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Il·elle·s nous racontent leur transition vers le véganisme

Justine Rossius
Justine Rossius Journaliste

De fans de viande à végétaliens: Moenia, Lily et Ben ont choisi un mode de vie essentiellement vegan, après avoir mangé de la viande durant des années. Un manque se fait-il sentir et si oui lequel? Comment ce nouveau régime a-t-il changé leur vie? Et quel met végétalien peut rivaliser avec le steak ou le poulet rôti savoureux?

Elle est cheffe cuisinière végétalienne et fondatrice de Solid Stash, une entreprise proposant des plats surgelés végétaliens. Pourtant, autrefois, Lily, 36 ans, mangeait de la viande avec délectation.

«Nous étions une de ces familles traditionnelles qui aimaient la bonne cuisine, et un bon morceau de viande en faisait partie. J’ai moi-même aidé en cuisine dès mon plus jeune âge. Quand je pense à mon enfance, je revois le rosbif de ma grand-mère, encore délicieusement rouge, ou les pigeons à la sauce à la viande brune que ­maman préparait souvent le dimanche. Alors quand mon mari a annoncé en 2015 qu’il devenait végétarien, ça m’a mise en colère, comme s’il me retirait mon jouet préféré: le poulet! Pour moi, ce n’était pas seulement un filet de poitrine, c’était aussi une carcasse dont je pouvais faire un bouillon ou un vol-au-vent. Pendant plusieurs semaines, j’ai refusé de cuisiner pour lui, mais j’ai vite compris qu’un nouveau monde venait de s’ouvrir à moi.

Je me suis rendu compte que je pouvais apprendre encore plus sur la saveur et l’équilibre d’un plat si je devais retirer des valeurs sûres comme la viande, la crème et le beurre.

J’ai commencé à prendre plaisir à préparer la sauce bolognaise végétale parfaite: ma recette aux champignons séchés, au miso et au vinaigre balsamique est une véritable bombe de saveur! À l’époque, mon mari et moi ­vivions à Londres, où les semaines de travail de 80 heures et plus sont la règle. Après une longue journée, je n’avais pas envie de cuisiner, mais nous ne voulions pas non plus nous faire livrer des plats gras tous les soirs. J’ai ainsi commencé à préparer mes plats à l’avance le dimanche: je cuisinais de grandes quantités que je congelais ensuite dans notre petit congélateur. Curry indien, tajines, ­bolognaises aux légumes.... Cet été-là, des amies sont ­devenues mères pour la première fois. Je savais qu’en ­Belgique, c’était dans l’air du temps de préparer et livrer des repas aux jeunes parents. J’ai pris le train avec un petit frigobox, en espérant que mes portions congelées ­survivraient. Rapidement, mes amies m’ont appelée: ‘On en veut encore! C’est tellement pratique et délicieux! On te paiera pour ça!’ À l’époque, je travaillais dans une ­société de restauration haut de gamme, car mon rêve était de créer un jour ma propre entreprise de restauration. ­Soudain, j’ai réalisé qu’il y avait quelque chose à faire. Et voilà: Solid Stash était né. 

Végétalien à 99 %

Vous pouvez nous commander un stock de repas surgelés pour une durée de six mois: pratiques, livrés à domicile, savoureux, réconfortants et 100 % d’origine végétale. Pour nous, ce dernier point est bien sûr le plus important: c’est la petite contribution que nous espérons apporter à une planète plus durable. Ça ne doit pas être tout ou rien: si nous essayons tous un peu, nous y arriverons. Beaucoup de nos clients sont flexitariens, et si, grâce à nous, ils renoncent tous à la viande quelques jours par semaine, ça fait déjà une énorme différence. Notre atelier se trouve dans ­l’abattoir d’Anderlecht. C’est assez ironique, mais aussi presque ­poétique que nous découpions des centaines de kilos de carottes dans une ancienne salle de découpe de viande de l’abattoir (rires). À la maison, d’ailleurs, nous mangeons presque 100 % végétalien. Il ­m’arrive encore de pécher au ­restaurant lorsqu’il n’y a pas ­d’alternative végétalienne décente, et pour notre petit garçon, nous préparons parfois un œuf, mais cela mis à part, ça ne nous ­demande aucun effort. J’utilise peu de substituts de viande (parfois du seitan ou du tempeh du supermarché asiatique) simplement parce que je veux montrer qu’on n’en a pas besoin pour manger des plats savoureux. J’aurais pu m’attendre à un peu plus de résistance de la part de ma famille, mais elle est tout à fait d’accord avec ça et en tire de la fierté. Ma mère me ­demande parfois si je peux lui donner des idées de repas quand on vient dîner, ou si je peux apporter quelque chose moi-même. Nous travaillons à la mise au point d’une box repas de fêtes, afin que vous puissiez bientôt proposer des dîners végétaliens savoureux à vos amis, sans stress. »

