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Témoignage: ““Je n’ai jamais envie de faire l’amour””

Barbara Wesoly
Une personne sur 100 ne se sent pas sexuellement attirée par autrui. C'est ce qu'on appelle l'asexualité. Cheyenne, 21 ans, est étudiante en soins infirmiers et en couple depuis 3 ans, se confie sur cette orientation encore taboue. 

"Les personnes asexuelles ne se sentent pas sexuellement attirées par autrui. Elles peuvent être excitées, mais elles n'ont pas envie de faire l'amour. Il existe différents types d'asexualités: certaines personnes asexuelles ont même une forte libido. Bien sûr, elles peuvent aussi tout à fait faire l'amour et se masturber. Mais ce n'est pas pour le plaisir sexuel en lui-même, c'est uniquement dans le but de se détendre et se déstresser. Certaines personnes asexuelles ne ressentent pas non plus de sentiments amoureux, mais ce n'est pas mon cas! Cela veut dire que je peux être amoureuse, que j'aime bien le romantisme, les câlins et les baisers. Il n'y a que le sexe qui ne me fait ni chaud ni froid.

 

Les garçons? Pas intéressée!

Pendant mon adolescence, je m'étais déjà rendu compte que je n'étais pas comme les autres filles de mon âge. Les garçons ne m'intéressaient pas du tout. Ça ne me disait rien de parler avec eux ou de traîner à leurs côtés. Je disais tout le temps que je n'avais pas le temps pour ça. J'avais assez d'autres occupations. Quelque part, je me sentais bizarre, mais je me disais que j'étais juste une retardataire et que les sentiments pour les garçons viendraient avec le temps. À 18 ans, j'ai rencontré un garçon au cours de badminton. C'était un chouette mec, et j'ai fini par tomber amoureuse de lui. Tout se passait très bien, mais on ne faisait que s'embrasser. Je n'avais jamais envie de lui. Après six mois, on a fait l'amour pour la première fois. C'était effrayant. Je voulais que ça se termine vite et j'ai même eu une crise de panique. Je me suis dit que c'était normal, que toutes les filles ressentaient ça lors de leur première fois. Mais les fois d'après, je me suis aussi sentie très mal et en panique pendant l'amour. J'ai commencé à m'inquiéter et j'ai cherché une explication sur internet.

J'ai découvert que j'avais une aversion sexuelle, ce qui signifie que j'éprouve de la peur, du dégoût et de la répulsion pour le sexe.

J'étais heureuse de pouvoir mettre un nom sur ce que je vivais, mais je n'osais pas le raconter à mon copain par peur de le blesser. Après un moment, j'ai fini par lui dire, parce que le sexe était tout sauf agréable pour moi. Heureusement, mon copain a été adorable. Il voulait m'aider à vaincre ma peur, et finalement, ça a marché, j'avais moins d'angoisses. Mais j'avais encore très peu envie de faire l'amour.

 

Trouver un compromis

Un an plus tard, j'ai trouvé des informations sur internet sur le concept de l'asexualité et à partir de ce moment-là, les pièces du puzzle se sont assemblées. Vous ne pouvez pas imaginer à quel point j'étais heureuse et soulagée. Enfin, j'apprenais qu'il existait d'autres personnes dans mon cas, que je n'étais pas si seule. Les premiers mois, je l'ai gardé pour moi, parce que je voulais  apprendre à m'en accommoder et à l'accepter. Ensuite, je l'ai raconté à ma maman et à ma meilleure amie qui se sont montrées super compréhensives. La seule chose dont j'avais peur, c'était de perdre mon copain, car le sexe reste quelque chose de très important dans un couple. Mais quand je lui ai raconté, il a réagi très positivement. Il a dit qu'il m'aimait et qu'il voulait rester avec moi. On a beaucoup discuté de notre couple et on est arrivés à un compromis.

Il ne me met pas la pression quand je n'ai pas envie de faire l'amour, et moi, je fais des efforts pour faire l'amour de temps en temps afin de lui faire plaisir. Moi, je pourrais très bien vivre sans sexe, mais je le fais quand même par amour.

Même si ce n’est pas agréable pour moi, j'aime bien le voir profiter. Je ne serai jamais une coquine, mais j'apprécie le fait d'être intime avec lui, de s'embrasser et de se câliner. J'ai beaucoup de chance d'être avec lui, car il est vraiment adorable. Au début, je manquais de confiance à cause de mon asexualité. J'avais peur qu'il ne puisse plus le supporter et qu'il finisse par chercher une autre fille. Maintenant, je suis encore parfois peu sûre de moi, mais je sais qu'on s'aime et que notre relation est très forte.

 

Facebook comme béquille

Lorsque j'ai parlé de mon asexualité sur Facebook, je n'ai eu que des réactions positives. Malheureusement, de nombreuses personnes asexuelles sont moins chanceuses que moi... Certaines se font même insulter ou rejeter par leur famille. Beaucoup trouvent que ce n'est pas normal ou que c'est contre-nature. Ils ne comprennent pas, parce qu'ils trouvent que le sexe est la chose la plus normale au monde. Je comprends que c'est difficile à saisir, mais je veux simplement être acceptée comme je suis. C'est pourquoi j'ai créé un groupe Facebook pour les personnes asexuelles de Belgique, pour trouver des compagnons et partager des infos à ce sujet. 

L'asexualité est très peu connue. Je voudrais que les autres personnes dans ma situation sachent qu'elles ne sont pas seules. J'ai reçu des réactions très positives de personnes asexuelles qui se sentent enfin comprises, mais aussi de personnes qui ne le sont pas.

C'est ça que je trouve important: il faut que les gens comprennent l'asexualité et se sensibilisent à ce sujet. Plus on en parlera, plus ça deviendra normal aux yeux des gens."

 

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