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© Getty Images/PhotoAlto

Ces femmes ont choisi d’arrêter la pilule, elles nous expliquent pourquoi

Justine Rossius Journaliste
Ana Michelot Journaliste

Plus de 60 ans après la création de la pilule, de plus en plus de femmes font le choix d’arrêter de la prendre. Nous avons voulu comprendre cette décision en allant à leur rencontre.

Dans les années 1960, la première pilule contraceptive est mise en vente libre. Une étape importante dans la liberté sexuelle des femmes. Plus de 60 ans plus tard, la pilule est toujours le contraceptif le plus utilisé, mais elle perd peu à peu en popularité. De plus en plus de femmes optent pour l’arrêt de cette petite pilule, et nous avons cherché à savoir pourquoi.

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Plus de liberté

Ina Van Ransbeeck, sexologue: « On parle beaucoup des effets de la contraception hormonale (comme le stérilet hormonal, la piqûre ­hormonale, la pilule contraceptive orale, le patch ou l’anneau vaginal) sur notre corps et sur notre santé ­physique et mentale. D’une part, les formes de contraception fiables présentent de nombreux avantages: elles offrent une plus grande liberté sexuelle (et donc une vie sexuelle plus sereine), protègent contre les ­grossesses non désirées, soulagent les douleurs pendant les règles, nous font moins souffrir du syndrome ­prémenstruel et donnent la possibi­lité de réguler nos menstruations nous-mêmes.

J’ai pris la pilule pendant des années et j’ai vu la différence sur mon humeur et ma libido.

Pourtant, tout le monde n’est pas entièrement satisfait de cette contraception. J’ai moi utilisé la pilule pendant de nombreuses ­années et j’ai constaté une différence dans mon humeur et ma libido. ­Certaines femmes l’utilisent depuis si longtemps qu’elles n’ont aucune idée de comment elles se sentiraient sans. D’autres commencent à l’utiliser à un jeune âge, ce qui rend encore plus difficile de savoir si elle impacte leur corps et leur humeur. Bien entendu, une femme n’est pas l’autre. ­Certaines ne remarquent que très peu ses effets, et toutes ne sont donc pas confrontées de la même manière à ses inconvénients potentiels.

À volonté

La contraception hormonale contient des hormones qui empêchent de tomber enceinte. En prenant ces hormones (avec la pilule, le patch et l’anneau vaginal), vous n’avez plus d’ovulation, ce qui empêche la nidation d’un ovule fécondé. De plus, les spermatozoïdes ne peuvent pas traverser la glaire du col de ­l’utérus. Avec certaines formes de ­contraception hormonale, comme le stérilet hormonal, l’ovulation a ­toujours lieu, mais l’hormone ­progestative empêche l’ovule ­fécondé de se nicher dans l’utérus. Lorsqu’elle est utilisée correctement, la contraception hormonale est une forme fiable de contrôle des ­naissances. Attention: aucun de ces moyens de contraception ne vous protège des MST et IST. »

Hormones en folie

Axelle: « J’ai arrêté la pilule – que j’avais prise 10 ans d’affilée – pendant moins d’un mois, et presque tout de suite, j’ai ressenti une augmentation remarquable de ma libido. Du moins pendant les 2 premières semaines de mon cycle. Après mon ovulation, elle chutait à nouveau pendant un certain temps, jusqu’à ce qu’elle grimpe et que je reconnaisse le même schéma au cours du cycle suivant. »

Stéphanie: « Ma meilleure amie et moi avons arrêté de prendre la pilule en même temps, après avoir conclu, au fil de nos conversations, que nous étions confrontées à des effets ­secondaires négatifs similaires: mauvaise circulation sanguine, sautes d’humeur, sentiment de ne pas être à l’aise dans notre peau en raison d’un déséquilibre hormonal... Presque immédiatement, j’ai commencé à remarquer des changements. Ça peut sembler cliché, mais je me suis sentie davantage moi-même.  »

J’avais l’impression d’être beaucoup plus équilibrée dans la vie, que mon corps était beaucoup plus calme et que je me contrôlais mieux.