Ben, 28 ans, est bio-ingénieur. Il y a trois ans, il mangeait encore chaque semaine du steak quand il vivait en Afrique du Sud. Aujourd’hui, il mange entièrement végétalien et crée des substituts de viande pour la marque Greenway.

«J’ai étudié en Afrique du Sud pendant six mois et les Sud-Africains sont de vrais mangeurs de viande. Le steak est omniprésent et n’est pas cher. Il m’est arrivé de manger trois fois par jour pendant une semaine dans le même restaurant de viande qui proposait jusqu’à 30 sortes de steaks au menu. Le matin, je mangeais des œufs avec du bacon ou de la viande hachée avec de la relish. On peut dire que j’aimais manger de la viande (rires). D’un autre côté, depuis l’âge de 11 ans (lorsque j’ai vu Une vérité qui dérange d’Al Gore), je me suis préoccupé de mon ­empreinte carbone. J’ai fait de mon mieux, mais je ne ­pouvais plus ignorer le fait qu’un régime végétalien ferait la plus grande différence. Après avoir ­regardé le documentaire ­Cowspiracy sur Netflix, j’étais ­déterminé à au moins essayer.

L’idée était juste de voir comment ça se passait pendant un mois ou deux, mais à ma grande surprise, ça a été très facile. Lors du premier dîner où j’avais également prévu une option végétalienne, certains ont froncé les sourcils, mais ­aujourd’hui, je ne suis plus le seul de notre groupe d’amis à avoir supprimé la viande, le poisson et les produits laitiers. Au début, nos familles, qui avaient l’habitude de manger des repas plutôt ­traditionnels, nous regardaient comme ces écolos bobo (rires). Mais aujourd’hui, ils semblent de plus en plus adhérer à notre ­philosophie alimentaire et cuisinent plus souvent des plats à base de plantes. C’est formidable que nous puissions être une source d’inspiration.

Tricher de temps en temps

J’ai commencé à cuisiner différemment et la viande ne me manque pas vraiment: moins de pommes de terre et de légumes, plus de plats mijotés et de pâtes. Je prépare souvent des nouilles udon au piment, une recette rapide et savoureuse que m’a donnée mon patron, ou un ragoût avec des courgettes, des champignons et une sauce au fromage végétalienne qui incite même les plus grands mangeurs de fromage à me demander la recette. Lorsque j’ai envie d’un hamburger ou d’un hachis parmentier, j’opte pour les nombreux substituts de viande que l’on trouve dans les supermarchés et qui sont presque impossibles à distinguer de la vraie viande. Je suis fan de ces derniers, voilà pourquoi j’ai toute ma place chez Greenway. J’ai découvert cette entreprise peu après mon passage à ­l’alimentation végétale et je crée désormais des substituts de viande pour elle. Si quelque ­chose me manque ­vraiment, je peux toujours essayer de le recréer ici. Bien qu’un steak végétalien soit encore loin d’être une réalité. J’aime notre cordon bleu à base de céleri-rave et notre saucisse blanche à base de chou-fleur. Ils ont un goût de viande juteuse et une saveur puissante, légèrement umami. Délicieux, même au barbecue.

Pour ma copine il est impossible de ne plus jamais manger de bacon, alors il lui arrive encore d’en cuisiner le dimanche matin. Bien sûr, je me souviens très bien du goût que ça a et ça donne très envie, mais je ne me laisse pas tenter.

