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TÉMOIGNAGES: ““Je suis DJ et maman””

Justine Rossius
Justine Rossius Journaliste

Alors que pour la plupart des jeunes parents, la vie nocturne n’est plus que de l’histoire ancienne, Lizy, Jolien et Kisa continuent de mixer leurs sons et de s’occuper de leur poupon.

Jolien, 37 ans, est maman et connue sous son nom de DJ J.ROOTS

Sous le nom de DJ J.ROOTS, Jolien parcourt la ­Belgique en jouant des sons R&B et hip-hop qui font danser les foules. Pour l’instant, elle est encore en congé de maternité, mais dès l’été prochain, elle sera de retour dans vos festivals préférés. Quand elle ouvre la porte, elle nous accueille avec une adorable petite fille dans les bras. Celle qui se fait ­appeler J.ROOTS derrière les platines combine ses deux jobs de rêve: DJ et maman. La grossesse est physiquement très dure, surtout quand on court d’un club à l’autre à des heures impossibles. « En novembre, j’ai arrêté de jouer sur les conseils de mon gynécologue. Quand on est enceinte, on dort moins bien et rester debout aussi longtemps est fatigant. Et puis votre ventre n’est pas assez épais pour protéger votre bébé ­d’éventuelles lésions auditives. » Bye bye la vie nocturne, bonjour le sommeil! Celles et ceux qui étaient présent·e·s à WECANDANCE l’été dernier ont pu voir J.Roots jouer pour la première fois depuis son premier accouchement.

J’étais encore en train d’allaiter à l’époque, mais j’étais préparée: un tire-lait dans la voiture et une place de parking à proximité de la tente où je devais jouer, ce qui me permettait de rentrer ­directement à la maison après le concert.

J’avais un peu trop surestimé tout ça, car je n’avais pas le temps de ‘tirer tranquillement mon lait dans la voiture’. Après mon concert, qui a duré deux heures et demie, mes seins explosaient. À la maison, j’ai immédiatement sauté dans la douche pour soulager la tension sur mes seins avec de l’eau chaude. Mais je ­n’oublierai jamais ce set: la tente était – comme mes seins – sur le point d’exploser (rires). J’étais enfin de nouveau ­derrière les platines, avec Hakim, le père de mon enfant, à côté de moi, et devant moi une foule en délire qui est ­devenue complètement folle lorsque j’ai montré une vidéo de notre fils. »

Une maman DJ qui s’affirme

L’univers DJ met-il des choses en place pour les jeunes ­mamans DJ en Belgique? « Non! En tant que DJ, vous devez exprimer vous-même vos souhaits. Ce n’est pas comme ­s’il y avait une salle d’allaitement prévue par défaut. ­Heureusement, je ne suis pas du genre timide et j’ose en demander une, mais ce n’est pas le cas de tout le monde. Ajoutez à cela le fait qu’en tant que DJ, vous n’êtes pas traité de la même manière qu’un artiste. Les DJ n’ont généralement pas de loge privée, alors si vous voulez tirer votre lait, vous vous contentez d’une toilette pas trop sale (rires).» Et bien que la maternité et la ­musique semblent ne pas faire bon ménage, Jolien ne se laisse pas ­abattre. « Heureusement, j’ai de bons bookers, qui savent que je n’ai pas l’intention d’arrêter d’être DJ. Je suis toujours la même, il faut juste que je planifie un peu mieux mon emploi du temps. Nous avons aussi un bon réseau et une excellente nounou, qui travaille les week-ends et fait des ­gardes de nuit. Elle mérite une ­médaille! Avec deux parents DJ, on ne peut s’empêcher d’avoir des enfants musiciens, pas vrai? Nous aimerions envoyer notre fils Idris dans un jardin d’enfants où la musique occupe une place centrale. Nous ne voulons pas le forcer, mais on sent qu’il a le sens du ­rythme. ­Aujourd’hui, je l’entends même chanter lorsqu’il se réveille le matin, c’est la chose la plus mignonne qui soit! »

Cet été, découvrez les sets de J.ROOTS à Ostende Beach et WECANDANCE.

Lizy, 28 ans, est reine des platines et des couches

Elle connaît tout de la scène, des soirées et des ­festivals, mais dans le monde des mamans, elle est encore débutante! Lizy, 28 ans, aka DJ Lizaay joue du R&B, du hip-hop, de l’afrobeat et du dancehall. « Ce n’est pas comme si je ­n’allais plus que jouer Baby Shark, à moins qu’il n’y ait un bon remix (rires). À la maison, il y a toujours de la ­musique: congolaise, religieuse, des morceaux que je joue et ceux que mon ­conjoint écoute. Notre fils a déjà une large palette musicale et y est très sensible: s’il pleure, on arrive souvent à le calmer en chantant! » Mais pour les premiers pas de danse, ça attendra, car DJ Lizaay est devenue maman pour la première fois il y a seulement quatre semaines.

Lorsque j’ai appris que j’étais enceinte, j’ai donné un concert le soir même, ce qui était très particulier. 

