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À COEUR OUVERT: ““Je me suis longtemps scarifiée””

Justine Rossius
Justine Rossius Journaliste

À 16 ans, Lia, 26 ans, s’est mutilé les bras. ­Pendant trop longtemps, elle s’est identifiée à ses cicatrices. Aujourd’hui, elle savoure la vie à pleines dents et en tire le meilleur.

« Je suis un peu différente de la plupart des gens parce que j’ai beaucoup de cicatrices sur les bras. Des cicatrices que je me suis infligées moi-même. Il y a eu une période de mon adolescence où je me suis délibérément fait du mal, aujourd’hui, avec le recul je me dis que c’était de la folie. Il y a 10 ans, personne dans mon entourage n’aurait imaginé que me faire du mal deviendrait une addiction qui dominerait mon esprit et ma vie. En 2 ans, de ­nombreuses admissions en psychiatrie ont suivi. Lorsque j’ai été libérée pour la dernière fois, que j’avais arrêté de me faire du mal et que j’ai réintégré la société, je ne me suis pas rendu compte qu’un ­processus de guérison devait ­commencer à partir de ce moment-là.

La peur du miroir

Mes copines allaient à des festivals et vivaient leurs premières histoires d’amour, alors que moi, je n’osais même pas me promener dans mon quartier. Pendant longtemps, beaucoup trop longtemps, je me suis identifiée à mes cicatrices. Ma tête me faisait croire qu’elles symbolisaient ce que j’étais. À chaque confrontation avec le miroir, je fondais en larmes et je ne pensais qu’à une chose: de quoi ai-je l’air maintenant? Qu’est-ce que je me suis fait?

Chaque fois que je voyais mon reflet, tous les mauvais sentiments à l’origine de mon automutilation refaisaient surface.

J’étais convaincue qu’on me verrait comme ‘la fille avec ses cicatrices’ pour le reste de ma vie, parce que c’était ainsi que je me voyais. Alors pourquoi les autres devraient-ils me voir autrement? J’ai donc essayé de me cacher autant que possible. Au fil des années, et grâce au soutien de ma famille et de mes amis, j’ai ­découvert une nouvelle version de moi-même et, ­heureusement, j’en sais beaucoup plus aujourd’hui que quand j’avais 16 ans. Il m’a fallu du temps pour ­comprendre qui j’étais, indépendamment de mon ­apparence. Je sais que c’est un élément important pour beaucoup dans cette société, mais peu à peu, j’ai compris que mes cicatrices font partie de mon passé et que je ne dois plus les laisser déterminer mon avenir et mon estime de soi. Elles sont un passage de mon histoire, mais pas mon histoire en soi. Je reviens de plus en plus à ce que j’étais enfant et je me redécouvre. Tant que je suis en bonne santé, mon apparence n’est qu’un détail. Par-­dessus tout, je suis reconnaissante que mon corps me permette de faire de l’exercice, de gravir des sommets et peut-être même un jour de mettre un enfant au monde. Je considère désormais mon corps comme un temple que je veux ­traiter le mieux possible. Par exemple, j’avais l’habitude de faire de l’exercice pour être aussi mince que possible, alors qu’aujourd’hui je préfère être forte, en forme et en bonne santé.

2 extrêmes

Je n’ai jamais été aussi proche de moi-même que maintenant, et peut-être que dans 5 ou 10 ans, ce sentiment sera ­encore plus fort. ­J’espère que cette évolution se ­poursuivra jusqu’à la fin de mes jours, car ce n’est que lorsqu’on est soi-même que les bonnes portes s’ouvrent. Plus je m’engage dans mon propre bien-être, plus l’effet boule de neige est important.

Je me vois maintenant comme quelqu’un qui savoure la vie à pleines dents et essaie d’en tirer le meilleur.

Je ne tiens plus compte de l’opinion des autres, et cela ne ­m’arrêtera plus jamais. Mon apparence n’a rien à voir avec ce que je suis. Les ­personnes qui auraient des problèmes avec cela n’ont tout simplement pas leur place dans ma vie. Aujourd’hui, je peux me regarder dans le miroir et me féliciter. La jeune fille vulnérable de 16 ans à l’époque et la femme de 26 ans que je suis aujourd’hui sont 2 extrêmes et c’est un revirement incroyablement beau que je ne peux qu’apprécier. »

Texte: Marijke Clabots et Amandine de Harlez.

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