En fait, ce qui me manque surtout ce sont les viennoiseries. Je trouve des options vegan pas trop mal, mais elles ne sont pas aussi bonnes. Mais de savoir si c’est nécessaire, c’est une autre question. Il m’arrive d’avoir envie d’une couque au chocolat ou d’un croissant avec du vrai beurre et il m’arrive de céder à la tentation. Tout le monde triche de temps en temps, et c’est normal tant que l’on s’en tient à ses objectifs la plupart du temps. Comme tout régime qui ne fonctionne pas non plus quand on se sent obligé, mais seulement quand on est soi-même convaincu de ses bienfaits. ­Aujourd’hui, je suis un ­végétalien convaincu et je me passe volontiers de viande et de produits laitiers 99 % du temps. »

Moenia, 27 ans, est une écoguerrière autoproclamée. Elle a créé la boutique en ligne Ecossentials pour donner envie à d’autres personnes de vivre de manière plus durable. Depuis un an et demi, son alimentation est essentiellement végétalienne.

«Plus je faisais des recherches pour mon entreprise, plus j’en apprenais sur les modes de vie durables. De plus en plus, ça m’a semblé évident que la viande et les produits laitiers posaient un problème. Pourtant, le fait de manger uniquement végétalien m’a découragée. N’était-ce pas trop difficile? Est-ce que ce serait encore bon? Et devrais-je dire adieu au fromage? Moi qui adore ça! Jusqu’à ce que, lors d’un voyage en Indonésie, je ­constate à quel point la nourriture vegan peut être simple et délicieuse. Une fois de retour à la maison, j’ai pensé qu’il était logique de poursuivre ce régime alimentaire, mais ça n’a pas été facile. Mon ex continuait à manger beaucoup de viande et à la maison aussi, ma famille pensait que ce serait une passade. Il faut savoir que je suis quelqu’un qui aime faire plaisir, alors quand on me proposait de la viande à un dîner de famille, il m’arrivait ­souvent de ne pas oser dire non. C’est quand j’ai commencé à vivre seule que j’ai réellement mangé ­strictement végétalien. Comme je fais de la musculation j’ai besoin de ­beaucoup de protéines, mais mon corps ne digère pas très bien les protéines végétales, qu’on trouve, par exemple, dans les pois chiches. J’avais presque continuellement des maux d’estomac. J’ai donc été contrainte de renoncer à mes principes. Aujourd’hui, il m’arrive de cuisiner un œuf, de manger du yaourt riche en protéines ou un morceau de poulet ou de fromage. J’écoute davantage mon corps au lieu d’essayer d’être parfaite, et heureusement! Pourtant, pendant longtemps, j’ai eu peur de l’avouer car je m’étais mis beaucoup de pression.

J’ai eu le syndrome de ­l’imposteur: je partageais une recette végétalienne alors que je venais de manger un morceau de fromage. Ce que je veux c’est donner une image réaliste d’un mode de vie durable. 

En quête d’une pizza vegan

Le changement ne se produit pas du jour au lendemain. Mais en faisant de notre mieux, on y parviendra pas à pas, même si on oublie une fois notre sac réutilisable ou si on mange de temps en temps un morceau de fromage. C’est ce genre de choses que je partage aujourd’hui. J’ai d’ailleurs l’impression que la communauté­ ­végétalienne est plus ouverte d’esprit. Je ne suis pas parfaite. Par exemple, le poulet rôti est pour moi un véritable souvenir d’enfance: avec mon père et mon frère, nous le mangions ­ensemble avec de la mayonnaise et de la baguette. Je me permets parfois d’en manger, même si je vis à 80 % comme une végétalienne. Heureusement, j’aime aussi les gyros végétaliens de Vivera. Je l’ai préparé plusieurs fois pour des amis et ils ont adoré. Je recommande aussi les boulettes végétaliennes de Davai. Des snacks végétaliens commencent à ouvrir près de chez moi. Ce qui me manque encore c’est une bonne pizzeria végétalienne. À bon entendeur! (rires) »

Texte: Kaatje De Coninck et Emilie Van de Poel Photos: Laura Vleugels

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