À COEUR OUVERT: ““J’ai été en couple avec un narcissique””
Pendant 4 ans, Stefanie, 31 ans, a eu une relation toxique avec Jelle, 41 ans. Après la énième rupture, elle a réalisé dans quel type de relation destructrice elle se trouvait et qu’elle avait affaire à un narcissique. Elle raconte l’impact de cette relation, qui laisse encore des traces profondes.
« Cet homme va m’amener des problèmes. Sans même avoir échangé un mot, ce fut la première impression que j’ai eue de Jelle lorsque je l’ai vu à une fête. Après coup, j’aurais dû écouter mon intuition, mais c’est trop tard. Quand j’ai réalisé que Jelle connaissait quelques-uns de mes amis, nous avons commencé à discuter. Malgré une différence d’âge de 10 ans, nous semblions parler le même langage et être sur la même longueur d’onde. Ce soir-là, nous ne nous sommes pas quittés. Nous avons échangé nos numéros et, lorsque nous nous sommes revus, ce fut le coup de foudre. Notre relation a commencé comme un conte de fées. Il savait comment appuyer sur les bons boutons. Jelle était affectueux et charmant. Il savait quoi dire pour faire battre mon cœur. J’étais impressionnée par lui, et lui par moi. Il me traitait comme une princesse, m’adorait et me mettait sur un piédestal. Et avouons-le: quelle femme n’aime pas être admirée? Je ne pouvais que tomber follement amoureuse de lui.
Il me donnait l’impression d’être l’amour de sa vie et même plus que ça. J’étais son âme sœur, sa moitié. Durant les 6 premiers mois de notre relation, j’étais sur un petit nuage, mais tout a changé quand Jelle a soudainement disparu sans laisser de trace, suivi d’une période de silence radio total.
Quand j’envoyais des messages, il ne répondait pas. Mes appels restaient sans réponse et quand je sonnais à sa porte, il ne m’ouvrait pas. Je ne comprenais pas pourquoi il avait cessé de donner signe de vie. Seuls ses réseaux sociaux montraient qu’il avait supprimé toutes les photos et messages me concernant. J’étais en état de choc, mais je voulais surtout comprendre. Après beaucoup d’insistance, Jelle a finalement donné signe de vie. Il a dit qu’il avait des sentiments pour une collègue avec qui il avait eu une relation avant que nous nous mettions en couple. J’étais enfin fixée, ma plus grande peur était devenue réalité. J’avais le cœur brisé, mais j’ai décidé de laisser partir Jelle. On ne choisit pas de qui on tombe amoureux et je ne pouvais pas le forcer à m’aimer. J’ai essayé de continuer sans lui, jusqu’à ce qu’il m’annonce, 3 semaines plus tard, qu’il avait commis la plus grande erreur de sa vie et que je lui manquais. Il prétendait qu’il ne pouvait pas vivre sans moi et qu’il voulait redonner une chance à notre relation. J’étais encore follement amoureuse de lui, j’étais aux anges.
Comme un boomerang
Je lui ai donné une deuxième chance, mais peu à peu, j’ai eu l’impression de ne plus avoir affaire au même Jelle. De jour en jour, il devenait plus distant et négatif. Et puis il cachait son téléphone. J’avais le sentiment qu’il parlait à d’autres femmes, mais quand j’en parlais, il prétendait que c’était des copines et que j’étais parano. Quand il rentrait de soirée avec des marques sur le cou et le dos, il affirmait qu’il avait été victime de violence gratuite. Il avait toujours une excuse pour tout et réussissait chaque fois à me manipuler.
Un des premiers incidents majeurs dont je me souviens est survenu à l’approche de son anniversaire. Il voulait le fêter en grande pompe et souhaitait acheter une toute nouvelle tenue pour marquer le coup. Quand j’ai moi aussi voulu faire un peu de shopping pour moi, il a remarqué que le sac contenant des vêtements hors de prix avait disparu. Ce sac était introuvable et, selon lui, c’était de ma faute. Il était très en colère et m’a obligée à racheter la même tenue pour plus de 700 euros, ce que j’ai fait par culpabilité. À partir de ce moment, il m’a de plus en plus rabaissée avec des remarques telles que ‘Tu ne vaux rien, surtout sans moi’ et ‘Tu n’es vraiment pas très maligne’, pour ensuite me flatter et finalement revenir à ce même comportement.