Sarah: « Je ne peux pas reprocher à mon amoureux de plaisanter à propos de mon irritabilité à certaines périodes du mois. Comme je ne prends pas d’hormones, mon humeur connaît des hauts et des bas. Mais cela me fait du bien. Au final, c’est qui je suis réellement, sans filtre! »

Sam: « C’est peut-être juste une impression, mais je me sens plus en contact avec mes émotions depuis que j’ai arrêté de prendre la pilule. J’ai aussi quelques années de plus, ce qui a bien sûr un impact sur mon tempérament. En revanche, ces émotions sont parfois beaucoup plus intenses et je ne les maîtrise pas toujours. Avant, c’était moins un problème. »

Louise: « Depuis que j’ai arrêté de prendre la pilule, je suis parfois beaucoup plus sensible à la saleté. Si quelqu’un sent mauvais, si la maison est trop en désordre, si mon amant ne prend pas assez soin de lui à mon goût ou si j’ai moi-même l’air trop négligé pendant une journée, je peux être agacée et réagir de façon ­excessive. Je suis alors prise d’une frénésie de nettoyage et je peux même jeter plein de choses. »

D’où ça vient?

Ina Van Ransbeeck, sexologue: « Il est vrai que les hormones contenues dans les contraceptifs peuvent affecter les zones de notre cerveau qui régulent nos émotions. Du coup, cela peut entraîner des sautes d’humeur ou une humeur moins joyeuse. Cette dernière peut à son tour affecter notre libido, car si l’on ne se sent pas bien dans sa peau, on n’a généralement pas envie de faire l’amour. Cependant, il est important de savoir que votre humeur et votre libido dépendent de nombreux facteurs et que nos hormones n’en sont qu’une partie. Ce n’est donc pas parce que vous avez (brièvement) moins envie de sexe ou que vous vous sentez plus ou moins bien dans votre peau que cela est automatiquement dû à la contraception que vous prenez ou pas. Il s’agit souvent d’une combinaison de facteurs.

Si vous avez soudain moins envie de faire l’amour depuis que vous prenez la pilule contraceptive, c’est peut-être parce que celle-ci a un impact négatif sur notre taux de testostérone, l’hormone qui nous rend sensibles aux stimuli sexuels et, par conséquent, sur notre libido. Ces effets peuvent se produire non seulement avec la pilule contraceptive, mais aussi avec le stérilet hormonal, par exemple. Toutefois, avec un stérilet hormonal, les hormones propres au corps sont moins aplaties et le cycle n’est pas supprimé comme c’est le cas avec la pilule. L’expérience soudaine d’une baisse de la libido due à l’utilisation d’une contraception hormonale ne doit pas conduire à cesser de l’utiliser et à avoir des rapports sexuels non protégés. Pour savoir quel contraceptif vous convient le mieux, je recommande de prendre contact avec votre médecin ou gynécologue et de discuter de la forme de contraception qui vous convient le mieux. Car les effets ­physiques et ­psychiques de la contraception ­varient d’une personne à l’autre. »

Un mauvais moment

Mélissa: « Lorsque j’ai arrêté de prendre la pilule, mes règles ont d’abord été plus irrégulières, mais elles sont aussi devenues plus fortes et j’ai souffert davantage de crampes et de douleurs menstruelles. En revanche, le fait de devoir ­surveiller moi-même le moment de mes règles m’a permis d’apprendre à mieux écouter les signaux de mon corps: j’ai ressenti une meilleure connexion entre mon corps et mon esprit. »

Naomie: « Depuis que j’ai arrêté la ­pilule, j’ai des crampes abdominales et dorsales ainsi que des maux de tête à l’approche de mes règles. Cela me rappelle qu’il faut que je fasse des réserves de serviettes hygiéniques et de tampons. Je perds aussi beaucoup plus de sang le 2e jour, si bien que je dois parfois combiner un tampon et une serviette hygiénique pour éviter les fuites. Mais le lendemain, ça va toujours beaucoup mieux! »

Céline: « Je me sens plus ’femme’ depuis que j’ai à nouveau mes règles. Avant, je prenais la pilule et je n’avais quasiment pas de saignements. »

Maintenant que j’ai à nouveau mes règles, je me sens plus connectée à moi-même.

