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TÉMOIGNAGE: ““Je mange pour me consoler””

Barbara Wesoly

Marie, 23 ans, mange lorsqu’elle éprouve des émotions intenses: joie,­ tristesse ou colère. Elle se rue ainsi sur la nourriture pour noyer son chagrin ou soulager son stress et a le plus grand mal à dissocier alimentation et sentiments.


“Je suis le stéréotype même de la mangeuse émotionnelle. J’ai la mauvaise habitude de manger dès que je ressens une émotion trop forte. Quand je suis heureuse, je commande une glace pour fêter ça. Si je suis en colère, je m’ouvre un paquet de chips. Et si je m’ennuie, je craque rapidement pour l’une ou l’autre friandise. Quand j’étais enfant, je bougeais beaucoup et j’adorais jouer dehors. Du coup, je brûlais toutes les calories et je n’avais aucun problème de poids. Mais à la puberté, ça a changé. Je suis devenue plus ronde, sans pour autant devenir grosse. Je remarquais que j’avais pris du poids quand je me comparais à mes deux sœurs super minces. Je n’étais pas vraiment jalouse, mais c’est vrai que parfois, ça me faisait du mal de voir qu’elles restaient minces et pas moi.

Se consoler en mangeant


Je parvenais à supporter que ma famille fasse des petits commentaires sur ma silhouette. Mais à 16 ans, j’ai fait une énorme crise d’adolescence: plus personne ne m’intéressait. Je ne voulais pas étudier, mais je n’avais pas non plus envie de commencer à travailler immédiatement. Mes études ont été très affectées par mon comportement et j’ai dû changer d’école. La classe dans laquelle je me suis retrouvée était remplie de filles qui n’étaient pas mon genre. Des poupées blondes et minces qui portaient des vêtements de marques. Dès le premier jour, j’ai été ignorée et pendant 1 an et demi, je n’ai pas réussi à créer de lien avec les autres. J’arrivais régulièrement en pleurant à l’école, mais je pensais encore que ce n’était qu’une question de temps et que je finirais pas me faire accepter dans le groupe. Mais ça n’a pas été le cas. Un an plus tard, la situation ne s’était pas améliorée. Je me suis réfugiée dans la nourriture.

Chocolat, chips, bonbons: tout était bon pour noyer mon chagrin. Avant même que je m’en rende compte, je suis entrée dans un cercle vicieux ou chaque émotion s’accompagnait de grignotages intempestifs.


Quand je me sens mal, je mange des aliments malsains et quand je me sens bien, je me dirige vers des aliments un rien plus sains. Mais dans tous les cas, ça tourne autour de la nourriture! Je sais que la consolation que j’en retire est de courte durée, mais c’est plus fort que moi.

Stupide balance


Je ne me suis pas pesée au cours des deux dernières années, parce que ça me déprimerait bien trop. Quand je me suis pesée pour la dernière fois, la balance affichait 81 kilos pour 1 m 56. J’avais trouvé ce chiffre terrible. Désormais, j’essaye d’être plus consciente de ce que je mange. Et j’essaye de garder la situation sous contrôle en regardant ma taille de vêtement par exemple. Ça aide, mais très souvent, je retombe dans mes vieilles habitudes. Heureusement, je peux compter sur le soutien de mon mari. Nous sommes ensemble depuis trois ans et on s’est rencontrés au moment où ma confiance en moi était au plus bas. Mais il m’aime vraiment comme je suis. Nous avons récemment acheté une maison ensemble et vu qu’il finit de travailler tôt, il cuisine souvent pour moi et essaye de me préparer des bons petits plats sains.

J’essaye quant à moi de grignoter le moins possible et de bannir les biscuits de ma vie. Mais dans les moments difficiles ou quand je m’ennuie, ça reste compliqué.

Beaucoup d’incompréhension


Je suis atteinte de la maladie de Bechterew, qui entraîne une inflammation des articulations. Du coup, le sport est presque devenu impossible pour moi. Lorsque je vais courir, mes genoux et mes chevilles me font mal et quand je nage, ce sont mes hanches et mon dos qui me font souffrir. En tant que jeune femme, je dois souvent faire face à des incompréhensions. Et c’est un sujet qui m’inquiète pour l’avenir. Je rêve de fonder une famille. Mais tomber enceinte ne sera pas évident pour moi. J’ai même dû abandonner mes études parce que je n’arrivais pas à les supporter physiquement. Je suis maintenant responsable d’un magasin de lunettes et je commence une formation d’opticienne en septembre. L’avenir s’annonce bien pour moi en ce moment. Mais je ne me fais aucune illusion. Le fait de manger compulsivement restera toujours dans ma nature. Je veux juste continuer à garder la situation sous contrôle.”

Les conseils de G. Leyssen, nutritionniste:


“Nous sommes souvent effrayés par les émotions telles la tristesse ou la colère, parce que nous les ressentons comme désagréables. C’est la raison pour laquelle nous recherchons des manières d’échapper à ces émotions. Cela peut être par la cigarette, le shopping ou la nourriture… Le problème, c’est que cela devient rapidement des habitudes difficiles à perdre. Lorsqu’elle ressent une émotion violente, je conseillerais à Marie de se concentrer sur sa respiration avant de se ruer vers le paquet de bonbons. Une ­respiration abdominale profonde: il faut inspirer lentement et expirer aussi longtemps que possible. Cela aidera Marie à rester dans le présent et à ne pas se laisser emporter par l’émotion qu’elle ressent. Elle se sentira plus détendue, ce qui réduira son ­besoin de compenser en mangeant.”

Texte: Jill De Bont et Justine Rossius. Photo: Leen Van den Meutter.


 

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