BABYSTORY: ““Nous avons cru pendant un mois que notre bébé avait une anomalie””
Du désir d’enfant à la maternité, mettre un enfant au monde peut parfois s’apparenter à des montagnes russes. Le Test Prénatal Non Invasif (NIPT) de Laura semblait indiquer que son bébé souffrait d’un syndrome sévère. Mais en mars dernier, elle a donné naissance à une petite fille en excellente santé: Juno.
Il aura fallu 7 mois d’essai à Laura (30 ans) et Mathias (32 ans) pour obtenir un test de grossesse positif. “Bien que nous étions aux anges, ce bonheur était parfois entaché par la peur d’une fausse couche”, explique Laura. “On en entend beaucoup autour de nous et ma tendance hypocrondriaque n’a pas aidé: je ne pouvais pas m’empêcher de vérifier plusieurs fois par jour que je ne perdais pas de sang. C’est dommage mais mes angoisses m’empêchaient de me réjouir à 100%” confie-t-elle.
“À douze semaines de grossesse, j’ai eu un sentiment de soulagement en sachant qu’on avait passé la période la plus fragile. L’échographie semblait écarter les risques de syndrome de Down ou d’autres anomalies. À la fin du rendez-vous, ma gynécologue, rassurante, m’a remis un papier pour le NIPT en indiquant qu’il nous permettrait surtout de connaître le sexe du bébé”.
“J’avais envie de crier au monde entier que j’étais enceinte, mais je me suis retenue. Nous avons annoncé la bonne nouvelle à notre famille et nos amis les plus proches mais nous avons attendu les résultats du NIP test pour l’officialiser. Lorsque j’ai appelé ma gynécologue pour obtenir les résultats, j’étais excitée de savoir si nous allions avoir un petit garçon ou petite fille. Mais quand la réceptionniste à l’autre bout du fil m’a répondu, un peu gênée, que la gynécologue me rappellerait plus tard, j’ai eu une énorme boule dans la gorge.”
Le début du cauchemar
“Une heure plus tard, ma gynécologue m’a rappelée. Elle m’a annoncé que le NIPT avait révélé un syndrome touchant les chromosomes sexuels. Je me suis effondrée au travail et je suis rentrée à la maison, prise d’une crise d’angoisse. Ce soir-là, on nous a expliqué que les principaux symptômes du syndrome seraient l’insuffisance cardiaque, l’infertilité, l’insuffisance rénale et les malformations physiques. Il y avait beaucoup risques que je perde le bébé. Si elle survivait, il était fort probable qu’elle doive subir une opération cardiaque à vie. Oui, « elle », car le syndrome ne se manifeste que chez les filles. Je n’aurais pas pu imaginer pire manière de découvrir le sexe de mon enfant...”
Mon pire cauchemar était en train de devenir réalité”
“Autre détail important: j’étais déjà trop avancée dans ma grossesse pour un avortement, donc si on voulait l’interrompre, il fallait que je donne naissance à ce bébé. Mon pire cauchemar était en train de devenir réalité. Deux ans plus tôt, j’avais perdu ma mère d’un cancer en très peu de temps. Cette grossesse était arrivée comme une lueur d’espoir, et maintenant j’allais devoir abandonner ma fille?”
Club secret
“Nous nous sommes effondrés en rentrant à la maison. Pourquoi n’avons-nous jamais entendu parler de cela auparavant? J’ai vite appris que nous n’étions pas les seuls dans cette situation. En peu de temps, j’ai découvert que des dizaines de femmes autour de moi avaient vécu des situations similaires : fausses couches, mortinaissances, malformations génétiques, prééclampsie... Un nouveau monde s’est ouvert à moi. Comment se faisait-il que tant de femmes de mon entourage avaient traversé ce genre d’épreuve sans que je ne sois pas au courant? Je me suis sentie triste de ne pas avoir pu les soutenir au moment même. Pourquoi demeurait-il encore tant de tabous autour de ce sujet en 2021, alors que cela arrive à 10 à 25 % des femmes?”
“C’était clair pour moi : ce silence devait être brisé. Oui, j’étais enceinte d’un enfant avec une anomalie, mais en tant qu’éducatrice spécialisée, je sais, après des années de travail auprès de personnes handicapées, à quel point la qualité de vie est importante. Un enfant qui doit passer toute sa vie à l’hôpital ? Non, je ne veux pas lui infliger ça. Après une semaine, j’ai décidé de partager mon histoire avec tout le monde. Je trouvais ça vraiment important de pouvoir discuter d’un tel sujet.”
Comme une tumeur
“Quelques semaines après le verdict, j’ai dû subir une amniocentèse. Petit à petit, j’ai commencé à voir mon bébé non plus comme un fœtus, mais comme une tumeur. Quelque chose qui devait sortir de mon corps le plus vite possible.
Petit à petit, j’ai commencé à voir mon bébé non plus comme un fœtus, mais comme une tumeur.
“Après la ponction, nous avons obtenu un rendez-vous avec une spécialiste en génétique. Elle nous a clairement expliqué ce que le syndrome impliquait exactement et aussi qu’il y avait encore une petite chance que notre enfant ne soit pas atteint de ce syndrome. Mon cœur s’est mis à battre très vite: serait-ce autre chose? Selon elle, la plupart des fœtus avec ce syndrome seraient déjà partis lors d’une fausse couche. De plus, aucune malformation cardiaque n’avait été détectée lors de l’échographie. Plus la conversation avançait, plus nous nous remplissions d’espoir.