Aya: « Depuis que j’ai arrêté de prendre des contraceptifs ­hormonaux, je me rappelle à quel point mon comportement ­alimentaire est lié à mon cycle. J’ai de nouveau de fringales, surtout la ­semaine qui précède mes règles. J’ai alors envie de chocolat, de sucre, de sel, de nourriture réconfortante... Après cela, je ressens le besoin de me ’désintoxiquer’ pendant un moment et de manger sainement. Ces variations n’étaient pas évidentes lorsque je prenais encore la pilule. »

D’où ça vient?

Luc Baetens, gynécologue: « De nombreuses femmes qui utilisent une contraception hormonale connaissent moins de saignements et de troubles menstruels. Certaines femmes choisissent même de ne pas avoir de règles du tout. Cela peut être une solution lorsque les symptômes menstruels restent importants malgré la prise de la pilule. Vous pouvez alors choisir de continuer à prendre votre pilule ou d’utiliser un stérilet hormonal. Pour de nombreuses femmes, les règles s’arrêtent alors complètement. Attention: toutes les pilules ne permettent pas de passer aussi facilement d’une plaquette à l’autre. Si vous avez une pilule dont la plaquette est divisée en trois semaines, il n’y a pas de problème. Cependant, certaines plaquettes contiennent différents types de pilules avec différentes concentrations d’hormones pour certains jours du cycle. Dans ce cas, la prise de la pilule demande plus d’attention et il est préférable d’en discuter d’abord avec votre gynécologue. »

Ina Van Ransbeeck, sexologue: « Il existe certainement des avantages à bien connaître son cycle naturel (et à le suivre grâce à une application comme Flo, par exemple). Il est alors plus facile de savoir d’où viennent certaines expériences (comme les sautes d’humeur, les fringales, les plaintes...), de vivre en conséquence ou d’en tenir compte. C’est ainsi que l’on parle parfois des 4 saisons du cycle. Mais même si vous choisissez de suivre votre cycle naturel, il est important de vous protéger contre les grossesses non désirées et les IST et d’avoir des rapports sexuels protégés. »

Dans la culotte

Marjolaine: « Depuis que j’ai arrêté de prendre la pilule, j’ai parfois l’impression d’avoir à nouveau mes règles dans la semaine qui suit, mais sous une forme transparente et visqueuse. Comme toutes les femmes, j’ai toujours eu des pertes blanches, mais maintenant je remarque que je perds beaucoup plus de mucus au moment des menstruations. C’est comme si j’étais constamment excitée et mouillée, alors que ce n’est pas le cas. »

D’où ça vient?

Ina Van Ransbeeck, sexologue: « Sans contraception, vous avez plus de fluctuations hormonales et vous suivez votre cycle naturel. Sans pilule, vous avez également une autre ­ovulation. Souvent, vous remarquerez que juste avant l’ovulation, les pertes sont plus abondantes, plus ­visqueuses et légèrement plus ­transparentes. L’examen de la glaire utérine peut également vous aider à déterminer, par exemple, le moment de l’ovulation. C’est ce qu’on appelle la symptothermie. Elle est également logique d’un point de vue biologique: le moment juste avant l’ovulation est le meilleur pour avoir des rapports sexuels si vous voulez tomber enceinte, et la composition de cette glaire est ’optimale’ à ce moment-là pour que les spermatozoïdes puissent se frayer un chemin plus facilement. Si vous prenez la pilule, vous ne remarquez pas autant ces différences de sécrétions, parce qu’il n’y a pas de fluctuations aussi fortes et parce que votre ovulation est tout simplement supprimée. »

