prise d’inscriptions que dans la perte de poids. Les clients attribueraient en effet le succès de leur amincissement au programme, et quand ils reprennent du poids par après, ils s’en attribuent la défaite et se réinscrivent aussitôt. Plus préoccupant, selon une étude publiée en 2007 dans le British Journal of Nutrition, le taux d’échec à 5 ans du programme Weight Watchers atteindrait 84%.

Pas de quoi faire perdre l’appétit à une compagnie dont le chiffre d’affaires a atteint 1.45 milliards de dollars en 2017. D’ailleurs, pour Mindy Grossman, PDG de Weight Watchers alias WW, ce changement de nom n’est qu’une étape dans un plan pour croquer encore plus de parts de marché.

Nous n’abandonnons pas nos ambitions dans le secteur du régime sain, où nous resterons leader. Mais nous voulons être plus que cela en aiguillant nos abonnés vers des conseils pour manger de façon plus équilibrée et les guider dans leurs choix. WW est déjà connu de notre communauté puisque ce sont les initiales qui figurent sur notre application mobile. Il n’y a pas de changement radical.


Et pourtant, ce nouvel acronyme est diamétralement opposé au nom d’avant, ces “surveillants du poids” plutôt intimidants. Prononcé à voix haute en anglais, WW devient en effet “double u double u”, soit un double “double-toi”. Un message à contre-sens de l’objectif du programme, qui ne manquera pas de faire sourire celles qui comptent leurs points pour tromper la faim.

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