Chaque fois qu’il faisait quelque chose de mal, la responsabilité en retombait toujours d’une manière ou d’une autre sur moi. Même lorsqu’il n’était pas au meilleur de sa forme, c’était de ma faute, et il savait mieux que quiconque me le faire croire.
Un jour, il était adorable et me traitait comme une princesse, et le lendemain, il me rabaissait complètement et me quittait pour la énième fois. Après chaque rupture, il revenait comme un boomerang et je choisissais de le reprendre, car j’étais convaincue que je ne pouvais pas vivre sans lui. Notre relation était une spirale infernale où les incidents s’accumulaient. Les choses ont empiré lorsqu’il a emménagé chez mes parents. Jelle ne payait jamais de factures ni de frais de logement, mais exigeait que je sois à la maison avant son retour du travail et que je prépare chaque soir le repas qu’il souhaitait. Je m’exécutais toujours. Mes parents m’ont plusieurs fois parlé de son comportement, mais je ne voulais rien entendre. Malgré tout, Jelle restait l’homme de ma vie, même après m’avoir laissée dans un bar alors que j’avais un pied cassé et que j’étais sans argent tout ça parce que l’attention n’était pas assez centrée sur lui.
Avec du recul
Durant les 2 dernières années de notre relation, il ne m’accordait presque plus un regard, et ne me touchait plus. Même un câlin était trop demander, et il n’était plus du tout question d’intimité ou de sexe. Lorsque j’abordais ce sujet la peur au ventre, il répondait qu’il ne me trouvait plus attirante parce que j’avais pris du poids. Mon embonpoint était pour lui une énorme déception, même s’il explosait de jalousie quand d’autres hommes me regardaient. Pourtant, c’était lui qui me trompait d’innombrables fois.
Pourquoi me suis-je laissée humilier et ai-je constamment dépassé mes limites? Je n’ai pas de réponse. J’étais jeune et naïve.
Les mauvais moments ne pesaient pas autant que les bons moments que Jelle et moi partagions. Dans mon subconscient, je savais probablement déjà que son comportement était loin d’être acceptable, mais ce n’est qu’après avoir pris mes distances pour de bon que j’ai réalisé à quel point notre relation était toxique et que j’avais affaire à un narcissique. Ce n’est qu’après un tsunami dévastateur que l’on prend pleinement conscience de la gravité de la situation. Pendant longtemps, trop longtemps, j’ai observé tout ça avec du recul, comme si je n’étais pas celle qui le vivait. De plus, je suis très empathique. Je suis du genre à prendre soin des autres, ce qui fait de moi une proie facile pour une personnalité narcissique. Puisque Jelle avait été victime de harcèlement dans le passé et avait aussi ses bons moments, j’avais toujours une raison d’excuser son comportement ou au moins de tenter de le comprendre.
C’est finalement au bout de 4 ans que notre relation a pris fin à cause de ma mère. Jelle lui avait dit à plusieurs reprises qu’il ne voyait pas d’avenir avec moi, et comme il ne m’en parlait pas à moi, elle l’a confronté. Un jour, en rentrant chez moi, toutes ses affaires avaient disparu. C’était comme s’il n’avait jamais vécu là. Ce fut un choc brutal, mais en même temps, j’ai ressenti comme un poids qui s’enlevait de mes épaules et j’ai pu, pour la première fois, me dire que je méritais mieux. Un mois plus tard, il est revenu à la porte. Il avait été opéré et me demandait si je voulais m’occuper de lui jusqu’à ce qu’il aille mieux. Il était culotté, mais je dois admettre que je l’ai fait, bien que nous n’étions plus en couple.
