Témoignage: ““J’ai vaincu ma dépression grâce au sport””
Combattre une dépression passe souvent par la prise de médicaments et la thérapie. Mais d’autres voies permettent également d’aller mieux. C’est ce qu’à vécu Eléanore, 24 ans, qui, après avoir lutté durant des années contre la dépression a retrouvé un second souffle grâce au jogging.
“Petite, j’étais très compétitive. J’ai toujours voulu réussir. À l’école comme dans mes loisirs, je plaçais la barre très haut. Mais à l’adolescence, j’ai eu soudain le sentiment d’être différente des autres. J’étais très souvent sombre, m’interrogeant sur la raison pour laquelle j’étais en vie. Bien qu’entourée de nombreux amis, je ne leur confiais pas mes émotions. Je taisais aussi mes sentiments à mes parents. Ma situation familiale était loin d’être facile. Mon frère souffre d’une forme d’autisme, il demande beaucoup d’attention et j’étais parfois délaissée. Durant cette période, j’ai ouvert mon cœur à un seul confident, à l’école. Mais pour lui, ce que je vivais était dû à l’adolescence, alors que je n’avais plus goût à rien.
Dépression majeure
J’ai commencé à m’automutiler vers 14 ans. Je me détestais et j’aurais préféré ne plus exister. J’ai perdu l’appétit, j’ai souffert de crises de panique et d’insomnies. J’en suis venue, par moments, à vouloir mourir. J’ai même écrit une lettre d’adieu.
En même temps, même si chaque jour une épreuve, je continuais malgré tout à me battre pour rester en vie. Pendant tout ce temps, j’ignorais que j’étais en pleine dépression. Ce diagnostic a mis des années à tomber. Le 28 décembre 2010, trois semaines avant mon anniversaire, ma mère est décédée dans un accident de voiture. Comment accepter qu’une personne aussi essentielle à votre vie puisse disparaître si soudainement? Je savais que je ne pouvais faire face seule à un tel traumatisme, et j’ai été consulter un psychologue et un médecin. Ils m’ont expliqué que je souffrais de dépression majeure. On m’a prescrit des antidépresseurs et doucement, j’ai fini par aller mieux. Puis j’ai été admise en école journalisme, et cela m’a rendue folle de joie car je rêvais d’étudier cette matière. Je l’ai vécu comme un nouveau départ, avec l’impression d’être de nouveau maître de moi-même. J’ai alors arrêté de prendre des médicaments de ma propre initiative, pour me concentrer sur mes études. Une grave erreur!
Au bout du rouleau
J’ai commencé à souffrir de palpitations et d’anxiété. A me sentir de plus en plus mal, sans en comprendre vraiment la raison. Vu de l’extérieur, j’agissais comme s’il n’y avait pas de problème. Je combinais les cours avec deux emplois et j’étais de toutes les fêtes. Sauf qu’après un moment, je n’ai plus eu d’énergie du tout, avec l’envie permanente de rester au lit. Je n’étais plus que l’ombre de moi-même et de plus souvent effrayée en pensant à mon avenir. Mes pensées devenaient très sombres. J’envisageais à nouveau d’en finir, ne pouvant supporter l’idée de souffrir un jour de plus. Je devais réagir, sinon j’allais totalement sombrer. Lorsque mon petit ami a rompu notre relation, il m’est devenu impossible de sortir de ce cercle vicieux et j’ai fait une tentative de suicide. J’ai été admise en psychiatrie, et là, j’ai recommencé à prendre des antidépresseurs. J’y suis restée une semaine. Une période qui m’a permis de me reposer et de retrouver les idées claires.
Un sens à ma vie
De retour chez moi, j’ai senti qu’il me fallait un but. J’avais besoin d’un objectif capable de me sortir de mon lit tous les jours. J’ai donc commencé à m’entraîner pour un semi-marathon. Cette idée m’est venue suite à la lecture d’un article sur l’effet positif de la course à pied sur la dépression. J’ai mis mes études en pause, le temps de me recentrer sur moi et de me concentrer sur ce nouveau défi. Et je me suis préparé un planning d’entraînement, m’obligeant à chausser mes baskets au moins trois fois par semaine. Rapidement, j’ai réalisé à quel point je me sentais mieux en courant. J’ai démarré un blog, avec l’envie de briser les tabous entourant la dépression. Je ne savais pas où cela me mènerait, mais j’ai choisi de tout donner.
D’une certaine manière, la course a donné un sens à mon existence. Dans la foulée, j’ai commencé à manger plus sainement et stoppé toute consommation d’alcool.
Toujours plus en forme, j’ai finalement réussi mon premier semi-marathon, avec facilité. J’étais fière d’avoir atteint mon but, tout en redoutant de dépérir à nouveau du fait d’avoir atteint mon objectif. Mais depuis, j’en ai couru d’autres, de plus et je m’entraîne désormais pour un marathon complet.
Pas une solution mais un vrai soutien
“Quand je cours, je me sens libre. Je tiens les rênes et décide dans quelle direction aller. C’est vital pour mon équilibre psychologique. Après un tour, mes problèmes me semblent moins graves, et parfois, des solutions me viennent à l’esprit en courant. Courir me permet non seulement de maintenir les soucis à distance mais aussi de booster mon énergie et ma confiance en moi. Et, bonus supplémentaire, je me suis délestée de quelques kilos! Depuis que j’ai commencé le footing, je me sens nettement plus à l’aise dans mes baskets. Cela ne m’empêche pas de continuer à prendre des antidépresseurs. Je vois le sport comme une aide, pas comme une solution ultime. Mais, même si ce n’est qu’un outil, la course à pied a malgré tout révolutionné ma vie. Aujourd’hui, je peux enfin le dire, je suis heureuse! J’ai repris mes études de journalisme et je suis actuellement en stage à Londres. Un rêve devenu réalité. Si je pouvais parler à la jeune fille que j’étais, je lui dirais qu’elle n’imagine pas à quel point elle va encore évoluer. Et qu’il ne faut pas se blâmer pour ce sur quoi nous n’avons aucun contrôle.
La dépression est une maladie et il n’y a aucune raison d’en avoir honte. J’ai appris qu’il ne fallait pas être trop dure avec soi-même. La vie n’est pas toujours rose, mais elle est remplie d’éclaircies. Même les moments les plus douloureux finissent par passer. Et lorsque je suis préoccupée ou dans une mauvaise passe, je continue à enfiler mes baskets pour aller courir.”
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