Témoignage: ““Mon homme est transgenre””
"La première fois que Robin et moi nous sommes croisés, nous étions des enfants qui avions des copains communs. Puis, à l'âge de 17 ans, on s'est retrouvés sur les réseaux sociaux. J'ai tout de suite vu qu'il était devenu un garçon formidable. Après trois mois de chat, j'étais déjà folle amoureuse de lui. Peut-être, justement, parce qu'il ne correspondait en rien à l'image du mec macho, fan de foot et de voitures. C'était un vrai geek, toujours scotché à l'écran de son ordi. Un peu comme moi! On se sentait bien ensemble, on pouvait parler de tout. Avec mes parents, la relation était difficile. C'est pour cette raison que moins d'un an après notre première rencontre, Robin et moi avons décidé de nous installer ensemble. À l'époque, je cumulais des études en Pharmacie et un job d'appoint. Mon amoureux, lui, bossait déjà à temps plein.
Face au doute
Pendant trois ans, nous avons connu une vie de couple heureuse. Quand nous avons décidé de nous marier, c'est moi qui ai choisi son costume. Nous avons aussi dressé une liste de prénoms à donner à notre futur bébé. Rien ne semblait compromettre notre bonheur. Puis, un jour, Robin est passé me voir à mon travail. Il m'a demandé d'aller manger avec lui. Il avait l'air complètement perdu.
Ce matin-là, il avait vu un reportage sur des personnes transgenres à la télé et s'était tout de suite reconnu dans ces profils.
Ce qu'il ressentait exactement au plus profond de lui, il n'a pas pu me l'expliquer ce jour-là. Tout ce qu'il m'a dit, c'est qu'à l'adolescence, il s'était déjà senti attiré par un homme. Dans sa famille, beaucoup de gens avaient conclu qu'il était homo. Mais quand ils nous avaient vus, tous les deux si heureux, ils se sont dit qu'ils s'étaient trompés.
Six mois d'angoisse
Je tombais des nues. Entre nous, tout allait très bien et notre vie sexuelle était épanouie. Mais dès ce jour-là, j'ai senti que l'homme de ma vie n'était plus lui-même. Tout le week-end, il a tourné en rond sans se résoudre à aborder le sujet. La semaine suivante, nous sommes allés ensemble chez le médecin. D'après lui, ce n'était qu'une phase passagère. Comme cette explication ne nous satisfaisait pas, nous avons pris les choses en main en nous adressant à un service spécialisé dans les questions de genres. Pendant six mois, Robin a été soumis à une foule de tests et d'examens. L'objectif: cerner avec précision la situation. Les médecins n'excluaient aucune piste, pas même celle de la schizophrénie. J'ai vécu cette période dans l'angoisse. Allais-je devoir renoncer à ce que j'avais de plus cher au monde? Je n'en avais pas la moindre idée. Robin avait tout aussi peur que moi. Nous n'avions pas d'autre choix que d'attendre les résultats. Au lit, nous étions de plus en plus distants. Malgré tout, nous nous sentions toujours très proches. On s'aimait toujours autant et on n'a jamais cessé de se parler.
Mon homme habillé en femme
Je suis passée par des moments de terrible doute, je ne savais plus quoi faire. Mais je n'ai jamais envisagé de quitter mon grand amour. Je l'aimais trop. Pendant une année entière, nous sommes passés d'un psychologue à l'autre jusqu'à ce que le verdict tombe enfin. Robin était bel et bien transgenre. En l'apprenant, j'ai ressenti un sentiment très ambivalent. J'étais soulagée de savoir qu'il n'était pas schizophrène. D'un autre côté, mon avenir avec lui se brisait en mille morceaux. En réalité, je m'attendais à ce verdict.
Robin – qui ressentait le besoin de s'habiller en femme, mais en cachette – m'avait déjà défendu d'entrer dans notre appartement avant qu'il n'ait le temps de se changer.
Lorsque j'ai aperçu pour la première fois mon amour dans des vêtements féminins, ça m'a fait un choc.J'ai aussi eu beaucoup de mal à accepter qu'il commence à mener une double vie. Si nous sortions tous les deux, il se comportait comme un homme. À la maison, il se transformait en Christine, mais au lit, il redevenait Robin.
Confrontation avec son nouveau corps
Dès l'annonce du diagnostic final, Robin a démarré une cure hormonale. Pour lui, ce traitement était le début d'une nouvelle vie. Sa nouvelle vie en tant que Christine. La toute première fois que nous sommes sorties "entre femmes", j'étais terrorisée. Comment les gens allaient-ils réagir? Quel regard allaient-ils porter sur Christine? Tant de questions se bousculaient en moi. Ses collègues, ainsi que sa famille, ont été fantastiques et ont réagit avec beaucoup de bienveillance. Suite à la prise d'hormones, ses seins ont commencé à pousser. Sa voix est devenue moins grave. Il ne lui restait plus qu'à passer par l'opération pour devenir complètement femme. Le jour J, j'étais folle d'inquiétude. J'avais tellement peur que l'intervention se passe mal.
Je n'ai pas vécu cette opération comme un "deuil" de mon mari. Cela faisait déjà des mois que l'homme qui était mon mari avait changé. Mais maintenant, c'était officiel. Mon homme était définitivement devenu une femme.
Les premiers mois qui ont suivi l'opération, j'ai eu beaucoup de mal à regarder son nouveau corps. Moi qui n'avais jamais ressenti aucune attirance pour une femme, je trouvais cette confrontation très étrange. Je n'ai jamais douté de mon amour pour Robin. Même quand il est devenu Christine. Elle aussi m'a toujours aimée. D'emblée, j'ai décidé que cette situation ne devait pas compromettre notre vie sexuelle.
Un couple heureux
Lors de notre toute première relation sexuelle, j'avais très peur à l'idée de lui faire mal. Les choses se sont passées beaucoup mieux que ce que j'avais imaginé. Sur le plan sexuel, nous avons parcouru un chemin énorme ensemble. Nous n'avons d'ailleurs pas fini d'expérimenter de nouvelles choses.
Au fond de moi, je sais que je resterai toujours hétéro à 100%, mais mon amour pour Christine est plus fort que tout. Je suis certaine que je lui resterai fidèle, quoi qu'il arrive.
Tant que nous sommes heureuses toutes les deux, pas question pour moi de tomber dans les bras d'un homme, juste pour assouvir certaines pulsions. L'an dernier, nous avons même décidé de nous marier. Et ce mariage m'a conforté dans l'idée que je vis un conte de fées dont j'aimerais qu'il dure toujours. Aujourd'hui, nous vivons dans petit village où personne ne connait le passé de Christine. Pour les voisins, nous sommes juste un couple de filles qui s'aiment. Je suis très fière de ma femme et j'apprécie ses jolies courbes. J'adore me promener avec elle en public. Notre désir d'enfants, nous l'avons mis en stand-by. Nous avons traversé tellement d'épreuves en si peu de temps que nous avons besoin de faire une pause, de souffler. Avant son opération, Christine a fait congeler des spermatozoïdes. Tout reste donc possible."
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