Annonce de décès ou de naissance?
“J’étais maintenant enceinte de vingt semaines. Mon ventre s’arrondissait mais je n’osais pas trop y prêter attention. Quelques semaines plus tard, ma gynécologue a appelé: le NIPT s’est avéré être un faux positif. Je suis restée bouche bée. Je n’ai pas été capable de prononcer un mot, juste de pleurer. Comment était-il possible d’avoir cru pendant un mois entier de ma grossesse que nous aurions un bébé porteur d’une anomalie alors que notre fille était parfaitement normale? Pendant plusieurs jours, je suis restée sceptique. Ce n’est qu’après une échographie structurelle qui a examiné tous les organes attentivement que j’ai été rassurée: elle était saine et sauve.
J’avais déjà imaginé une annonce décès, j’ai dû soudainement repenser au faire-part de naissance.
« Nous sommes passés d’une profonde tristesse à une joie indescriptible. Quelle montagne russe émotionnelle! Je venais de terminer un dessin pour les cartes funéraires et tout à coup j’ai commencé à penser au faire-part de naissance. D’un seul coup, j’ai dû transformer cette tumeur dans mon ventre en petite fille. J’avais peur que cela prenne beaucoup de temps, mais heureusement, ce déclic est venu rapidement. Mathias et moi avons suivi des séances d’haptonomie tous les quinze jours. Grâce à cette technique, nous avons renoué un lien avec notre bébé et j’ai enfin pu me réjouir d’être enceinte”.
Accoucher en petit comité
“Bien que j’ai été “privée” de ma grossesse pendant un bon mois, j’ai vraiment apprécié les quatre mois qu’il restait avant la naissance. Pour la première fois, je n’étais plus submergée par mon hypocondrie et mes insécurités. Je n’ai plus jamais craint la grossesse ou l’accouchement.
À 39 semaines de grossesse, j’ai donné naissance à une magnifique petite fille en bonne santé que nous avons appelée Juno. J’ai accouché sur un tabouret d’accouchement avec seulement Mathias et la sage-femme auprès de moi. Nous sommes passés de trois à quatre, en moins de trois heures! Au moment où elle est née et qu’on l’a mise sur moi, je ne pouvais penser qu’à une chose: OUI, elle est bien là et elle est belle. Je ne la laisserai jamais partir !”
Vous n’êtes pas seuls
“Je me rends bien compte que nous faisons partie des rares personnes qui expérimentent un tel bonheur après avoir cru au pire. Mais après m’être préparée à une mortinaissance, je peux imaginer ce que certaines femmes doivent endurer. Nous sommes si fortes! J’espère que de plus en plus de femmes oseront partager leur histoire. Souvent, ces épreuves sont accompagnées de culpabilité et de honte, et ça ne devrait pas être le cas. Nous sommes tous soumis à la nature. Pouvoir et oser en parler rend cette réalité plus facile à accepter. S’il vous plaît, brisons ce tabou plutôt que de perpétuer ce sentiment d’être seul·e dans ce cas”.
Shooting de grossesse
Shooting de grossesse
“J’ai toujours rêvé de faire un shooting enceinte. Il a fallu sept mois avant que j’ose franchir le pas. Cette photo a été prise par ma meilleure amie. Notre bonheur crève les yeux!”
Photo: Charlotte Van Kerkhoven Photography
Shooting de grossesse
Shooting de grossesse
“Cette photo est très symbolique à mes yeux car elle a un côté sombre, tout comme l’histoire de ma grossesse. Elle dégage de la tristesse, mais aussi de l’espoir.”
Photo: Charlotte Van Kerkhoven Photography
À point
À point
“J’ai également participé à une séance photo à la fin de ma grossesse. À ce moment-là, j’étais certaine que ma fille naîtrait et que tout se passerait bien. Mon bonheur et la confiance en moi se dégagent de ce cliché”.
Photo: Liesje Brockley Photography
Bienvenue, Juno
Bienvenue, Juno
“La première heure de la vie de Juno. Nous étions incroyablement heureux qu’elle soit en parfaite santé et aussi belle”.
Mère et fille
Mère et fille
“La première photo de ma fille et moi. C’est émouvant parce que cela me rappelle ma maman et moi-même quand j’étais bébé. Ce jour-là, je suis passée au rôle d’enfant à mère”.
Mathias
Mathias
“Mathias s’est montré très émotif pendant les 48 premières heures. Sa fille est son portrait craché ! Je pourrais les regarder pendant des heures, lui et Juno”.
Cadeaux de naissance
Cadeaux de naissance
“J’ai attendu longtemps avant commander les sachets de bonbons de naissance. J’avais peur que quelque chose tourne mal et que nous soyons confrontés cent fois à son prénom dans le salon”.
Juno et moi
Juno et moi
“Ici, Juno est assise exactement à l’endroit où elle se trouvait dans mon ventre. C’est incroyable que nous ayons vécu toute cette aventure et de se dire que la petite créature qui se trouvait à l’intérieur a enfin un visage, une odeur, un son. Je suis heureuse d’avoir enfin pu faire sa connaissance”.
Le premier mois de Juno
Le premier mois de Juno
“Juno a fêté son premier mois sur Terre. Et elle est toujours en parfaite santé!”.
Photos: Charlotte Van Kerkhoven Photography, Liesje Brockley Photography et photos personnelles.
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