Pendant les six mois qui ont suivi, Lizaay a continué à jouer. « Les hormones envahissaient mon corps et j’étais très fatiguée. L’odeur des cigarettes et de l’alcool n’était pas très agréable non plus. »

Le lait et les platines 

Maintenant qu’elle est mère, Lizy n’envisage pas d’arrêter sa carrière de DJ. « C’est mon premier bébé, je suis curieuse de savoir comment je vais combiner ma carrière de DJ et la maternité. Pour l’instant, j’ai l’intention de recommencer à jouer d’ici l’été. Je souhaite me consacrer principalement aux festivals et aux événements qui se déroulent pendant la journée. Trois mois avant la ­naissance du bébé, j’ai arrêté de faire de la ­musique et je sens que ça me manque. Heureusement, mon petit ami et moi avons des parents prêts à nous aider en cas de besoin. » Lizy ne compte pas allaiter juste avant ou après avoir joué un set. « Pour moi, il est évident que j’arrêterai d’allaiter si je vais derrière les platines. Lorsque vous tirez votre lait, vous voulez être dans un environ­nement agréable et chaleureux, et les backstages ne me semblent pas être le bon endroit. Il y a aujourd’hui beaucoup plus de femmes DJ ­qu’auparavant, mais j’ai toujours ­l’impression que la plupart d’entre elles arrêtent lorsqu’elles ont des enfants. Je pense que c’est aussi l’une des raisons pour lesquelles ça reste principalement un monde d’hommes. Même si je vois beaucoup plus de mères DJ aux Pays-Bas. Je comprends, en tant que mère, vous êtes plus limitée dans vos choix, votre bébé dépend de vous. Les pères ne doivent pas allaiter! »

Vous pourrez danser sur les beats de Lizaay cet été à WECANDANCE, entre autres.

Tomorrowland, Ibiza, Tenerife, Paris... DJ Kisa y a joué!

Être enceinte derrière les platines, Isabel aka Kisa sait ce que c’est. « Jusqu’à deux semaines avant l’accouchement, je jouais encore. Je tenais à peine derrière ma platine, mais la sensation du bébé qui bougeait dans mon ventre n’avait pas de prix. Très tôt, on m’a conseillé de cacher ma ­grossesse. Mes collègues internationales savaient par ­expérience qu’une DJ enceinte n’obtenait plus de contrats. Malheureusement, elles ont eu ­raison. Pendant trois ans, j’ai travaillé comme DJ résidente dans une boîte de nuit à l’étranger. Le lendemain du jour où j’ai annoncé ma grossesse, j’ai reçu un coup de fil me disant que je ne devais plus venir. Je n’ai jamais eu de véritable explication. Après ça, j’ai délibérément caché ma grossesse à mes bookers et promoteurs. »

S’occuper de son bébé tout en ­travaillant dans le milieu de la nuit est peu pratique et, surtout, épuisant. « Une fois Imani née, j’ai réussi à combiner la maternité et le métier de DJ. Ibiza, Barcelone, la Suisse...

Partout où je devais jouer, ­j’emmenais une baby-sitter avec moi. Je ne partais pour l’événement que lorsque Imani était endormie et j’étais de retour à l’hôtel avant qu’elle ne se réveille.

J’étais ­tellement sous l’effet de l’adrénaline que j’ai continué. Avoir un enfant et se mettre immédiatement au travail est une tâche écrasante et physique qu’il ne faut pas sous-estimer: tirer mon lait dans toutes sortes d’endroits, voyager, jouer mes sets, être là pour mon bébé.... Aujourd’hui, Imani a 4 ans et va à l’école. Comme je dois faire en fonction d’horaires fixes, il m’est devenu plus difficile de jouer ­régulièrement à l’étranger, comme j’en avais l’habitude. Mais pendant les deux premières années de la vie d’un ­enfant, le job de DJ est quand même plus facile à combiner avec mon rôle de maman qu’avec un travail classique. Quand Imani n’allait pas encore à l’école, je préparais mes sets pendant la semaine et je restais à la maison avec elle. Maintenant qu’elle va à l’école, je combine un emploi de 9 à 5 avec ma vie de maman et de DJ. Le week-end, je fais garder ma fille lorsque je dois jouer dans des clubs, et ­lorsque je termine, je passe encore une journée entière avec elle. Le soir, je suis épuisée, mais c’est le prix à payer! »

Une maman moins bookée

Devenir mère n’a pas seulement ­bouleversé sa vie, ça a aussi changé les priorités de DJ Kisa. « J’avais une belle carrière de DJ et ma propre maison de production à Barcelone, mais aujourd’hui, c’est le bien-être de mon enfant qui prime. C’est une ­évidence pour moi. Même si c’est par la force des choses vu que je suis mère célibataire, c’est un choix ­conscient de faire passer mon enfant en premier. Je remarque que depuis que je suis mère, les réservations sont moins nombreuses, même si je ne veux pas mettre ça uniquement sur le compte de la maternité. Après avoir construit une carrière à ­Barcelone, j’ai dû repartir de zéro ici. Tout à coup, je me suis retrouvée en Belgique avec un bébé dans les bras et les commentaires du style: ‘Isabel est maman, elle va donc devoir arrêter ­d’être DJ’. » Pendant la séance photo, Imani se met à danser sur la musique. On voit bien de qui elle tient ça. « Imani ­deviendra ce qu’elle voudra plus tard, mais je remarque que la musique fait partie intégrante de sa vie de manière très naturelle. Elle a un super rythme et ne se contente pas d’écouter des chansons pour enfants. C’est formidable de partager ma plus grande passion avec l’amour de ma vie. »

DJ Kisa sera présente au Hip Hop Hooray à Gand les 21 juin et 16 juillet.

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