TÉMOIGNAGE: ““Je suis plus heureuse avec 20 kilos de plus””
Melissa, 23 ans, a contrôlé son poids de manière obsessionnelle pendant des années. Mais après des années d’affrontement contre son corps et la balance, elle est aujourd’hui fière de celle qu’elle est devenue et adore désormais ses courbes.
“À quinze ans, j’ai débuté une carrière de mannequin. Comme tant d’autres filles, devenir top-modèle était mon rêve. J’avais toujours été mince, mais ce moment a coïncidé avec l’apparition de mes formes. Et sur les shootings, on m’a alors reproché mes hanches trop larges et ma poitrine trop volumineuse, en me faisant comprendre qu’il serait préférable d’agir pour changer ça. À force d’entendre constamment les mêmes commentaires, on finit par les croire et cela a été très néfaste pour mon estime de moi. Mon premier régime a démarré à mes dix-sept ans. Mes courbes m’obsédaient, j’étais malheureuse, je ne m’aimais pas et ne me trouvait pas jolie.
Sur Instagram, je suivais les mannequins aux silhouettes parfaites. Elles semblaient toutes tellement épanouies sur leurs photos et je désirais tant l’être aussi. Ma vie ne semblait pouvoir être belle que si je devenais maigre.
Régime ou obsession?
J’ai commencé à copier les conseils de ces comptes Instagram, tels que le nombre maximal de calories à avaler ou des défis comme le #BikiniBodyChallenge… Et tout ce qui contenait des glucides est devenu l’ennemi: pain, pommes de terre, riz, pâtes… ont été supprimés de mon régime alimentaire. Cela fonctionnait et je perdais du poids. Mais bientôt ce régime a viré à l’obsession. En mangeant beaucoup de pommes et en buvant des litres d’eau et de sodas faibles en calories, je m’arrangeais pour ne pas avoir faim. Je ne compte plus les heures que j’ai passées dans les salles de fitness. Non parce que j’aimais le sport, mais parce que cela augmentait encore la quantité de graisses brulées.
Prétendre grignoter
Fière du résultat, j’ai commencé à moi-même publier mes propres conseils forme, postant des clichés d’avant-après. Je m’efforçais d’avoir autant de fans que possible. Lorsque l’on me complimentait sur mes ‘magnifiques jambes si minces’, je me sentais tellement bien. Et en parallèle je continuais à partager des photos de ce que j’avais soi-disant mangé et bu. Même si ce délicieux lait au chocolat, immortalisé pour les réseaux, finissait bien sûr à la poubelle.
Lors de ma période la plus critique, je suis descendue à 47 kilos pour 1m72. Je n’avais plus mes règles, je perdais mes cheveux et mes ongles étaient cassants.
Je ressemblais à un fantôme et il suffisait de me regarder pour constater que quelque chose n’allait pas. Le pire est que je me trouvais moi-même horrible. Je savais pertinemment que j’étais trop maigre. Mais je ne parvenais plus à m’arrêter et je continuais donc à faire semblant qu’il n’y avait pas de problème. Toute mon existence tournait autour de la nourriture et du contrôle du poids. C’était devenu tellement simple. Comme une bulle dans laquelle je me sentais en sécurité et qui me gardait à distance de celle que j’étais.
Une excuse pour ne pas manger
Mais à mesure que je perdais du poids, mon énergie baissait, et j’ai dû arrêter l’exercice physique. Je n’avais plus de force. Et je mentais en permanence à ma famille et à mes amis. J’avais toujours une bonne excuse pour ne pas manger. Les gens qui me connaissent aujourd’hui ne comprennent pas comment j’ai pu en arriver là. Je suis très sociable et j’adore grignoter et boire. En repensant à cette période, j’ai du mal à le comprendre moi-même. Lorsque j’en parle, j’évoque le sujet comme s’il concernait une autre personne et non moi. Mais j’ai finalement réussi à reprendre le dessus. Ma maman m’a menacée de me faire hospitaliser si je ne recommençais pas à m’alimenter. Mes amis téléphonaient, inquiets, pour prendre des nouvelles. Ils avaient raison de s’en faire, mais j’étais furieuse. Et enfin il y a eu ma nièce, qui, avec son honnêteté enfantine a déclaré que j’étais très laide. Une série d’évènements sans gravité, mais qui m’ont fait prendre conscience que je ne pouvais pas continuer.
Une passion pour les sushis
C’était il y a trois ans. J’ai passé des années à me battre contre moi-même, celles où l’on apprend normalement à se connaître. J’ai beaucoup à rattraper. Et j’ai ainsi découvert que je suis folle des sushis. Manger une armée de sushis a été ma première victoire sur mon obsession. J’ai aussi enfin osé m’avouer que je n’aime pas le sport, donc je ne mets plus les pieds dans une salle de gym. J’essaye de ne pas trop planifier ma vie, mais simplement de faire ce que j’ai envie et de rattraper cette période de ma jeunesse dont je n’ai pas profité. Et voyager en fait partie. J’ai ainsi réalisé que j’aimais le surf, lors de vacances à Bali. Cela aurait été plus facile si j’avais eu plus de tonus, mais ça ne m’a pas empêchée de trouver ça très fun!
“J’aime mes courbes, mon cœur”
J’essaye de ne pas me focaliser sur les quantités et de manger équilibré, mais je tiens à être en bonne santé et j’évite donc de craquer pour des fast-foods cinq jours d’affilée. Désormais, lorsque je suis en vacances, je m’autorise à manger ce que j’aime et pas juste ce qui contient le minimum de calories.
Je pèse aujourd’hui entre 63 et 64 kilos, mais je ne passe pas mon temps à me peser. Pas pour éviter d’être confrontée au poids que je voudrais perdre, parce que je me sens bien comme ça.
‘J’aime mes courbes, mon cœur.’ C’est ce que j’ai répondu à un internaute sur Twitter qui affirmait que je ferais mieux d’investir dans un abonnement à une salle de fitness (rires). Je mets des vêtements qui mettent en valeur mes formes et je poste des photos de moi en bikini. Et c’est bien plus agréable désormais d’être complimentée sur mes courbes. C’est une confirmation que j’ai raison de m’aimer telle que je suis et de ne pas rechuter. J’espère être une source d’inspiration pour celles qui vivent une situation semblable à celle que j’ai connue. C’est essentiel pour moi de montrer à ces filles qui luttent contre une mauvaise image d’elles-mêmes ou sont trop maigres, qu’avoir des courbes n’empêche pas qu’on vous trouve belle. Et si j’ai un commentaire négatif ou une critique de temps à autre, aucune importance!”
Texte: Kaatje De Coninck et Barbara Wesoly. Photo: Thomas Legrève.
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