Pressée comme un citron
Quand j’ai finalement eu le courage de tourner le dos à Jelle pour de bon, ma vie a repris son court comme si de rien n’était. Je m’amusais et vivais à 200 à l’heure, on me pensait très forte, mais les apparences sont trompeuses, car il y a 3 ans, la réalité m’a rattrapée. Lorsque j’ai eu affaire à un manager narcissique au travail, tout le mal que j’avais vécu avec Jelle et tous les sentiments associés ont refait surface. Peu de temps après, j’ai complètement craqué. Pendant un an et demi, je n’étais plus capable de fonctionner. Je n’ai pas eu d’autre choix que de chercher de l’aide psychologique. Lorsque vous vous retrouvez soudainement face à un mur, vous cacher n’est plus une option. Vous êtes alors obligé de vous écouter et de commencer enfin ce processus de guérison indispensable. Cela a été incroyablement difficile. C’est peut-être la chose la plus difficile que j’aie eu à faire dans ma vie jusqu’à présent, surtout parce que j’ai réalisé à quel point l’impact sur moi et sur tout mon entourage était énorme. Il ne m’a pas seulement pressée comme un citron, il a aussi profité de mes parents.
Une personne narcissique laisse des cicatrices profondes, tout le monde le sait pour avoir eu affaire à elle dans sa vie.
Quand je remarque qu’un ami ou une amie est avec quelqu’un qui me rappelle Jelle, je n’hésite pas une seconde à m’exprimer à ce sujet. C’est un sentiment de devoir, car je ne veux en aucun cas que mes proches subissent les mêmes souffrances. 5 ans après notre rupture, je ne suis pas encore remise, mais j’ai le sentiment que je vois doucement le bout du tunnel. La plupart du temps, je vais relativement bien. J’ai réussi à me reconstruire à partir des décombres, bien que je sois consciente qu’il y a encore du travail à faire, mais c’est OK. Rome ne s’est pas construite en un jour.
J’espère pouvoir, tôt ou tard, améliorer mon estime de moi-même et ma valeur personnelle, et pouvoir enfin arrêter définitivement de prendre des antidépresseurs. Après ma chute, j’ai symboliquement commencé un nouveau chapitre, et j’ai hâte d’écrire les pages suivantes. Je sais que je mérite tellement mieux et je me sens prête pour la vie et l’amour.
Bourreau persécuteur
Je ne perds pas ma foi en l’amour, mais j’ai une peur bleue de retomber un jour dans une relation toxique. Ce n’est pas que j’ai plus de mal aujourd’hui à faire confiance aux autres hommes ou à tous les mettre dans le même panier. Heureusement, j’ai réussi à me libérer de ça. Mais je suis très vigilante aux signes d’alarme tels qu’un manque d’empathie, la manipulation, une confiance en soi excessive, les critiques ou un côté profiteur. Je remarque également que je suis plus méfiante que la moyenne des gens. Quand je repère des signaux qui pourraient indiquer du narcissisme, la sonnette d’alarme s’enclenche immédiatement. En raison de mon passé, je me pose automatiquement beaucoup plus rapidement la question de savoir si quelqu’un a une personnalité narcissique. La fréquence du narcissisme est difficile à déterminer, mais j’ai l’impression qu’il y a beaucoup de narcissiques dans ce monde... Quand je vois combien d’abonnés quelqu’un comme Andrew Tate (un célèbre influenceur connu pour son côté narcissique, ndlr) a, ça me décourage. Je suis donc devenue extrêmement sélective, ce qui explique probablement pourquoi je suis célibataire et que je n’ai pas tenté une nouvelle relation depuis ma rupture avec Jelle. Je sors parfois avec des gens, mais dès le début, je pose mes limites et je me montre assertive. J’essaie de ne pas laisser mon passé m’envahir, mais il me colle à la peau et je crains que cette blessure ne guérisse jamais complètement.
Avant d’être en couple avec Jelle, j’étais déjà assez complexée. Il m’arrive encore de me dire que je ne réponds pas aux soi-disant critères de beauté et que tout homme croisant mon chemin ne me trouve pas attirante. Malheureusement, je crois encore trop souvent toutes les choses terribles que Jelle m’a dites à l’époque. Et malgré le fait que j’en ai pris conscience, je n’arrive pas à m’en défaire pour une raison quelconque. J’essaie de me convaincre du contraire, mais jusqu’à aujourd’hui, il y a une petite voix dans ma tête qui diffuse ce genre de messages en continu. Jelle a créé une sorte de bourreau persécuteur qui reste dans ma tête, mais je suis sûre que je pourrai le faire taire un jour. Je suis convaincue que je suis plus forte. »
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