Testostérones

Emma: « Je pense que c’est un concours de circonstances, mais depuis que j’ai arrêté la pilule, à certains moments de mon cycle, je suis très forte physiquement, je peux faire beaucoup de sport et j’ai l’impression de pouvoir déplacer des montagnes. À d’autres moments, j’ai l’impression de pouvoir à peine bouger. Je ne me rappelle pas avoir constaté un tel contraste avant. »

D’où ça vient?

Luc Baeyens, gynécologue: « L’utilisation de contraceptifs tels ­que la pilule ou le stérilet hormonal supprime en grande partie les ­différences naturelles de ­concentration d’hormones et ­reproduit les fluctuations hormonales. Vos hormones sont alors souvent plus équilibrées, ce qui réduit l’impact de votre cycle sur vos performances sportives. Votre cycle menstruel peut en effet avoir un impact, car vous produisez différentes hormones dans les différentes phases de votre cycle qui affectent vos performances et votre vulnérabilité aux blessures. Cependant, il ne s’agit pas d’un cas unique. Chaque femme est différente, tout comme chaque cycle et chaque incidence. Par conséquent, le conseil le plus important reste le suivant: écoutez votre corps. »

SOS: peau d’ado!

Nour: « Je reste fidèle à ma décision d’arrêter la pilule et d’opter pour un stérilet hormonal, mais depuis ce changement, j’ai davantage de ­boutons. Ils apparaissent aussi plus vite lorsque je mange quelque chose de pas sain ou que je bois un verre de trop. Avant, quand je prenais la pilule, je ne souffrais pas du tout de cela. Je suis frappée par le fait que ces changements vont de pair. »

D’où ça vient?

Ina Van Ransbeeck, sexologue: « On entend souvent dire que les jeunes femmes commencent à prendre la pilule parce qu’elles souffrent d’acné. Cela est lié à la production (excessive) de sébum. L’une des causes de la production de sébum est l’hormone testostérone. En prenant la pilule, la production de testostérone est supprimée et les fluctuations ­hormonales sont moindres. C’est pourquoi la pilule peut parfois ­soulager l’acné. Mais certaines formes de contraception, comme le stérilet hormonal, peuvent provoquer de l’acné. Il est donc important d’en ­parler à votre médecin. »

La charge mentale

Charlène: « J’ai arrêté de prendre la pilule pour le stress que ça ­m’apportait. Prendre la pilule à la même heure chaque jour est une grande responsabilité. J’avais du mal à ne pas oublier. La panique qui s’ensuivait était si forte que j’ai même opté plusieurs fois pour la pilule du lendemain. Aujourd’hui, j’ai fait placer un stérilet hormonal et je suis beaucoup plus à l’aise. »

D’où ça vient?

Ina Van Ransbeeck, sexologue: « Il existe de nombreuses formes de contraception. Chaque corps est unique et vivra différents avantages et inconvénients. Sur Sofelia.be/nos-dossiers-thematiques/dossier-contraception, vous trouverez un aperçu clair et complet des différentes options et pourrez lire des informations sur chacune de ces méthodes, leur fonctionnement et leurs effets. Discutez toujours de votre choix avec votre médecin ou votre gynécologue. 

Bon à savoir

Chaque femme, chaque corps est différent. Vous seule pouvez savoir ce qui vous convient et ce qui vous permet de vous sentir au mieux de votre forme. Vous avez des doutes sur l’utilisation de la pilule ou d’un autre contraceptif? Dans ce cas, discutez-en d’abord avec votre médecin généraliste ou votre gynécologue et laissez-les vous guider dans votre recherche de la méthode contraceptive qui vous convient le mieux.

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